Affluence historique et visibilité maximum du pèlerinage de Chartres 2024 : Notre Dame de Chrétienté accueille 18.000 marcheurs

affluence historique pèlerinage Chartres
La messe de clôture a été célébrée par le cardinal
Gerhard Ludwig Müller (© Olivier Figueras)


Dieu attire. Il attire les jeunes qui sont soif de sacré, qui ont trouvé un sens à leur vie ou qui le cherchent. Plus de 18.000 personnes – moyenne d’âge 23 ans – ont participé au long du week-end de la Pentecôte au pèlerinage de Chrétienté qui pour la 42e fois, reliait Paris à Chartres par une route longue et éprouvante, cette « métaphore de la vie », qui s’achevait au pied de la cathédrale, joyau de l’architecture gothique, fruit majestueux de la civilisation chrétienne, sur un avant-goût du ciel. Jamais l’événement n’aura été aussi visiblement missionnaire : devant l’affluence historique, plusieurs médias nationaux se sont mobilisés, offrant à la France entière les image de ces milliers de jeunes au rebours du relativisme et de l’hédonisme.

Pendant ce temps, plus de 6.000 personnes étaient sur les routes de Chartres à Paris pour le pèlerinage de Tradition avec la Fraternité Saint-Pie X, sur le thème « Chercher Dieu avec saint Thomas d’Aquin ».

Notre-Dame de Chrétienté a accueilli des pèlerins plus nombreux que jamais – si nombreux qu’il a fallu clore les inscriptions près d’un mois avant la Pentecôte, du jamais vu – alors même que le thème du pèlerinage était plus âpre qu’à l’accoutumée. « Les fins dernières » : c’est la réflexion, grave, sur le sort qui attend chacun : mort, jugement, paradis… ou enfer. La grâce de la rédemption est offerte, au chrétien d’y répondre et d’y conformer sa vie. Pour l’aumônier général de Notre Dame de Chrétienté, l’abbé Jean de Massia, « l’abandon, depuis les années 1960, de la prédication sur les fins dernières est incontestablement l’un des symptômes majeurs de la crise de la Foi ». « Il s’agit donc de revenir à la mission de l’Evangile : enseigner Jésus-Christ, et tout Jésus-Christ. C’est la plus grande des charités. Parler des fins dernières c’est pratiquer une pastorale de la vérité », explique-t-il sur le site internet du pèlerinage. Voilà pourquoi tout cela était associé à ce cri de sainte Thérèse d’Avila encore enfant : « Je veux voir Dieu ! »

 

La pèlerinage de Chartres 2024 a explosé les compteurs

C’est encore l’abbé de Massia qui, lors du mot d’envoi et de clôture de cette marche de plus de 100 kilomètres, a rappelé sa dimension expiatoire : « Ne fuis pas la pénitence, la douleur physique, elle est ce cadeau de la route qui libère le corps, purifie l’esprit, et surtout expie les péchés. Ceux qui sont venus pour passer trois jours agréables pour le corps se sont trompés de porte ! Car il faut le redire, c’est avant tout parce que nous sommes des pécheurs que nous faisons des pèlerinages. Qu’importe la pluie et le froid, nous aurons cette année un pèlerinage sur mesure préparé par Dieu pour la conversion de nos âmes, et s’il est plus ardu que l’année dernière, il n’en sera que plus fructueux. »

Avant de prendre la route, portant fièrement des centaines de bannières de chrétienté claquant au vent, les pèlerins réunis au petit matin à Saint-Sulpice samedi ont aussi entendu ces mots : « Ami pèlerin, le but de ce thème n’est pas de nous glacer d’effroi devant les tourments, réels, de l’Enfer ; même si cette crainte peut-être, pour beaucoup d’entre nous, le début d’une vraie sagesse. Non, l’objectif, c’est de repartir lundi de Chartres avec l’envie furieuse d’être des saints, et la soif de communiquer aux hommes et aux femmes de ce monde sans espérance ce feu de la Pentecôte qui nous anime. Car toutes les acrobaties théologiques modernes ne pourraient supprimer la force et la vérité simple et claire de la dernière parole du Christ, que nous avons entendu le jour de l’Ascension : “Allez dans le monde entier, et prêchez l’évangile à toute créature. Celui qui croira et qui sera baptisé, sera sauvé ; mais celui qui ne croira pas sera condamné.” »

Ce langage-là, les nombreux jeunes qui ne sont pas des habitués des liturgies ni des homélies traditionnelles, et qui les découvrent sur les routes de Chartres, ne l’entendent guère au cours de l’année – comme en témoignent d’ailleurs les mots moins vigoureux qui leur ont été adressés par les clercs qui ne sont pas de cette « famille », de cette « demeure »-là.

