La Chine et l’IA : deux des cibles du Bilderberg 2023

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Le luxueux hôtel Pestana Palace, à Lisbonne,
où s’est tenue la 69e conférence du groupe Bilderberg


La 69e conférence du groupe Bilderberg vient de prendre fin, le 21 mai, à Lisbonne, au Portugal. Trois jours de conférences et de rencontres entre « grands » de ce monde dans le luxueux hôtel Pestana Palace, dont, comme de coutume, rien n’est sorti dans les grands médias… De cette table-ronde archi-secrète 2023, il n’y a jamais, pour le grand public, de compte-rendu officiel ni officieux. Les participants, tous acteurs mondiaux haut placés, de la politique à la finance en passant par la technologie et les médias, sont tous tenus de respecter la règle de Chatham House, le code de la diplomatie britannique qui interdit de rendre publics les propos des invités.

Seuls quelques éléments rendus publics après l’événement permettent d’en connaître les protagonistes et les thèmes discutés. Parmi ces derniers, l’IA et la Chine, thèmes d’actualité et de préoccupation majeurs, eurent une place importante. Il faut garder à l’esprit que Bilderberg n’est pas qu’un réseautage d’élite, c’est un puissant vecteur de mise en place des volontés mondialistes.

 

Bilderberg 2023 : sans doute le dernier pour Kissinger

Comme le note The New American, un bref communiqué de presse a annoncé qu’un groupe diversifié de 130 participants de 23 pays avaient confirmé leur présence. Diversifié ? Pas tant que ça. De semblables intérêts rassemblent l’immense majorité et ceux que le réseau ou l’ambition y avaient davantage attirés sont mis sur les mêmes rails. The Great Reset n’est pas un mythe, mais un objectif assumé du Forum économique mondial de Davos : c’est aussi celui de ce « mini-Davos », tel qu’on a souvent qualifié la réunion du Bilderberg. Les participants sont souvent d’ailleurs les mêmes.

Ce sont des lieux de sélection pour des postes-clés d’influence mondiale. Comme le rappelait Etienne Davignon, avant-dernier président du Bilderberg, « pour y être coopté, il ne suffit pas d’être patron de Coca-Cola : il faut avoir de l’entregent et une vision planétaire ». Traduisez, mondialiste.

Le doyen de cette assemblée ? L’ancien secrétaire d’État Henry Kissinger, qui participe à ces événements depuis 1957 (également membre du comité directeur du groupe pendant de nombreuses années). Il doit fêter ses 100 ans dans deux jours – c’est dire son engagement à tout crin. Le milliardaire David Rockefeller, un des créateurs du groupe et président-fondateur de la Commission trilatérale, décédé en 2017 à l’âge de 101 ans, n’a pas mieux fait. Malgré les ans, les mondialistes ont la dent dure.

 

Des participants triés sur le volet

Si le comité est toujours dominé par une présence américaine majoritaire, les invités sont issus de toute l’Europe, en plus de l’outre-Atlantique (jamais de personnalités russes, chinoises, indiennes ou africaines). On y retrouve trois Premiers ministres, le président du Parlement européen, le président de l’Eurogroupe, le vice-président de la Commission européenne, un certain nombre de ministres et de commissaires européens… Mais aussi les patrons des grandes compagnies, notamment dans le domaine des nouvelles technologies, ceux d’OpenAI, de Microsoft, de Google-Alphabet.

Le pétrole n’est jamais oublié à Bilderberg : les chefs de Total, BP et Galp sont à la table. Ainsi que les grandes sociétés pharmaceutiques avec les chefs de Merck et Pfizer et un directeur d’AstraZeneca sur la liste (même pas peur des casseroles).

Les Français furent cette année au nombre de 10, dont évidemment Henri de Castries, président de l’Institut Montaigne (et président du comité de direction du groupe Bilderberg depuis 2012). Les deux ministres Gabriel Attal et Clément Beaune ont accouru en jeunes premiers, soignant sûrement leurs interventions pour, qui sait, une promotion à la Mairie de Paris en 2026. Notons également la présence de Bernard Emié, patron de la DGSE, Edouard Philippe, maire du Havre et ancien Premier ministre et encore Patricia Barbizet, ancienne présidente du Siècle.

 

Un programme à la mesure de leurs ambitions : l’IA en tête ?

L’IA, qui prend une place croissante dans les enjeux socio-industriels et les moyens de contrôle à disposition des Etats, figure comme l’un des thèmes centraux de cette réunion 2023. Remarquons que de nombreux dirigeants de l’administration Biden qui assistaient à Bilderberg, comme Avril Haines, directrice du renseignement national, ou Tarun Chhabra, directeur principal de la technologie et de la sécurité nationale collaborent déjà, de manière ouverte ou non, avec les grands leaders des industries de l’IA.

The New American rappelle à juste titre le discours d’entrée de Klaus Schwab lors du Sommet mondial des gouvernements 2023 qui s’est tenu à Dubai en février dernier, sur la révolution qu’induit l’introduction de l’IA : « Je suis d’accord : l’intelligence artificielle, et pas seulement l’intelligence artificielle, mais aussi le métavers, les nouvelles technologies spatiales, la biologie synthétique, et je pourrais continuer encore et encore… Notre vie dans dix ans sera complètement différente, très affectée. Et, qui maîtrise ces technologies, d’une certaine manière, sera le maître du monde. »

Cela suffit pour engendrer tensions et fascinations. L’ancien PDG de Google, Eric Schmidt, a encore alerté hier, mercredi, lors du sommet du Conseil des PDG organisé par le Wall Street Journal, sur la dangerosité de l’IA. Mais les enjeux sont bien trop grands – à tous niveaux.

 

La Chine communiste, modèle mondialiste ?

Y compris au niveau géopolitique, quand la Chine est l’objet de tous les regards. Du programme affiché par le Bilderberg, nous retrouvons une large gamme de sujets géopolitiques dont l’Ukraine et la Russie font évidemment partie, mais aussi l’OTAN, le leadership américain, l’Inde et, de fait, la Chine. Cette Chine envers laquelle les Américains, en particulier, affichent une distance savamment calculée. Si l’establishment américain ne crie pas ardemment son approbation du Parti communiste chinois, les conseillers de Biden, tels Elizabeth Economy (son vrai nom !), lui tendent pour autant largement la main, que ce soit dans les secteurs du commerce, de l’énergie, les transferts de technologie, l’investissement en capital ou encore l’espionnage… Le Nouvel Ordre Mondial n’y est pas forcément opposé (d’autant que ce sont les groupes mondialistes qui ont permis à la Chine de devenir acteur de premier plan dans l’économie mondiale dès le début des années 1980 – après avoir créé Mao Tse Toung).

Quant à l’argent… pour le journaliste du New American, c’est une certitude : « En ce qui concerne les sujets du “système bancaire” et des “défis budgétaires”, nous pouvons être assez certains, sur la base de la propagande croissante des diverses organisations mondialistes et de leurs groupes de réflexion alliés, ainsi que des récentes mesures concrètes des banques centrales et des gouvernements, que les élites de Bilderberg ont discuté des moyens et des délais de mise en œuvre des monnaies numériques des banques centrales et de l’interdiction concomitante des crypto-monnaies échappant à leur contrôle. »

Toujours plus de contrôle.

 

Clémentine Jallais