DRAME/DRAME HISTORIQUE : Snowden ♥♥


 
Snowden est film militant qui entend rendre hommage au désormais célèbre réfugié politique américain, protégé depuis l’été 2013 par la Russie. Snowden a été dans les années 2000 et 2010 un agent de la CIA, la centrale d’espionnage des Etats-Unis, comme fonctionnaire, puis contractuel ; il a été salarié successivement par de nombreuses entreprises privées sous-traitantes de la CIA ou NSA – l’agence de surveillance intérieure. Snowden a fini par se révolter contre ce qu’on lui demandait de faire, et a fait des révélations publiques en juin 2013. Aussi est-il poursuivi par la justice américaine. Le discours officiel, républicain comme démocrate – tant chez Barak Obama que chez Hillary Clinton – le définit comme un « traître », à poursuivre et à condamner lourdement.
 
Snowden a joué un rôle politique mondial en brisant le silence sur les pratiques pour le moins fort libres de l’espionnage américain : non seulement sont surveillés les ennemis potentiels des Etats-Unis, des organisations terroristes internationales, principalement islamistes, ou des Etats hostiles de façon plus ou moins déclarées, comme la Russie ou la Chine, l’Iran ou le Vénézuéla, mais aussi à peu près tous les Etats, toutes les entreprises, et tous les individus…Cette surveillance englobe les alliés des Etats-Unis, comme le Japon ou l’Allemagne, et bien sûr la France, et des Etats manifestement inoffensifs comme l’Autriche et, ce qui a d’ailleurs fait scandale Outre-Atlantique, tous les citoyens américains. Les lois protégeant la vie privée des citoyens américains, dans leur grande masse sans rapport aucun avec le terrorisme ou le simple banditisme, ont été systématiquement contournées au nom de la législation antiterroriste d’exception mise en place après le 11 septembre 2001. Les garanties théoriques et constitutionnelles sont systématiquement vidées de tout contenu.
 

Snowden se révolte contre la dictature

 
Le spectateur pourrait croire, du fait du passé du réalisateur-vedette Oliver Stone, aux engagements publics progressistes avancés bien connus, ou du discours pour le moins peu nuancé dans le film, à un énième pamphlet d’extrême-gauche plus ou moins paranoïaque…Le problème est qu’au-delà d’une forme qui peut agacer parfois, la thèse du film est parfaitement juste. Le film pose la question de l’obéissance à l’Etat, obéissance considérée comme allant de soi, l’Etat étant supposé toujours légitime, et même le plus légitime des donneurs d’ordres potentiels. Selon le discours de Snowden justifiant sa révolte, c’est précisément l’argument utilisé par les criminels de guerre nazis condamnés à Nuremberg : ils avaient soutenu n’avoir pris aucune initiative particulière, n’avoir été animés de quelque esprit criminel ou sadique, mais d’avoir simplement obéi aux ordres de leur Etat…On peut trouver la comparaison trop courante et facile, voire outrancière, mais il y a là une véritable question philosophique et pratique sur les limites de l’obéissance. Snowden, malgré son manichéisme global, nous a semblé plutôt juste et remarquablement clair : il ne perd jamais le profane avec des éléments techniques du monde de l’espionnage informatique, et se montre donc fort pédagogue.
 

Hector JOVIEN

 
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