 

La Chrétienté est en pèlerinage vers le Ciel

Au terme de leur marche, qui s’est achevée comme il se doit par le saint sacrifice de la messe, le « festin des noces de l’Agneau », l’abbé de Massia les a de nouveau interpellés, ces milliers de jeunes et moins jeunes qui vont devoir rester pèlerins du ciel dans la vie de tous les jours : « Accepte de recevoir, de monter tel un enfant sur les épaules des anciens pour te laisser enseigner, pour être un maillon de cette chaîne ininterrompue de témoins ardents qui, depuis Jésus-Christ, reçoivent fidèlement puis répètent intégralement aux générations suivantes la même vérité qui sauve, enseignent le catéchisme aux enfants, leur font aimer le Ciel mais aussi craindre l’Enfer, rayonnent autour d’eux et témoignent du fait que tout cela est vrai, que ce ne sont pas des fables, que c’est du réel et le plus essentiel qui soit, puisqu’il s’agit du salut éternel… Oui, depuis la Pentecôte le Christ suscite des témoins ardents, pour que les vérités de l’Evangile ne tombent pas dans l’oubli, pour que les hommes sachent quelle est la splendeur de la destinée que Dieu a préparé à ceux qu’il aime parce que oui, il les aime et a payé de sa vie cet amour ; mais aussi des témoins courageux qui osent dire à la face de l’athéisme contemporain que la vie comporte un risque réel, que ces deux chemins du tympan du porche sud existent vraiment, que le péché est grave et peut mener à l’Enfer, et qu’il y a aujourd’hui des crimes qui se déguisent en bien et dont l’injure crie vers le Ciel ; et que Dieu, à la fin, jugera, récompensera les bons et châtiera les méchants impénitents qui auront résisté jusqu’au bout à son amour. “Telle est la vérité, le reste est imposture.” »

Pour les avoir vus arrivant à Chartres, fatigués mais dans la joie de l’effort choisi, accepté, accompli, souriants et malgré tout pleins d’énergie, je peux dire que ces leçons de vérité ne les ont pas traumatisés. Ils ont rechargé leurs batteries en mettant Dieu au centre, et comme toujours, interrogés sur leur attachement à la messe traditionnelle ou sa découverte, ils se sont émerveillés de sa transcendance, de son caractère sacré.

 

Gaspard Proust et la messe traditionnelle du pèlerinage de Chartres

Même l’humoriste Gaspard Proust a réussi à le glisser au cours de sa séquence de ce mardi matin sur Europe 1, sérieux avec légèreté : lui qui a expliqué avoir assisté à la messe du samedi matin à Saint-Sulpice a brocardé les « deux, trois progressistes » qui parlent de la messe « dos au peuple », « pas très sympathique pour les fidèles ». « Il y avait une messe tradie en latin, c’était extraordinaire… Tu as envie de répondre : “Mais ce n’est pas parce qu’il tourne le dos aux fidèles, espèce de débile, au contraire, il est aligné avec les fidèles, ils regardent tous dans la même direction !” »

Pour que la matinale d’Europe 1 attire ainsi l’attention des auditeurs sur la beauté de la messe traditionnelle, il faut vraiment qu’il se passe quelque chose. Pour que CNews, BFM emboîtent le pas pour faire des reportages justes, sympathiques, respectueux sur les pèlerins de Chartres, c’est qu’un petit miracle s’est produit. Le nombre des pèlerins de 2023 a attiré l’attention des médias jusque-là quasiment aveugles au pèlerinage ; l’édition 2024 a permis de transformer l’essai.

