Mardi avaient lieu à Varsovie les dernières commémorations mensuelles 8 ans après la catastrophe de Smolensk dans laquelle le président polonais Lech Kaczyński avait perdu la vie, au matin du samedi 10 avril 2010, avec son épouse et 94 autres personnes, dont tout le haut-commandement militaire polonais. Un monument à la mémoire de ces 96 victimes de la catastrophe a pour l’occasion été inauguré sur la grande place Maréchal Piłsudski où se trouve également la tombe du soldat inconnu, non loin du palais présidentiel et de la vieille ville. Le lendemain de ces dernières commémorations mensuelles, la commission d’enquête dirigée par l’ancien ministre de la Défense Antoni Macierewicz présentait son rapport « technique » : un document encore provisoire dans lequel est confirmée la thèse avancée il y a déjà un an de l’explosion, ou plutôt des explosions survenues à bord du Tupolev Tu-154 gouvernemental polonais avant l’impact avec le sol.
Il a fallu huit ans pour obtenir l’érection à Varsovie d’un monument digne de ce nom à la mémoire des victimes de la catastrophe de Smolensk
L’érection d’un monument digne de ce nom était l’une des deux grandes revendications de ces commémorations mensuelles qui se déroulaient tous les 10 du mois, avec une messe suivie d’une procession jusqu’au palais présidentiel en présence de Jarosław Kaczyński, le chef du parti social-conservateur Droit et Justice (PiS) et frère jumeau du président défunt. Le monument présente un escalier d’avion noir avec les noms des 96 victimes. À l’avenir, il sera relié à une statue de Lech Kaczyński par des pavés de trottoir rouges formant comme un tapis déroulé au sol.
Une croix, qui avait été dressée devant le palais présidentiel par des scouts juste après la catastrophe, et qui avait donné lieu à un conflit sans doute sciemment envenimé par les autorités de l’époque, sera intégrée dans l’ensemble. La mairie de Varsovie aux mains du parti libéral Plateforme civique (PO) des amis de Donald Tusk, avait tout fait pour empêcher l’érection de ce monument, et certains à la PO ont même promis de le démanteler le jour où ils reviendront au pouvoir. Depuis l’été dernier, les commémorations mensuelles de la catastrophe de Smolensk se faisaient avec une forte présence policière et derrière des barrières de sécurité en raison de l’agressivité de groupes de contre-manifestants constitués d’opposants aux PiS. La question de l’érection à Varsovie d’un monument à la mémoire des victimes de la catastrophe de Smolensk était donc malheureusement devenue hautement politique.
Le rapport provisoire produit par la contre-enquête du gouvernement du PiS confirme la thèse de l’explosion
Quant au rapport présenté mercredi, il répond dans une certaine mesure à la deuxième grande revendication de ces commémorations : que la clarté soit faite sur le déroulement de cette catastrophe. La thèse des explosions est donc maintenue par la commission d’enquête et le rapport d’enquête du gouvernement de Donald Tusk est invalidé du fait des mensonges qu’il contient, même si le mot « attentat » ne figure pas dans le nouveau rapport et n’a pas été prononcé par Antoni Macierewicz ou les autres membres de la commission présents mercredi. Du reste, la contre-enquête dure encore puisque les exhumations ne sont toujours pas terminées : il reste 6 corps à exhumer, ce qui permet au passage de remettre les dépouilles ou fragments de dépouilles dans les bons cercueils, ce qui n’avait pas été fait correctement en Russie.
96 morts et 96 commémorations mensuelles
Les commémorations du 10 avril 2010 étaient en outre les quatre-vingt-seizièmes. Il y a donc eu 96 commémorations mensuelles comme il y avait eu 96 morts dans cette catastrophe dont ont ne sait encore s’il faut l’appeler accident ou attentat. Peut-être ne le saura-t-on d’ailleurs jamais, les vérifications élémentaires n’ayant pas été réalisées par les enquêteurs polonais immédiatement après la catastrophe et la Russie refusant toujours de restituer l’épave et les boîtes noires. Toutefois, si cela avait été simplement un accident, on se serait plutôt attendu à une enquête commune russo-polonaise complète et transparente, de préférence avec la participation d’enquêteurs internationaux.