Le secrétaire d’Etat américain John Kerry a révélé mercredi que la Russie avait proposé aux Etats-Unis d’avoir des discussions militaires sur l’actuelle guerre en Syrie. Mais il s’en faut encore de beaucoup que l’on parvienne à un accord américano-russe.
La proposition russe est manifestement une réponse à l’inquiétude manifestée par les Américains devant la montée en puissance militaire russe en Syrie. Aéroport, chars, sous-marin : Moscou a effectivement intensifié sa présence matérielle depuis que le président syrien Assad a avoué une certaine faiblesse en ce domaine, et un épuisement de son armée.
Proposition russe pour un accord militaire en Syrie
Or, pour les Américains, et John Kerry n’a pas hésité à le dire à son homologue russe Sergueï Lavrov, cet appui militaire risque d’intensifier le conflit dans ce pays du Moyen-Orient et de « saper notre objectif commun de lutte contre l’extrémisme ».
Vladimir Poutine n’a guère eu de mal à retourner l’argument. En observant d’abord qu’aucun règlement de la question djihadiste ne pourrait se faire sans Damas qui se trouve être, de fait, le premier adversaire de l’Etat islamique.
En notant ensuite que ce sont bien les exactions des djihadistes, et non Bachar el-Assad, qui font fuir les Syriens. Et qu’un règlement équilibré de la question sur place permettrait aussi de régler la crise migratoire actuelle à laquelle l’Europe, notamment, fait face. Pas seulement, puisque, le président russe l’a bien compris, ces déplacements de population sont l’occasion rêvée pour le califat d’étendre son emprise dans un nombre grandissant de pays.
Le fait est que, derrière les beaux discours, les questions de paix, de déséquilibre régional et de crise migratoire ne sont pas les soucis principaux des Etats-Unis.
L’entente cordiale américano-russe ne semble pas être pour demain…
L’inquiétude première de Washington est de voir Moscou prendre une place géopolitique prédominante dans ce secteur du Proche-Orient. La politique étrangère de la Maison Blanche est en effet largement fondée, on le sait, sur la volonté d’étendre l’influence américaine à toute extrémité de la terre.
A cela s’ajoute une difficulté intérieure. Le président Obama est actuellement en conflit avec la majorité républicaine du Congrès sur son projet de parvenir définitivement à un accord sur le nucléaire iranien, dossier dans lequel la Russie est très largement impliquée. Si, en outre, le Pentagone acceptait d’entendre les arguments russes sur la guerre en Syrie, nul doute que, entre le Capitole et la Maison-Blanche, il y aurait des étincelles !
A côté de ces préoccupations politico-stratégiques, l’Etat islamique, la guerre et la crise migratoire sont indubitablement, pour les Américains, des dégâts collatéraux.