Al Qaïda quasiment réduite à néant par l’Etat islamique (DAESH) : la colère d’une de ses têtes pensantes, Abu Muhammad al-Maqdisi

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L’organisation Al Qaïda serait-elle exsangue, réduite dans certains endroits à vendre ses véhicules et son matériel informatique pour joindre les deux bouts ? C’est ce qu’affirme The Guardian de Londres – c’est l’Etat islamique (DAESH) qui l’aurait quasiment réduite à néant en doublant le grand frère dans la course au soutien et au financement. Il y en a un qui ne décolère pas : Abu Muhammad al-Maqdisi, l’une des figures et peut-être même la principale tête pensante d’Al-Qaïda, si radical que même Oussama Ben Laden l’avait taxé d’extrémisme. Le torchon brûle entre les deux entités islamistes rivales.
 

Al Qaïda « à l’hôpital réduit » ?

 
La montée fulgurante de l’Etat islamique aurait provoqué l’effondrement de ce qu’on peut appeler la « discipline de parti » au sein d’Al-Qaïda, à quoi s’ajoute la désaffection de ses soutiens traditionnels. La mise en place effective d’un califat et une propagande parfaitement maîtrisée ont donné l’avantage à DAESH qui attire désormais davantage de dons et de sympathie, détournant les anciens proches d’Al Qaïda en affichant des attentats spectaculaires, un vrai projet et des magazines luxueux pour se mettre en valeur. A tel point qu’un djihadiste « vétéran », Munif Samara, a déclaré au Guardian qu’on n’est pas loin de la prise de pouvoir au sommet d’Al Qaïda par l’Etat islamique.
 

Al-Qaïda quasiment réduite à néant par l’Etat islamique : les succès de DAESH séduisent les militants islamistes

 
Pour Abu Muhammad al-Maqdisi, libéré de prison par les autorités jordaniennes en février dernier, c’est une trahison des idéaux d’Al Qaïda, et il se répand en accusations contre l’Etat islamique. Signe d’une guerre fratricide entre les deux entités islamistes ? Voire. Ce qu’il y a d’intéressant dans cette affaire, c’est de voir que l’Etat islamique est en train de marquer des points et de s’imposer jusque dans le monde musulman.
 
Assez peu connu en Occident, l’importance de Maqdasi dans l’islamisme radical reste inégalée. Dans les années 1980, ce Palestinien de 56 ans devint une figure de l’islamisme radical en déclarant notamment que la famille royale saoudienne était apostate. C’est lui qui estampillait certaines cibles du Jihad. De cette époque datent les critiques d’Oussama Ben Laden à l’égard du mentor trop islamiste – si cela était possible.
 
Aujourd’hui, Maqdisi compte le responsable d’Al Qaïda, Ayman al-Zawahiri, parmi ses très proches amis et tous les responsables régionaux de l’organisation terroriste le tiennent eu haute estime ; ses nombreux livres et textes continuent d’être lus par les militants islamistes à travers le monde… Cette aura ne suffit pas à les détourner de l’Etat islamique.
 

La colère de Abu Muhammad Al-Maqdisi, tête pensante d’Al-Qaïda, dépassé par l’Etat islamique

 
On peut dire que celui-ci lui échappe. Al-Maqdisi est celui qui a formé Abu Musab al-Zarqawi, fondateur de ce qui est devenu l’Etat islamique en Irak et au Levant (ISIS). Les deux hommes s’étaient rencontrés en prison, enfermés pour terrorisme, dans les années 1990.
 
Zarqawi était relâché en 1999 : il avait alors prêté allégeance à Al-Qaïda avant de devenir l’une des figures les plus importantes de l’Iraq d’après-guerre. Mais il a fait preuve d’une telle brutalité et d’un tel sectarisme dans la terreur que son maître Maqdisi, l’« extrémiste » de naguère s’est désormais lancé dans une critique publique et incessante de son meilleur élève qui va encore plus loin dans l’horreur.
 
Très peu de temps après la proclamation du califat par Abu Bakr al-Baghdadi, al-Maqdisi a publié une tribune violente dans laquelle il accusait l’Etat islamique d’ignorance et d’être mal guidé, lui reprochant surtout de subvertir le « projet islamique » sur lequel il a travaillé pendant tant d’années… Sa tribune, pas plus que ses critiques renouvelées à l’égard de DAESH, n’a pas eu le moindre effet.
 

Béatrice Romée