Bras de fer à Los Angeles sur l’usage des drones, les policiers du LAPD veulent instaurer la surveillance aérienne

drones surveillance Police Los Angeles
 
A Los Angeles, des drones affectés au département de la police du comté (LAPD) ont dû être neutralisés alors que les manifestants défilaient dans la rue, protestant en faveur de la défense des droits civils et dénonçant les menaces de surveillance généralisée des citoyens. Le conseil civil de surveillance de la police de Los Angeles avait demandé jeudi 27 juillet que le chef de la police du comté, le shérif Jim MacDonnell, interrompe les vols de surveillance d’un drone en invoquant le risque « d’intrusion, de mise en danger de la sécurité et de traumatisme potentiel » de la population. Contrairement aux caméras de surveillance situées sur la voie publique, les drones peuvent enregistrer des images dans les espaces privés. Ce mardi, le LAPD a relancé le débat, informant que ses policiers désiraient tester à nouveau des drones pendant un an.
 

Les opposants craignent une surveillance orwellienne et des drones armés

 
Les drones aident à la localisation de randonneurs égarés comme au suivi de suspects armés, sans mettre en danger la sécurité des policiers. « Mais les efforts pour déployer ces aéronefs sans présence humaine à bord ont attirés de violences critiques de la part des défenseurs de la vie privée et des détracteurs de la police, pour lesquels ces appareils évoquent une situation orwellienne (…) avec possibilité de drones armés », écrit Kate Mather, dans le Los Angeles Times.
 
Mardi, le LAPD s’est heurtée à cette opposition avant même que ses dirigeants ne dévoilent leur proposition à la commission de la police du comté : une quarantaine d’activistes s’étaient réunis devant son siège, criant « Police sans drones, pas de drones à LA ! ». Le projet, s’il est approuvé par les élus, consistera à faire voler un petit drone de 30 cm sur 20 cm, en appui durant une prise d’otage, un siège de tireur retranché, une menace d’explosion.
 

Beatrice Girmala (LAPD) : « Les drones recueillent des informations, sans risque pour les policiers »

 
Ces petits engins permettent de recueillir des informations capitales sans mettre en danger les policiers, plaide Beatrice Girmala, directrice adjointe du LAPD. Elle promet un encadrement strict de l’usage de ces drones – autorisation préalable d’un dirigeant de haut niveau, rapport écrit – et des réunions pour informer la population.
 
Cette méthode contraste avec celle adoptée en début d’année lors du premier lancement d’un drone à Los Angeles. Le shérif MacDonnell avait annoncé en janvier sa mise en service avant que l’autorité publique n’ait testé l’opinion et après que les officiers eurent déjà été formés au pilotage à distance. Cette annonce avait déchaîné les opposants, dans un pays où la hiérarchie policière est étroitement contrôlée par l’électorat (élection directe des shérifs) et par les élus. Un avocat des libertés civiles avait dénoncé une « décision unilatérale ». Plusieurs membres de la commission civile de contrôle avaient exigé l’interruption des opérations, même si cet organisme consultatif n’a pas autorité directe sur le shérif. La police avait répliqué par un maintien en service du drone, qui a servi durant le siège d’un tireur la semaine dernière à Los Angeles-Est.
 

Dan Gettinger, chercheur : 350 services de sécurité ont acquis des drones aux Etats-Unis

 
Dan Gettinger, du Centre d’étude sur les drones au Bard College, note que plusieurs polices ont mis en service des drones sans opposition notable. Quelque 350 services de sécurité en ont acquis aux Etats-Unis depuis 2016. Les drones sont déjà l’objet aux Etats-Unis d’une abondante réglementation. Dix-huit Etats ont adopté des lois exigeant des garanties strictes, indique la Conférence nationale des parlements des Etats. Mais ce sont des lois en vigueur dans quelques Etats fédérés qui scandalisent le plus les opposants californiens, comme celles du Dakota du Nord qui, depuis 2015, permet aux polices d’équiper leurs drones d’armes non létales – lacrymogènes, balles en caoutchouc, Tasers. Le Connecticut a failli permettre aux polices d’armer certains drones. Une fois portée par un drone, l’arme, sans aucun risque pour les fonctionnaires et activée depuis un poste central, acquiert une toute autre dimension.
 

Les opposants relaient la peur des résidents, qui « se sentent déjà surveillés par la police »

 
A Los Angeles le chef du LAPD, Charlie Beck, tente de rassurer : « Ce que nous recherchons, c’est juste un nouveau point d’observation ». Pour autant, affirme-t-il, « Nous ne sacrifierons pas le soutien de la population pour un équipement parmi d’autres ». Les drones, mis sous clef dans les locaux de l’inspecteur général de la police de Los Angeles, ont été neutralisés, a assuré Mme Girmala.
 
Les opposants, eux, dénoncent maintenant des « abus de missions » auxquels la police pourrait se livrer, se faisant l’écho de la peur de certains résidents « qui se sentent déjà surveillés par la police ». Quand Beatrice Girmala a dit que les SWAT, les équipes d’intervention, pourraient utiliser des drones, les opposants présents dans la salle ont bruyamment protesté. « Nous nous battrons jusqu’au bout », a lancé Jamie Garcia, membre de « Stop LAPD spying ».
 

Les syndicats de la police de Los Angeles dénoncent les « théoriciens de la conspiration », le citoyen lambda s’inquiète

 
Réplique du président de la commission, Matt Johnson : « Ces drones peuvent sauver des vies (…) Notre défi consiste à appliquer des règles fortes pour encadrer ce projet, empêcher les dérives ». Les syndicats de policiers du LAPD, eux, contestent les critiques des opposants, estimant dans un communiqué que les drones constituent « des outils évidents pour protéger la sécurité des résidents comme des policiers dans des situations dangereuses ». Ils ajoutent : « Il est temps pour les théoriciens de la conspiration et les professionnels de la contestation de cesser d’empêcher les efforts que nous fournissons pour assurer la sécurité ». La surveillance systématique et automatisée du territoire n’en reste pas moins une menace inquiétante pour le citoyen lambda, que l’Etat justifie par la criminalité qu’il encourage par ailleurs en favorisant l’immigration incontrôlée, en privant la police des moyens de ses missions et en tolérant le laxisme de la justice.
 

Matthieu Lenoir