Elle est partout : dans les écoles (même catholiques !) et sur les terrains de sport, dans les entreprises et dans les réunions de Davos, dans les applications embarquées d’office sur les Smartphones et dans les programmes de détente en vol proposés par les compagnies aériennes. La “mindfulness” ou méditation pleine conscience fait l’objet d’innombrables livres, manuels multimédia et autres albums à destination des adultes comme des tout-petits. Pas de jour ne se passe sans que la presse mondiale n’en explique les bienfaits – pour dormir, pour travailler, pour trouver la paix de l’âme, pour établir la paix mondiale. Mais cette pratique spirituelle est-elle compatible avec la foi catholique ? Le site américain Catholic Exchange (une subdivision de l’excellente maison d’édition Sophia Institute Press) propose depuis mercredi un intéressant message qui permet de faire la lumière.
Son auteur, Jeannie Ewing, commence par faire une mise au point de vocabulaire. La première difficulté vient en effet du nom donné à cette pratique, à cette technique : le mot « mindfulness » en anglais, plutôt bien traduit par « pleine conscience », suggère l’éveil, l’attention au moment présent. Cette attitude ne comporte a première vue pas de dimension spirituelle : c’est simplement l’attitude de l’être humain en phase avec ses perceptions et avec la réalité qui l’entoure. Le dictionnaire définit le « mindfulness » comme « le fait d’être conscient de quelque chose » ou de « focaliser sa conscience sur l’instant présent ». Plutôt bénin…
Mais c’est un mot qui a été détourné – « kidnappé » par des psychologues positivistes, dit Jeannie Ewing, en vue de faire croire à ses adeptes que c’est le meilleur outil pour réduire ou faire disparaître l’anxiété.
La méditation pleine conscience est partout
La technique de la méditation pleine conscience fait l’objet de recherches dans la psychologie moderne depuis les années 1970, en vue de soigner la dépression, l’anxiété, et même les psychoses et la toxicomanie. « Mais si ça marche, où est le mal ? », commente Jeannie Ewing. Si c’est simplement pour éliminer le stress…
Mais elle a identifié trois graves dangers dans l’utilisation actuelle des techniques de la méditation pleine conscience – et elle précise que c’est dans l’état actuel de ses recherches, un tour complet de la question étant susceptible d’en révéler d’autres.
Le premier danger est lié selon Jeannie Ewing au fait que la psychologie « laïque », ou plutôt matérialiste ignore et rejette l’âme. En réduisant l’être humain à ce qu’on peut empiriquement en constater, « nous en sommes réduits aux processus scientifiques pour la gestion de nos émotions ou de nos comportements, ou pour comprendre les pathologies cérébrales sous-jacentes », explique-t-elle.
« Si les êtres humains ne sont composés que de matière, cela implique l’absence d’une compréhension globale de la part de ceux qui exercent des professions dans le domaine de la psychologie leur permettant de voir la réalité de l’âme – cet aspect immortel de chaque personne créée à l’image et à la ressemblance de Dieu. Comme Dieu est rarement pris en compte lorsqu’une personne cherche un conseil psychologique, il est probable que le thérapeute ne croira pas en l’existence du péché ou au fait que la personne doive se sentir coupable de ces péchés. A l’inverse, presque tous les comportements et choix sont devenus acceptables ou tolérables du point de vue de ceux qui exercent cette profession. Les interventions dont ils usent sont le reflet de leurs croyances, et la méditation pleine conscience n’échappe pas à cette règle », observe Jeannie Ewing.
La « mindfulness » est rattachée au bouddhisme, pas à la foi catholique
Le deuxième danger vient du fait que la méditation pleine conscience est enracinée dans le mysticisme oriental.
Elle explique cette conviction ainsi : « Il nous faut faire attention avant de présumer que n’importe quelle activité en ce monde est susceptible d’être “baptisée” pour devenir en quelque sorte christianisée, spécialement face à des pratiques intrinsèquement spirituelles enracinées dans des croyances religieuses païennes ou même diaboliques. Les médias comme les professionnels du conseil présentent la méditation pleine conscience comme capable de modifier la psyché de manière spectaculaire pour la faire passer de la peur à la paix. Mais cette fin justifie-t-elle les moyens ? En recherchant davantage d’informations sur la méditation pleine conscience, j’ai découvert cet définition très révélatrice : “Dans les enseignements bouddhiques, la méditation pleine conscience est utilisée pour développer la connaissance de soi et une sagesse qui peu à peu conduise à ce qu’on appelle l’illumination, ou l’absence complète de souffrance”. »
Cela mérite d’être analysé : voilà la preuve que la méditation pleine conscience est enracinée dans le bouddhisme, qu’elle vise à aider la personne à atteindre la connaissance de soi sans la conduire, au bout du compte, à Dieu, et que le but ultime de la méditation pleine conscience et de libérer la personne du « fardeau » de la souffrance, explique Jeannie Ewing.
« Il est très clair que ce n’est pas le chemin que nous voulons prendre en tant que chrétiens catholiques. D’abord, nous ne pouvons pas baptiser cette pratique dès lors qu’elle est si évidemment enracinée dans le mysticisme oriental. Deuxièmement, croître dans la connaissance de soi est un but noble et digne dès lors que nous nous efforçons de nous rapprocher de Dieu – mais les pratiques de la méditation pleine conscience omettent cette composante véritablement cruciale. Enfin, le rejet de la souffrance est le rejet de la Croix, qui est pour nous le moyen de la sanctification et du salut », rappelle-t-elle.
La méditation pleine conscience bloque la personne sur elle-même, au contraire de la foi catholique
Troisième danger : les pratiques thérapeutiques modernes sont centrées sur le « soi », et non sur Dieu.
Jeannie Ewing rappelle que si la connaissance de soi vise à mieux identifier des défauts, des vices ou des péchés, elle est essentielle au bien-être spirituel : l’introspection est nécessaire pour « déraciner ce qui nous empêche d’être plus profondément unis à Dieu ».
« Mais la méditation pleine conscience, comme beaucoup de pratiques spirituelles orientales, conduit souvent le soi vers le soi, et non vers Dieu. Elle ne connaît pas de Dieu personnel, ni de croyances religieuses personnelles, et par conséquent, il n’y a aucune raison pour qu’une personne médite sur quelque vérité spirituelle en relation avec le Dieu Un et Trine » : en somme, la méditation pleine conscience se trompe d’objet, ou plutôt trompe son adepte quant à l’objet de la méditation.
« Il semblerait que le glissement depuis le christocentrisme vers l’égocentrisme se soit lentement opérée au cours de ces dernières décennies, principalement lorsque le mouvement de “l’estime de soi” s’est largement popularisée au cours des années 1970, en même temps que le mouvement de la méditation pleine conscience s’imposait dans la culture occidentale. Mais tout don de valeur vient de Dieu, et non de nous-mêmes ou de nos propres efforts. Le vrai travail – travail ardu – implique un acte de la volonté : permettre à Dieu de buriner nos défauts, de nous élaguer pour nous purifier. C’est la sainteté qui nous guérit », conclut-elle.