Accord impossible sur le glyphosate dans l’Union européenne

Accord impossible glyphosate Union européenne
 
Au grand dam de la Commission européenne, l’Union n’est pas parvenue à trouver un accord à la majorité qualifiée sur le renouvellement partiel de la licence d’un herbicide, le glyphosate, qui expire le 15 décembre prochain. Impossible d’obtenir la majorité qualifiée parmi les Etats-membres.
 
On comprend donc qu’un certain nombre de pays, neuf exactement, dont la France, rechigne à admettre un renouvellement trop long. Paris propose notamment un renouvellement pour trois ans, afin de pouvoir, à l’horizon 2020, disposer d’un avis plus complet, sinon définitif, sur le sujet. Il est vrai que deux agences européennes, l’Autorité européenne de sécurité des aliments et l’Agence européenne des produits chimiques, estiment pour leur part que ce produit n’est pas aussi nocif qu’on l’affirme.
 
On peut s’interroger sur le fait qu’une telle autorisation soit renouvelée un tant soit peu si les risques sont tels qu’on les suppose – au moins… Mais sans doute est-il difficile de s’en passer totalement du jour au lendemain, sans savoir à l’avance par quel genre de produits on le remplacerait.
 

Nouvel accord impossible pour l’Union européenne

 
Quoi qu’il en soit, la question ne porte pas directement, en l’occurrence, sur le glyphosate lui-même, mais sur la conception qu’a Bruxelles de la démocratie. En effet, faute d’accord, la proposition de la Commission européenne pour un renouvellement sur cinq ans va être soumise à un comité d’appel, qui devrait se prononcer avant la fin de ce mois de novembre. Or ledit comité d’appel sera composé d’autres représentants des mêmes Etats-membres qui, logiquement, devraient donc aboutir au même vote – d’autant qu’ils ne peuvent se prononcer que sur la proposition de Bruxelles.
 
Dans ce cas, la situation est simple, puisque, in fine, c’est à la Commission européenne qu’il reviendra de se prononcer sur la proposition qu’elle a elle-même faite. C’est-à-dire que la Commission, dont on ne voit pas pourquoi elle se déjugerait, se prononcera en faveur du renouvellement de ladite licence pour cinq ans. La seule solution pour y échapper serait qu’une majorité qualifiée se prononce contre ladite proposition, mais il n’y a guère de raisons objectives pour que certains Etats-membres durcissent désormais leur actuelle position.
 

Glyphosate, ou démocratie ?

 
On peut donc s’interroger sur la nécessité de toutes ces péripéties démocratiques, puisque, en définitive, cette démocratie paraît ne devoir être qu’un vain mot. Lorsque le décideur impose sa volonté d’un bout à l’autre de la chaîne, en déclarant nulle toute expression contraire à la sienne, il est en effet délicat d’y voir l’exercice d’une volonté commune.
 
Mais il semble qu’il ne s’agisse pas seulement, pour Bruxelles, de noyer le poisson. Ainsi le commissaire à la Santé, Vytenis Andriukaitis, a-t-il expliqué à plusieurs reprises que la Commission européenne préférait ne pas supporter seule la responsabilité d’une telle décision, demandant au contraire qu’elle soit « partagée » avec les Etats-membres. Jean-Claude Juncker les a d’ailleurs appelés à prendre leurs responsabilités. Une litote pour les enjoindre à s’aligner sur sa décision.
 
La santé publique, dans ce faux débat, apparaît donc comme un faire-valoir, puisqu’elle est devenue une sorte d’argument-massue à destination des populations.
 

Matraquer le cerveau des « chères têtes blondes »

 
Pour Jean-Claude Juncker, qui constate que c’est encore insuffisant, il convient cependant de travailler en amont. Conscient du désamour des Européens non pour l’Europe, comme il l’affirme, mais pour l’Union européenne, le président de la Commission bruxelloise souhaite, selon un de ses conseillers, appeler des célébrités à se faire les ambassadeurs de Bruxelles, afin de gagner « les cœurs et les esprits » des enfants jusqu’à l’école primaire.
 
L’expression est sans doute plus jolie que le vulgaire « bourrer le mou ». Mais on se demande toujours en quoi l’avis d’un sportif ou d’un comédien a une quelconque importance en politique. Ce qui est sûr c’est qu’il n’aura guère de mal – hélas ! – à en trouver…
 

Hubert Cordat