Le moment le plus fort de cette attention médiatique aura été la messe du dimanche diffusée en direct par CNews et visible ici, avec les commentaires avisés d’Aymeric Pourbaix de France catholique et les explications doctrinales et liturgiques de l’abbé de Massia au sujet de la célébration de la messe de la Pentecôte en rite dominicain par le P. Augustin Aubry de la Fraternité Saint-Vincent-Ferrier. Depuis combien d’années les téléspectateurs n’avaient-ils pas vu une messe traditionnelle ? L’audimat fut bon : l’émission a rassemblé des centaines de milliers de personnes, fidèles ou simples curieux, CNews étant à cette heure-là la deuxième plus regardée des chaînes d’information. D’emblée, le P. Aubry a rappelé que la messe est « le renouvellement du sacrifice de la Croix ». Sermon exigeant et exaltant, ne cachant rien du « feu éternel » et de l’effet du péché qui « piétine le mystère, annule le désir, chasse l’Esprit Saint reçu au baptême »… « Si ta vie est pour les créatures, alors ton éternité sera sans le Créateur !… Pèlerin de Chartres, sois digne de ta destinée ! »

 

En 2024 comme toujours, la chrétienté passe par la conversion

Oui, cette dignité ne va pas de soi, et les 18.000 pèlerins l’ont entendu mais pas eux seulement, puisque le message a pu entrer dans des milliers de foyers, porté par leur enthousiasme et leur gravité, et par leur joie. D’ailleurs l’invocation propre au pèlerinage qui interpelle « Notre Dame de la Sainte Espérance » résume tout cela dans la suite de l’invocation : « Convertissez-nous ! »

Cette visibilité du pèlerinage est aussi passée par les personnalités qui y ont pris part, souvent en marchant les 100 kilomètres : le duc d’Anjou, dont la présence était spécialement saluée en la cathédrale de Chartres lors de l’allocution du président de Notre-Dame de Chrétienté, Jean de Tauriers… Mais aussi Marion Maréchal Le Pen ; mais aussi Candace Owens, célèbre commentatrice politique américaine qui vient de recevoir le baptême et qui a pèleriné dans le chapitre des Américains dirigé par Michael Matt, en compagnie de plus de 100 personnes ayant fait tout exprès le voyage transatlantique.

La messe de clôture a été célébrée selon le rite traditionnel, « seule messe du pèlerinage », par le cardinal Gerhard Ludwig Müller, ancien préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi. Au cours de son homélie, rappelant que l’Eglise du Christ a toujours été persécutée et qu’« aujourd’hui encore, les chrétiens sont la communauté religieuse la plus persécutée de l’histoire de l’humanité », le cardinal a proclamé : « La déchristianisation de l’Europe est le programme actuel de ceux qui veulent lui voler son âme et en faire la victime de leur athéisme post-humaniste. »

Il ajoutait, pour conclure : « Souvent, l’Eglise du Christ n’est qu’un petit troupeau, une minorité persécutée et méconnue. Mais en réalité, en Jésus-Christ, elle est le sel de la terre, la lumière du monde, l’avant-garde de toute l’humanité en chemin vers son but. Et cela ne doit pas être confondu avec toutes les expériences horriblement ratées d’un paradis fabriqué par l’homme. Le but de l’histoire est “un ciel nouveau, une terre nouvelle – la Cité sainte, la Jérusalem nouvelle, qui descend du ciel sur la terre” (Ap 21, 1s). Le bien-être temporel et le salut éternel viennent en effet de Dieu, qui par sa grâce nous a sauvés de la puissance destructrice du mal. Dieu nous a appelés dans l’Esprit Saint, et nous a rendus capables de collaborer à l’édification du royaume de justice, d’amour et de paix. » Et de faire chanter toute la cathédrale – où il n’y avait de place que pour les enfants, tous les autres étaient dehors – qui a résonné de ces mots : « Christus vincit, Christus regnat, Christus imperat ! »

Toute l’humanité n’atteint pas le but, hélas, telle fut la leçon rappelée à Chartres cette année. L’an prochain, les pèlerins seront invités à méditer sur le Christ-Roi : « Pour qu’il règne, sur la terre comme au Ciel ! »

 

Jeanne Smits