“Charlie” : Taubira veut renforcer les sanctions contre le racisme et l’antisémitisme pour combattre le terrorisme

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Le garde des Sceaux ne manque pas de toupet. Lors d’une réunion – de crise ? – avec les magistrats du parquet antiterroriste de Paris et les 167 « référents antiterroristes » des parquets à l’Ecole nationale de la magistrature, Christiane Taubira a proposé qu’on ne s’oriente pas vers une loi contre le terrorisme, bien suffisante à son avis. Même après l’attentat contre Charlie Hebdo et celui, moins médiatisé, contre l’Hypercasher de Vincennes. Non ; Mme le ministre veut renforcer la répression du racisme et de l’antisémitisme. Elle qui dit vouloir éviter au maximum les peines de prison, et qui a pris des mesures en ce sens, est partisane de sanctions accrues pour les « délits de presse » que sont l’injure et la diffamation racistes. Au temps pour ceux qui ont cru que l’affaire Charlie avait suscité un engagement national en faveur de la liberté de la presse !
 
C’était en réalité à prévoir. Les protestations de solidarité avec les caricaturistes assassinés et l’absolutisation de la liberté d’expression affichée par les politiques et les médias étaient en fait sévèrement circonscrites : c’est le blasphème qui est protégé par l’Etat, au nom de la laïcité et de la démocratie, mais ce n’est pas pour autant qu’on va démanteler le système pénal antiraciste qui sert bien plus à museler un discours rationnel sur des questions qui préoccupent les Français qu’à protéger les personnes des abus de la liberté d’expression. Christiane Taubira n’a pas caché qu’elle entendait viser en priorité internet, en dotant l’exécutif de nouvelles armes de contrôle.
 

Racisme tous azimuts

 
Le garde des Sceaux a fait trois propositions. Premièrement, la « circonstance aggravante de racisme », aujourd’hui limitée à certains délits, serait généralisée à tous les actes réprimés par le code pénal. Autrement dit, n’importe quel délit ou crime serait davantage sanctionné lorsque la motivation raciste, antisémite ou homophobe de l’accusé serait démontrée. Cela « aurait un sens évident pour certaines infractions comme les agressions sexuelles, le harcèlement sexuel, le harcèlement moral, la séquestration, la traite des êtres humains, le bizutage, l’atteinte aux biens et le chantage notamment », assure un communiqué de la Chancellerie.
 
Autrement dit, même le vol serait considéré comme plus condamnable à partir du moment où la victime ferait partie d’une « minorité protégée » : on regarderait la qualité de la victime plutôt que la gravité de la faute. Sans que l’on puisse affirmer que ces sanctions plus lourdes seraient systématiques, ce serait quand même la porte ouverte à bien des incertitudes et des abus, et à la création de deux catégories de citoyens.
 

Au nom de Charlie, Taubira fait le choix du tout-répressif

 
Deuxième axe de réflexion de Christiane Taubira : injures et diffamations raciales ne seraient plus réprimées dans le cadre de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dès lors qu’elles concerneraient le racisme, l’antisémitisme ou l’homophobie – et non la religion, le sexe, la nationalité ou l’handicap qui sont les autres catégories désignées par les lois antiracistes. Le basculement de l’apologie du terrorisme, qui figurait jusque-là dans la loi sur la presse dont l’économie générale est censée protéger autant que possible la liberté, vers le droit commun s’est fait à l’automne dernier sous la houlette de Bernard Cazeneuve.
 
Avec la proposition Taubira, c’est bien une aggravation de la répression de certains délits de presse qui est ouvertement recherchée pour les faits de racisme ethnique, antisémite ou homophobe, avec une modification des délais de prescription, la possibilité du jugement en comparution immédiate et l’emprisonnement sur le champ.
 

Fermer les sites internet au nom du racisme et de l’antisémitisme

 
Troisième mesure, qui s’en prend directement à la liberté d’expression : Christiane Taubira propose de confier à l’autorité administrative la possibilité – et donc le droit – de bloquer sans intervention du juge les sites internet de haine raciste ou antisémite.
 
Voilà qui ouvrirait un très large champ d’action au pouvoir, puisque des années d’application des lois « antiracistes » ont apporté la preuve que celles-ci servent beaucoup moins à sanctionner et réparer l’injure, l’insulte et la diffamation, qu’au demeurant, le droit pénal permet de sanctionner déjà de manière générale, qu’à interdire certaines opinions critiques : sur la politique d’immigration par exemple, ou sur les comportements de telle ou telle catégorie de la population. Ce sont ces lois qui en traquant les « discriminations » – elles aussi visées par Taubira – ont fini par interdire la préférence nationale. Le « soi-disant antiracisme » est un outil efficace de l’arsenal du relativisme culturel et religieux. Il a déjà créé un délit d’opinion en France. Il n’est quasiment jamais invoqué pour protéger les droits des Français et des chrétiens en France, puisqu’il est généralement appliqué de manière univoque par les juges.
 
En ce sens, la proposition de Christiane Taubira, qui fait mine de viser les entreprises terroristes qui méritent un arsenal pénal bien adapté, pourra servir d’abord à interdire l’expression d’opinions politiques ou religieuses, et c’en est probablement le but. Fermer des sites internet non conformistes ? Ils en rêvent !
 

Quel rapport entre homophobie et terrorisme ?

 
Depuis que « l’homophobie » s’est ajoutée à la liste des opinions interdites, c’est la simple expression de la morale naturelle qui est visée. Il semblerait que Taubira ne veuille pas l’inclure dans les dispositions visant les sites internet. Mais les sanctions seront de toute manière potentiellement renforcées contre celui qui critiquera les actes homosexuels ou les droits LGBT.
 
Tout cela n’est pas exempt de paradoxes apparents. Comment concilier la défense nationale de caricatures violemment blessantes pour les croyants (musulmans sans doute, mais encore bien plus pour les chrétiens) d’un journal comme Charlie Hebdo, avec la répression et les sanctions accrues contre le « racisme » ? Ce paradoxe est en fait la preuve que le « racisme » est défini de manière particulière et politique. Il est du même ordre que celui qui autorise la représentation obscène du « Prophète » (et plus encore de la Sainte Trinité) mais qui oblige à professer que l’islam est une « religion de paix et de tolérance ».
 

Renforcer les sanctions contre la liberté d’expression

 
Les grands attentats permettent avant tout à brider les libertés des honnêtes gens et permettre leur mise sous surveillace : le Patriot Act et ses déclinaisons de plus en plus nombreuses dans les pays occidentaux sont là pour le montrer. Ils vont permettre aussi de limiter la liberté d’expression – nouvelle idole, pourtant – non par un critère de vérité mais par un critère politique. C’est un vrai tour de passe-passe.