Une interview du nouvel ambassadeur des Etats-Unis en Allemagne, Richard Grenell, soulève une vague d’indignation dans le monde politico-médiatique allemand ainsi que de nombreuses critiques jusque dans les médias français scandalisés par le manque de neutralité de cet homme nommé par Donald Trump pour représenter son pays à Berlin. S’adressant au site d’information conservateur Breitbart, dont il assure être un fidèle lecteur et qu’il vante pour son excellent travail, l’ambassadeur Grenell a évoqué de nombreux sujets. Il a évoqué avec insistance le problème posé par une Allemagne qui n’investit pas assez dans sa défense et ne remplit pas ses obligations vis-à-vis de ses partenaires de l’OTAN, et il a assuré que Washington allait pousser Berlin à changer de politique dans ce domaine. Mais d’autres sujets dépassaient clairement le cadre des simples relations bilatérales. Ce qui provoque une vague d’indignation parmi les « élites » politico-médiatiques allemandes, et aussi de la gauche américaine, ce sont des propos par lesquels l’ambassadeur affirme que de nombreux conservateurs en Europe l’ont contacté pour lui parler d’un renouveau de la vraie droite en cours et qu’il est déterminé « à soutenir les autres conservateurs dans toute l’Europe ainsi que leurs leaders ».
Grenell parle d’une vague montante des politiques conservatrices en réaction « aux politiques ratées de la gauche ». Et il ajoute : « Je pense que l’élection de Donald Trump a encouragé les gens à dire qu’ils ne peuvent plus permettre à la classe politique de déterminer avant une élection qui va gagner et qui doit se présenter. »
L’ambassadeur des Etats-Unis en Allemagne est un fan du jeune chancelier autrichien Sebastian Kurz
Etait-ce une allusion à la manière dont Emmanuel Macron s’est fait élire président de la République française ? Quoi qu’il en soit, le dirigeant qui suscite l’admiration de Richard Grenell en Europe n’est ni Macron ni Merkel, mais le jeune chancelier autrichien qui s’est allié au FPÖ, parti conservateur qualifié comme le site Breitbart d’ « extrême droite » par les médias mainstream du Vieux Continent. Pour l’ambassadeur des Etats-Unis en Allemagne, Sebastian Kurz est une véritable « rock star » et il avoue en être « un grand fan ».
« L’ambassadeur du « Trumpistan » suscite l’ire de l’Allemagne », titre Le Figaro. « Un ambassadeur américain très envahissant », pour La Croix. « La diplomatie à rebrousse-poil de Richard Grenell », selon Le Monde. « Tollé en Allemagne contre l’ambassadeur américain, accusé d’ingérence », d’après Libération. L’indignation est effectivement forte en Allemagne, à la limite de l’hystérie collective dans certains médias, et le ministre des Affaires étrangères à Berlin a demandé des explications. À Washington, l’attachée de presse du Département d’Etat, Heather Neuert, a toutefois défendu le droit de l’ambassadeur à exprimer ses opinions face aux représentants des médias américains de gauche qui s’en offusquaient. La vague d’indignation médiatique a en effet concerné aussi le monde anglo-saxon.
« Ingérence » dans les affaires de l’Europe d’un ambassadeur nommé par Donald Trump ?
Pourtant, ces mêmes médias ne s’étaient pas offusqués, sous la présidence de Barack Obama, des propos tenus par le chargé d’affaires américain en Hongrie, Andre Goodfriend, en l’absence d’un ambassadeur des États-Unis à Budapest à l’époque. Goodfriend avait maintes fois critiqué publiquement le gouvernement de Viktor Orbán, l’accusant de corruption sans donner de précisions. Il avait en outre participé à des manifestations qui s’étaient déroulées en novembre 2014 contre un projet de loi du Fidesz pour taxer Internet. L’homme d’Obama soutenait ouvertement le chef de file des socialistes et ancien Premier ministre, Ferenc Gyurcsany, ancien communiste devenu riche oligarque, et il n’y avait là rien d’anormal aux yeux des médias internationaux. Et que dire alors de la participation fréquente d’ambassadeurs de pays occidentaux aux « marches des fiertés » du lobby homosexuel dans les pays de l’ex-Europe de l’Est, pour soutenir les revendications de la gauche et du lobby LGBT ?
L’indignation à sens unique des dirigeants allemands et des médias
Cette année encore, les ambassadeurs en Pologne de nombreux pays (dont la France, l’Allemagne et les États-Unis) ont signé une lettre ouverte pour soutenir la « Parade de l’Egalité » de Varsovie, qui est l’équivalent, en un peu moins vulgaire, de la Marche des Fiertés parisiennes. Cette marche doit se dérouler ce week-end dans la capitale polonaise.
Il est donc normal, puisque Donald Trump a remporté les élections américaines avec un programme de droite, que le nouvel ambassadeur des Etats-Unis en Allemagne soit un homme de droite qui préfère soutenir en Europe le mouvement conservateur et ses leaders plutôt que cette gauche-droite libérale-libertaire et mondialiste qui a la préférence des diplomates nommés par Barack Obama. Le ton offusqué adopté par les grands médias allemands, européens et américains après les déclarations de Richard Grenell est le reflet non seulement de leurs préférences politiques mais aussi de leur grande hypocrisie et de leur approche militante de l’information.