Ali, la chèvre et Ibrahim est un film comique égyptien. Le film traite d’un itinéraire qui mène à travers l’Egypte, ou du moins quatre points essentiels, Le Caire, Alexandrie, le Sinaï, la Mer Rouge, les trois personnages du titre. Le Caire est la capitale de l’Egypte et une ville immense, et reprenant l’adage local selon lequel tout en vient et y ramène, elle forme le point de départ et d’arrivée des trois personnages. Alexandrie est le grand port sur la Méditerranée. Le Sinaï est la montagne désertique, sacrée pour les chrétiens et les musulmans qui y célèbrent le souvenir de Moïse et de l’Exode. En cet épisode comme en beaucoup d’autres, le coran a réinterprété la Bible à sa façon, de manière obscure. Son Moussa diffère significativement du Moïse des Chrétiens. La mer Rouge est l’autre mer de l’Egypte, à la côte très peu peuplée et semi-désertique de l’Antiquité à nos jours ; mer chaude toute l’année, y compris et surtout lors de l’hiver en Europe et en Russie, elle tient lieu aujourd’hui de paradis touristique international ; le film veut y voir un espace d’échange convivial entre autochtones et étrangers venus de loin, ce qui est pour le moins optimiste, voire complètement faux.
Ali, la chèvre et Ibrahim, un point de vue authentique et étonnant sur la mentalité populaire arabe égyptienne
Ali et Ibrahim sont deux voisins qui vivent, ou survivent, dans un quartier pauvre du Caire. Ils sont tous les deux malades : l’un entend des acouphènes – sons imaginaires – qui le font très douloureusement souffrir ; l’autre est amoureux de l’âme d’une chèvre – il ne s’agit heureusement que d’un amour platonique – et est devenu la fable de son quartier. Comment réagissent le grand-père de l’un et la mère de l’autre, leurs seules familles, qui s’inquiètent terriblement ? Ils mènent Ali et Ibrahim chez le marabout, afin de les désenvouter. La mère de l’amoureux de la chèvre est persuadée qu’un sort a été jeté sur son fils par une voisine avec laquelle elle avait eu un différend. Le marabout confirme, et livre comme remède à Ali et Ibrahim des pierres magiques, à jeter dans le Nil, la Mer Méditerranée, et la Mer Rouge. Il en résulte le voyage du film. Si le ton est comique, le plus étonnant peut-être est que, jusque-là, cette histoire surréaliste est à peu près crédible dans l’Egypte d’aujourd’hui !
Durant la première heure, la comédie fonctionne, fait sourire assez régulièrement. Il y a dans cette histoire un réel potentiel comique. Le problème est qu’Ali, la chèvre et Ibrahim s’attache trop aux personnages, tient à en faire des héros positifs dans la deuxième heure, et au final, à la manière des contes arabes voudra donner raisons aux « fous » contre la société. Peut-être à cause d’une différence culturelle, nous avons éprouvé des difficultés à suivre le point de vue du film dans cette deuxième partie. Que penser des pouvoirs magiques d’une chèvre ? Le spectateur occidental frôle l’ennui, ce qui est dommage. Il reste indiscutablement un point de vue authentique et local sur la mentalité populaire arabe égyptienne. C’est assez étonnant.