Les droits de l’homme varient selon leurs bénéficiaires ; tout comme il n’y a pas de liberté pour les ennemis de la liberté et que certains animaux sont plus égaux que d’autres. L’Italie vient de l’apprendre à ses dépens, elle qui fait l’objet d’un rapport négatif de la part du Comité des droits de l’homme de l’ONU chargé d’évaluer régulièrement chez les pays membres des Nations unies le degré de leur respect à l’égard de la Déclaration internationale des droits de l’homme. Elle est accusée de ne pas assurer convenablement l’accès à l’avortement en raison du « grand nombre de médecins » objecteurs de conscience. Et tant pis si le droit à l’objection de conscience est, éminemment, un droit de l’homme !
Le rapport 2017 s’exprime donc comme si l’accès à l’avortement était un « droit », en tout cas dès l’instant où il est légal. Un droit opposable à la collectivité : l’Italie n’est-elle pas invitée à en assurer l’exercice effectif ? Et pourquoi pas un droit opposable à celui qui en refuse le principe pour des raisons de conscience, fût-il et même surtout lorsqu’il est médecin. Les termes « objection de conscience » sont explicitement employés par le comité de l’ONU pour dénoncer la situation en Italie.
Trop de médecins objecteurs conscience… ou trop de demandes d’avortement ?
Dans son chapitre intitulé « interruption volontaire de grossesse », le rapport 2017 se dit inquiet des « difficultés » qui lui ont été signalées « par rapport à l’accès à l’avortement légal en raison du grand nombre de médecins qui refusent de pratiquer des avortements pour des raisons de conscience, et de la manière de leur répartition dans le pays ».
Ce faisant l’agence onusienne s’aligne purement et simplement sur les revendications du Planning familial puisque le réseau européen de la Fédération internationale du Planning (IPPF EN) a ouvert les hostilités en 2012 en soumettant une plainte contre l’Italie au Comité européen des droits sociaux, invoquant là encore la difficulté d’accéder à l’avortement en raison du nombre élevé d’objecteurs de conscience, ce qui constituait selon lui une « violation du droit à la santé ».
L’objection de conscience face à la pratique de l’avortement fait l’objet d’une protection légale explicite en Italie et elle est le plus souvent invoquée, dans les faits, pour des raisons religieuses. Les objecteurs n’hésitent d’ailleurs pas à se justifier au nom de leur droit à la liberté religieuse.
Le rapport 2017 attribue à la prévalence de l’objection de conscience la responsabilité d’un problème qu’elle évoque sans apporter la moindre preuve ni donnée chiffrée de son existence : le nombre d’« avortements clandestins » pratiqués selon l’ONU en Italie.
Le Comité des droits de l’homme de l’ONU dit à l’Italie de légaliser l’adoption homosexuelle
Le rapport enjoint donc à l’Italie de prendre des mesures pour que les femmes puissent accéder librement et effectivement à l’avortement, en mettant par exemple en place un système permettant aux femmes d’être dirigées vers un médecin prêt à avorter quand le leur s’y refuse. Inutile de dire que cela constitue déjà en soi une violation de la conscience puisque l’objecteur se trouve alors obligé de se faire complice d’un acte qu’il considère comme le meurtre d’une personne humaine innocente.
Allant encore plus loin dans la promotion de la culture de mort – et outrepassant complètement ses droits et compétences puisque la Charte des droits de l’homme ne prévoit rien de tel – le comité de l’ONU regrette que l’Italie ait légalisé l’union civile sans prévoir un droit à l’adoption pour les homosexuels, et dénonce « son refus persistant de permettre aux couples homosexuels d’accéder à la fécondation in vitro ». A quoi s’ajoute une demande insistante de voir mettre en place une législation anti-discrimination protégeant explicitement les LGBTI de la « haine » de leurs concitoyens.
Jeanne Smits