Le président de la plus grande caisse de soins de santé de Belgique, Christelijke Mutualiteit (CM), a publiquement préconisé une solution radicale au problème du vieillissement de la population : l’euthanasie. Luc Van Gorp a déclaré aux médias belges, début avril, que les personnes fatiguées de vivre devraient être autorisées à y avoir recours.
A l’exception de l’Afrique subsaharienne, le monde entier est confronté à une augmentation considérable du nombre de personnes âgées, et la Belgique ne fait pas exception. Les personnes âgées de plus de 80 ans y seront deux fois plus nombreuses d’ici à 2050, passant d’environ 640.000 aujourd’hui à 1,2 million dans moins de trente ans. La pression financière sur les soins de santé, les médicaments et les maisons de repos s’accentuera en proportion, alors que les retraites pèseront elles aussi plus lourdement sur les budgets.
Le vieillissement de la population pour promouvoir l’euthanasie
Quel que soit le montant investi, il sera toujours insuffisant, selon Van Gorp, pour qui l’idée d’injecter davantage d’argent n’est pas la bonne solution. « Il n’y a tout simplement pas assez de travailleurs de la santé pour faire le travail », a-t-il déclaré : « Avons-nous vraiment besoin de tous ces centres de soins résidentiels supplémentaires ? Construire des chambres sans rien faire pour remédier à la pénurie de personnel n’est pas un modèle durable. La question du pourquoi des soins aux personnes âgées est absente. Pourquoi agissons-nous comme nous le faisons aujourd’hui ? Le plus souvent, il n’y a pas de réponse à cette question. »
Il préconise « une approche radicalement différente » : il ne s’agit pas de se demander « combien de temps puis-je vivre ? », mais « combien de temps puis-je bénéficier d’une vie de qualité ? » Il propose ni plus ni moins d’élargir l’accès à l’euthanasie aux personnes qui estiment que leur vie est achevée. Et ne parle pas de suicide : « Le suicide est un terme trop négatif », a déclaré M. Van Gorp. « Je préférerais parler de “rendre sa vie”. Je sais que le sujet est sensible, mais nous devons vraiment oser avoir ce débat. »
Il ne s’agit pas de rendre son âme à Dieu, vous l’aurez compris, mais de devancer son appel en mettant la pression sociale sur les anciens pour des motifs mercantiles… Et pour faire progresser la culture de mort, qui recherche cette dernière dans une démarche de haine de l’humain.
Aux Pays-Bas, il y a près de dix ans, un médecin sur cinq envisageait déjà ce type d’euthanasie…
En Belgique, on n’a ni les fonds ni le personnel de santé pour s’occuper des vieux
Dans une interview accordée au Nieuwsblad, Luc Van Gorp a déclaré :
« Tout le monde souhaite voir ses parents et ses grands-parents rester en vie le plus longtemps possible, n’est-ce pas ? Mais ces personnes elles-mêmes souhaitent-elles cela ? Et que leur faut-il alors ? Ces questions sont trop peu posées. Certaines personnes de plus de 80 ans n’auront besoin de rien pour bien vieillir. Elles pourront même soutenir les autres, par exemple en leur tenant compagnie. D’autres ont besoin de beaucoup de soins et, soyons clairs, nous devons continuer à les leur prodiguer. Mais qu’en est-il de la catégorie des personnes âgées qui bénéficient d’un maximum de soins, mais qui n’ont toujours pas la qualité de vie qu’elles souhaiteraient avoir ? Cette question n’est pas assez souvent posée. »
L’appel de M. Van Gorp à faire de la « vie accomplie » une justification pour l’euthanasie a d’ores et déjà reçu le soutien de plusieurs hommes politiques. Sammy Mahdi, chef de file des démocrates-chrétiens, a toutefois critiqué le propos : « Si une personne est fatiguée de vivre et a le sentiment de gêner, ou si elle ne reçoit plus de visites, ne sommes-nous pas en train d’échouer en tant que société ? »
Belgique : vers un débat national déterminé d’avance
Van Gorp, quant à lui, a réitéré sa suggestion dans une tribune publiée dans le journal belge De Morgen, où il écrit : « La demande de soins ne fera qu’augmenter au cours des années à venir. Si nous continuons à agir comme nous le faisons aujourd’hui, nous allons au-devant d’un véritable krach des soins. Nous ne pourrons l’éviter que si nous choisissons une approche radicalement différente, celle d’une société saine qui privilégie la qualité de vie à la quantité. »
Et de préciser : « De nombreux prestataires de soins de santé ont indiqué depuis longtemps qu’il n’était pas possible de continuer à fonctionner comme nous le faisons aujourd’hui. Il n’y a tout simplement plus assez de professionnels pour fournir tous les soins. Et en tant que société, nous créons trop peu d’espace pour prendre soin de ceux qui nous sont les plus chers. » Il appelle à un débat national urgent sur la question : « Aussi délicat que cela puisse être, il nous faut oser ouvrir le débat sur la qualité de vie, y compris en fin de vie. Et plutôt aujourd’hui que demain. »
Tel qu’il en pose les termes, c’est un débat clos d’avance. La problématique n’est pas neuve ou inattendue : elle est simplement arrivée à la surface, dans une démarche calculée pour changer les mentalités.