Silentium est un très beau documentaire, au titre explicite, qui renvoie au silence qui doit régner dans un couvent catholique. On se situe là aux antipodes du bruit et des distractions modernes. L’âme, dans le silence, se trouve dans la manière disposition pour écouter Dieu. C’est ce que savent tous les moines depuis l’Antiquité. Le silence est permis par l’emplacement du couvent, dans la campagne bavaroise, et l’application de la règle. Même lors d’indispensables travaux d’entretien du couvent, des mesures sont prises pour limiter le bruit, alors inévitable, au maximum. Les nonnes doivent se contenter entre elles des conversations techniques strictement indispensables. Le repas par exemple s’effectue en silence, et la sœur désirant se retirer en demande d’un discret signe de tête l’autorisation à la Prieure, qui répond sur le même mode.
Le documentaire rend bien compte, de façon équilibrée, de la vie de ces sœurs. Le drame est qu’elles ne sont plus que cinq, dont deux nonagénaires, deux octogénaires, et une quinquagénaire, la Prieure, seule apte à gérer l’établissement. Le recrutement, autrefois abondant, s’est complètement tari dans les années 1970. Les sœurs, plusieurs dizaines jusqu’à ces années 1970, meurent les unes après les autres. Le couvent risque de devoir bientôt fermer, faute de sœurs. Pourtant, aucune ne se montre triste ou amère, sans sombrer pour autant dans quelque optimisme absurde. Lucides sur la situation, elles souhaitent qu’à l’avenir, Dieu, d’une façon ou d’une autre, continue d’être adoré dans les bâtiments du couvent.
Silentium, un instant de grâce !
Le couvent est rythmé par les heures canoniales, marquées par la cloche. Des religieuses allemandes, même très âgées, parfois en déambulateur, se rendent ponctuellement à leurs tâches, aux travaux comme aux offices. Les offices sont chantés, en langue allemande – sur traduction manifeste et fidèle du latin – avec toute la piété requise. Bizarrerie du rituel moderne, il est quand même étrange de tutoyer, respectueusement, Dieu, et de vouvoyer, comme il se doit, les autres sœurs – parfaitement connues depuis des décennies. Le couvent accueille habituellement, en invité permanent, hors de la clôture, un père capucin septuagénaire, qui participe aux offices et dit tous les jours la Messe ; il s’occupe aussi des travaux agricoles, soit du jardinage et du petit troupeau de moutons. Le couvent accueille régulièrement des pèlerins, ou des femmes en retraite spirituelle.
Silentium propose un véritable moment de grâce, particulièrement rare au cinéma. Il est fort dommage que ce film ne bénéficie que d’une diffusion trop restreinte en France.