Pour commémorer le 50ème anniversaire de la légalisation de l’avortement par l’Abortion Act en 1967, la BBC2 a tourné une émission intitulée « Abortion On Trial » (« Avortement en procès »), qui doit être diffusée lundi prochain. L’ancienne infirmière Sarah Costerton, mère d’une petite trisomique de quatre ans, avait été retenue pour figurer parmi les neuf protagonistes aux opinions diverses. Du moins au départ… Le fait qu’elle soit enceinte a manifestement dérangé les directeurs du programme qui l’en ont tout bonnement évincée.
Histoire de ne pas perturber les téléspectatrices enceintes qui hésiteraient… qui doivent donc choisir de préférence la mort à la vie.
Sarah Costerton, maman d’une petite trisomique
La présentatrice Anne Robinson voulait pourtant de tout : des pro-vie comme des pro-choix… Et Sarah Costerton était un juste échantillon en la matière. Il y a quatre ans, alors qu’elle était enceinte, on l’avertissait que son bébé était atteint du syndrome de Down (trisomie 21) : son mari et elle-même faisaient le choix de le garder et la petite fille qui leur naquit les comble de bonheur depuis lors.
Face à une autre participante qui avait pratiqué cinq avortements (il y en a de plus en plus au Royaume-Uni), c’était l’assurance d’une bonne réplique inverse. Et d’ailleurs les responsables du programme semblaient tout à fait partants.
Seulement, elle raconte qu’elle fut brusquement éconduite : « Ils craignaient que cela n’empêche les gens de parler librement ou de parler de problèmes; ils craignaient que le fait que je sois enceinte offense les gens qui ont opté pour un avortement (…) Il me semblait qu’être enceinte était un obstacle ».
« La sympathie va toujours à la femme qui a choisi l’avortement »
Plus que déçue, l’infirmière est amère : « J’étais en colère parce que l’on sent qu’il y a une protection supplémentaire accordée aux sentiments des femmes qui ont vécu une interruption de grossesse (…). La sympathie va toujours à la femme qui a choisi l’avortement et la société s’attend à ce que tout le monde se sente ainsi. Quiconque ne soutient pas complètement ça doit s’attendre à être considéré de droite, anti-choix et anti-femmes ».
« Les commentaires que j’ai subis sur ma fille atteinte du syndrome de Down sont hallucinants et la communauté de Down doit supporter de se sentir offensée tous les jours. »
Éconduite par la BBC parce que enceinte
Le 25 septembre dernier, le Collège royal des obstétriciens et gynécologues (RCOG) a offert son soutien à la décriminalisation de l’avortement au Royaume-Uni, c’est-à-dire à l’élimination des sanctions pénales associées à l’avortement, à la suite de la proposition de loi de la député travailliste Diana Johnson, le 13 mars dernier. Si le changement devrait demeurer « symbolique », l’accès à l’avortement serait, dans les faits, « facilité » et sûrement davantage utilisé.
« Pour la première fois, les femmes seront reconnues comme responsables de leurs propres vies », a déclaré la militante pro-avortement Diana Johnson.
« Responsables » ? Au vu de l’éviction de cette femme enceinte, on peut clairement en douter. Très manifestement les programmateurs veulent influer sur la décision et donc la responsabilité d’éventuelles téléspectatrices en cours de grossesse, en pleine hésitation sur le « choix » qui leur est malheureusement proposé.
Dans une émission consacrée à l’avortement sous tous ses angles, ils refusent de montrer la grossesse en acte – ce qui, en passant, paraît fou du seul point de vue de la logique. On raye d’office la vision de la grossesse acceptée, vécue, heureuse. Qui plus est, de la grossesse heureuse après une précédente naissance de trisomique, et à 43 ans ! Là, c’en était vraiment trop…
L’avortement « en procès », vraiment ?
Il ne faut pas faire trop de publicité à ces gens… En réalité, donc, cette émission ne fera aucun « procès » de l’avortement. Certes, il y aura, apriori, des pro-vie, ainsi que s’en targuent les programmateurs : « Comme dans tout programme, la production a parlé à un large éventail de contributeurs potentiels et il n’est tout simplement pas vrai que quelqu’un n’ait pas été inclus au motif que leur histoire pourrait offenser (sic). Les contributeurs représentent un large éventail de points de vue et de perspectives et incluent la mère d’un enfant atteint de trisomie 21. »
Mais ce à quoi porte atteinte l’avortement, la grossesse en acte, on dégage.
Cette attitude démontre aussi clairement que cela reste, Dieu merci, une vision porteuse d’une positivité absolue qui risque de faire pencher la balance chez celles qui, encore, doutent, ou risque de faire naître un remords malvenu chez celles qui ont déjà avorté… Et ça, ils ne le veulent pas. Le bonheur ne doit faire suite qu’à un choix, il n’est pas lié à une réalité. Mais, d’ailleurs… quelle réalité ?!