Il n’y a pas que Yahoo. Des services de police locaux aux Etats-Unis ont été pris la main dans le sac, convaincus eux aussi de vouloir espionner les échanges sur Internet des honnêtes gens à l’aide de logiciels spécialisés, développés par une société financée par la CIA. Ils sont capables de tout suivre : les messages sur les réseaux sociaux comme l’endroit où les internautes se trouvent en temps réel, 24 heures sur 24. Inutile de dire que cette surveillance est radicalement contraire à la Constitution des États-Unis, et plus largement aux exigences de l’état de droit que prétendent respecter nos démocraties occidentales. Si cela se fait outre-Atlantique, pourquoi pas ici ?
Des enquêtes journalistiques à travers les pays ont révélé que les services policiers de Seattle, Chicago, Philadelphie, Oakland et bien d’autres, mais aussi des sociétés commerciales comme Mall of America et McDonalds, ont acheté ces logiciels de la marque Geofeedia, et on peut supposer que l’investissement n’a pas été purement décoratif.
Geofeedia, un logiciel de surveillance financé par la CIA, et acheté par des sociétés commerciales
Que les internautes mettent un message sur Twitter, Instagram ou Facebook, le programme donne immédiatement leur localisation physique à ses utilisateurs, mais aussi la teneur du message dans une seule et unique base de données accessible en permanence à la police et à la clientèle commerciale de Geofeedia. Cela permet, explique le dépliant de la société, d’assurer une « surveillance ciblée » et un « monitoring permanent ». Geofeedia vend aussi la capacité de son logiciel à suivre des foules importantes, y compris lors de « manifestations de protestation », d’événements sportifs et de catastrophes naturelles.
Cette spécialisation vise ouvertement les responsables des forces publiques et des sociétés commerciales, et s’accompagne d’importants efforts de marketing.
La police des Etats-Unis aime l’espionnage et la géolocalisation sur Internet
Un marketing rendu possible, donc, par l’implication de la CIA, qui finance à coup de millions la société Geofeedia et d’autres : par le biais de sa société de capital-risque In-Q-Tel, elle soutient nombre de start-ups. Et elle le fait même de manière de plus en plus affirmée : In-Q-Tel vient de revoir et de moderniser ses liens avec la Silicon Valley, à travers un nouveau département, le Directorat de l’innovation digitale, chargé de développer et de mettre en œuvre des solutions à la pointe du progrès à travers la collaboration directe avec le secteur privé, selon la presse américaine. Ce directorat travaille étroitement avec In-Q-Tel afin d’utiliser les dernières technologies au profit d’un système utilisable par l’ensemble de la CIA.
Au cours de ces dernières dix années, In-Q-Tel un fait d’autres investissements dans des sociétés spécialisées dans le scannage d’importantes quantités de données en ligne. En 2009, la société a fait un partenariat avec Visible Technologies, spécialisé dans la gestion de réputation sur Internet en identifiant l’influence d’auteurs « positifs » et « négatifs » sur toute une série de plates-formes, à propos d’un sujet donné. Il y a six ans, un nouveau partenariat été mis en place avec NetBase, société d’analyse des réseaux sociaux qui se vante de surveiller « des milliards de sources d’information en lignes publiques et privées »« puis un autre avec Recorded Future, une société qui prétend pouvoir prédire des événements à venir grâce à la surveillance du Web.
Plus que jamais, Big Brother is watching you.