Au cours des mois qui ont précédé le référendum britannique sur la sortie de l’Union européenne, les prédictions catastrophistes se sont succédé, laissant croire que si le Brexit n’allait peut-être pas provoquer l’Apocalypse – qui au moins aurait englouti tout le monde – il allait en revanche appauvrir le pays, l’achever en tant que puissance financière et rimer avec une série d’horreurs que le Royaume-Uni ne saurait éviter qu’en restant indissolublement lié à Bruxelles. Un nouveau rapport universitaire vient de passer au crible les annonces faites par le Trésor, tout particulièrement : George Osborne n’était-il pas en tant que chancelier de l’Echiquier et fervent partisan de l’Europe sans cesse sur le pont pour participer à l’alarmisme généralisé ?
L’étude émane du Centre for Business Research de l’université de Cambridge et elle n’hésite pas à annoncer au contraire des retombées très positives du Brexit au terme de projections selon les différents scénarios possibles de la sortie de l’UE. Le Royaume-Uni devrait s’en sortir avec une chute importante de l’immigration nette – ce que souhaitaient précisément les partisans du « Leave » – mais aussi avec une remontée des salaires des travailleurs britanniques et même une diminution de la tension dans le domaine du logement.
Le Trésor britannique s’est livré à l’alarmisme à propos du Brexit
C’est tout le contraire de ce qui était annoncé par George Osborne et par les techniciens du Trésor : il n’y aurait plus de subventions pour la recherche, les universités, les infrastructures, les paysans… On n’allait pas pouvoir maintenir une livre forte (à supposer que cela soit désirable), les banques allaient quitter le pays, l’instabilité allait régner. S’il y a eu en effet des inquiétudes après le résultat du référendum, comme le notait un analyste cet été, elles ont été au moins partiellement alimentées par le « Project Fear » (« Projet Peur ») brandi partout au nom des pouvoirs publics avant le vote.
Selon les universitaires de Cambridge, les contrôles de l’immigration promis par l’Union européenne permettraient au mieux de faire chuter la migration nette à environ 165.000 personnes par an à partir de 2020, soit moitié moins qu’aujourd’hui, alors que le gouvernement britannique aimerait faire descendre ce chiffre à moins de 100.000, et qu’il peut seulement le faire avec une souveraineté retrouvée.
Le Trésor s’est aussi fourvoyé en annonçant des calamités dans le cadre des négociations en vue du Brexit. Selon le rapport, « il n’y a probablement que deux options réalisables : ou bien un accord de libre-échange sur le modèle de celui que vient de signer le Canada, ont bien une absence d’accord ce qui fait revenir aux règles de l’OMC ». « Les répercussions de ces deux options sont assez incertaines. Nous avons regardé de très près ce que le Trésor a pu en dire et son travail s’est révélé très défectueux et très partisan », notent les auteurs.
Les prévisions du Trésor sur la sortie de l’UE étaient « partisanes »
Leur analyse les a conduits au contraire à prévoir des augmentations de revenus moyens de plus de 2 % par an en raison de la baisse du niveau de l’immigration – chose à méditer dans tous les pays où l’immigration est présentée comme une « chance ». Cela ira de pair avec une remontée du taux d’emploi qu’ils relient notamment à la baisse de la migration nette à partir de 2019.
Ils voient dans la baisse du prix du logement une bonne nouvelle pour les personnes ayant des revenus modestes, tandis que la remontée de l’inflation, qui pourrait atteindre aux environs de 3 % vers la fin de 2017, ne les inquiète pas spécialement même si cela fait plusieurs années qu’on ne connaissait plus de telles valeurs : « La grande question est de savoir si l’inflation va devenir incontrôlable – nous ne pensons pas que ce sera le cas. »
Un rapport universitaire sur le Brexit annonce une baisse de l’immigration et une montée du taux d’emploi
Les chercheurs sont particulièrement critiques à l’égard des prédictions du Trésor à propos des négociations d’accords de libre-échange. Ils ont choisi quant à eux de fonder leurs prévisions à long terme sur une période beaucoup plus importante, comprenant les années où le Royaume-Uni ne faisait pas encore partie de l’Union européenne. Ils prévoient certes un recul des exportations mais celui-ci devrait atteindre tout au plus la moitié de ce qui était annoncé par le Trésor.
Y a-t-il une baisse des investissements ? Oui, confirme l’analyse de Cambridge, mais elle est avant tout imputable à l’incertitude autour des négociations du Brexit ; « Elle diminuera dès 2019 une fois que le Royaume-Uni aura quitté l’Union européenne », annoncent les auteurs.
Reste que l’accord qui aura été négocié devra être approuvé par une majorité qualifiée des Etats de l’Union européenne et que le parlement européen pourra y opposer son veto. En fait d’incertitudes, celle-là est décidément majeure.