Qui a dit que la Russie de Poutine a rompu avec le communisme ? Le coup de fil, samedi, du vice-président du Conseil de Sécurité – et ancien président, et ancien Premier ministre – Dimitri Medvedev pour souhaiter un bon anniversaire de 92 ans au révolutionnaire cubain Raúl Castro est venu, samedi, apporter la preuve d’une complicité jamais démentie. Complicité idéologique assumée auprès de ce communiste historique ; le communiqué du cabinet de Medvedev diffusé par l’agence russe officielle Tass le souligne sans détours :
« M. Medvedev a adressé à M. Castro ses vœux d’anniversaire les plus chaleureux et lui a souhaité bonne santé, bien-être et longue vie. Le vice-président du Conseil de sécurité russe a souligné que Castro était un symbole de la lutte pour les idéaux de liberté et d’indépendance du pays à travers de nombreuses générations du peuple cubain. Il a également remercié M. Castro pour les nombreuses années de coopération fructueuse et pour son énorme contribution personnelle à l’établissement d’un partenariat stratégique entre nos deux pays. »
Ce qui n’empêche pas Cuba de s’inscrire dans la marche vers le mondialisme, qu’elle soit politique, ou bien religieuse. Derrière la dialectique, même de la guerre, il peut toujours y avoir un objectif qui dépasse les conflits.
Raúl Castro fut de toutes les luttes communistes Cuba
Raúl Castro, dont les liens de sang avec son frère, l’ex-leader révolutionnaire et tyran du Cuba communiste Fidel Castro, ne sont pas soulignés dans les comptes-rendus officiels de cette conversation téléphonique, était en effet inscrit au parti communiste dès l’âge de 22 ans, avant même que son aîné n’optât ouvertement pour le marxisme-léninisme.
Aux côtés de Fidel et du sanguinaire Che Guevara, Raúl participa à la lutte de guérilla qui aboutit à la prise du pouvoir communiste à Cuba en 1959. Même Le Monde notait en 2006, sous la plume de Sylvie Kauffmann, que ce fut le plus jeune des deux Castro qui exécuta les basses œuvres : « Là, dans les premiers jours de la victoire, Raul dirige l’exécution sommaire de dizaines de prisonniers, ce qui indigne l’ambassadeur américain fraîchement débarqué Philip Bonsal et une partie de la communauté internationale. Les exécutions continueront, toujours sous sa supervision, mais devant des tribunaux révolutionnaires. » C’est lui encore qui organise la « sécurité », c’est lui qu’on affuble du surnom de « stalinien du groupe », lui qui fait tourner l’infernale machine du pouvoir communiste.
Medvedev s’inscrit dans la longue complicité entre la Russie et Cuba
Dès l’année suivante, en 1960, il se rend à Moscou pour y obtenir de Krouchtchev « un vaste programme d’assistance militaire ». Il sera l’homme fort, le technicien aux côtés du « visionnaire » Fidel : la plongée dans la mise en œuvre de l’« intrinsèquement pervers » sera le fait de leur collaboration jamais interrompue. C’est lui qui remplacera « par intérim » Fidel vieillissant à la tête du pays en 2006, avant d’en prendre les commandes de 2008 à 2018 tout en assumant aussi le poste clef de premier secrétaire du Parti communiste, et ce de 2008 à 2021, déjà largement octogénaire.
Sous Raúl Castro, Cuba, davantage ouverte au tourisme, connut une « libéralisation » très encadrée, avec davantage de droits de déplacement, patrimoniaux, entrepreneuriaux pour les Cubains, mais cela n’a jamais fait de l’île un pays libre. La démarche n’est d’ailleurs pas étrangère aux dictatures communistes : Lénine lui-même donna le premier exemple historique de cette adaptation forcée ou tactique aux circonstances avec sa Nouvelle Economie Politique peu après la victoire de la Révolution bolchevique.
Voilà donc l’homme que Medvedev a salué, en insistant sur la reconnaissance russe de la validité et de l’exemple de la révolution cubaine, que tant de Cubains ont fuie au péril de leur vie…
Medvedev, mais aussi Poutine, puisque ce dernier a fait adresser un message de bon anniversaire à Raúl Castro par le biais du coup de téléphone de son ancien Premier ministre.
Raúl Castro attend la victoire russe en Ukraine, dit-il à Medvedev
A cette occasion, Medvedev a remercié l’ancien guérillero pour le soutien actuel de Cuba à la Russie face aux sanctions prononcées à la suite de son invasion de l’Ukraine, ou plutôt, comme le dit le communiqué du cabinet du responsable russe, « le soutien de La Havane à Moscou dans la guerre hybride déclenchée par l’Occident ».
Le communiqué cité par l’agence Tass poursuit : « Lors de leur conversation téléphonique, M. Medvedev a déclaré que la dynamique du dialogue russo-cubain reflétait un travail considérable visant à forger des liens multiformes qui seront renforcés à l’avenir. Le vice-président du Conseil de sécurité de la Russie a ajouté que Moscou appréciait le soutien que le peuple ami de la république apportait à notre pays dans sa confrontation avec l’Occident collectif, dans le sillage de la guerre hybride déclenchée par les États-Unis et l’OTAN contre la Russie. »
Castro s’est pour sa part dit « confiant » de voir la Russie victorieuse à l’issue de ce conflit.
Medvedev parle à Castro alors que les liens entre Moscou et La Havane se resserrent
Les liens se resserrent actuellement entre la Russie et Cuba ; Sergueï Lavrov, le chef de la diplomatie russe, s’y est rendu au printemps, et depuis lors les signatures d’accords se multiplient, que ce soit dans le domaine académique – avec notamment les techniques informatiques de pointe – ou judiciaire et policier.
Il n’y a décidément pas d’ombre au tableau, alors même que Cuba soutient largement les « droits LGBT » dont Poutine prétend vouloir libérer l’Occident. L’une des filles de Raúl, Mariela, est une sexologue et activiste LGBT parfaitement reconnue dans son pays, qui a naguère pris la tête d’un « défilé contre l’homophobie » autorisée par le pouvoir. Cuba autorise les opérations de changement de sexe depuis 2008 et le « mariage gay » ainsi que la « gestation pour autrui » depuis 2022, sans encourir les foudres du grand frère russe. Il est vrai que la « GPA » est autorisée en Russie depuis trente ans…