Les chimpanzés devant la cour d’appel de New York : pas de droits humains, mais beaucoup d’égards

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Au terme d’une procédure qui dure déjà depuis plusieurs années, la cour d’appel de l’Etat de New York vient de décider de refuser de reconnaître des droits humains aux chimpanzés, comme le lui demandait l’association Nonhuman Rights Project qui cherche à obtenir la « libération » de plusieurs singes « détenus » dans des cages par des propriétaires privés, pour qu’ils soient envoyés dans un « sanctuaire » pour chimpanzés en Floride. Le groupe réclamait pour les singes un droit typiquement humain, l’habeas corpus, tout en affirmant réclamer des droits « non humains ».
 
L’intitulé même de l’association en dit long sur sa volonté de brouiller les frontières entre l’homme et l’animal. En refusant de faire droit à sa demande, les juges de New York ont confirmé la décision des premiers juges mais ils n’ont pas rendu une décision de principe. Faisant preuve de beaucoup d’égards vis-à-vis des chimpanzés Kiko et Tommy, ils ont surtout tenu à montrer que leur « détention » n’était ni contestée ni contestable.
 

Les droits des chimpanzés rejetés, sans rire, par la cour d’appel de New York

 
Aussi l’expert en bioéthique Wesley J. Smith est-il déçu par ce jugement qui fait tout pour prendre au sérieux la demande de l’association. « Cette affaire aurait dû être rejetée par la cour dans l’hilarité générale. Au lieu de quoi, la tentative de l’association radicale Nonhuman Rights Project a reçu de la part d’une cour d’appel de New York une décision fort respectueuse en réponse à sa demande d’obtenir l’habeas corpus pour des chimpanzés », écrit-il.
 
Pour lui, les choses sont simples : « Les animaux, y compris les chimpanzés, ne peuvent se faire reconnaître de droit parce qu’aucun d’entre eux – par nature – n’est capable d’assumer des responsabilités ou des devoirs. »
 
Sur ce point, la cour de New York est en accord avec lui, puisque les juges ont observé que les capacités cognitives et linguistiques des chimpanzés ne se traduisent pas chez eux par la capacité à être « soumis à des devoirs juridiques ou d’être tenu légalement responsables de leurs actions ». On ne peut ainsi leur imputer aucun crime, même s’ils tuent un être humain. Les juges ont également rejeté l’idée que cette exigence puisse être écartée dans la mesure où les enfants ne sont pas non plus tenus responsables de leurs actions tout en possédant des droits juridiques. « Cet argument passe à côté du fait que ce sont quand même des êtres humains, membres de la communauté humaine », affirme la décision.
 

Les droits humains correspondent aux devoirs humains. Et l’âme dans tout ça ?

 
La cour a donc refusé de suivre les demandes véritablement « fanatiques » selon Wesley Smith visant à faire reconnaître que les chimpanzés, et d’autres animaux, puissent comme des personnes morales poursuivre ceux qui leur font du tort – certes par l’intermédiaire d’associations d’hommes. Les juges ont souligné que les personnes morales représentent des êtres humains : les chimpanzés n’en sont pas.
 
Mais dans le même temps, les juges ont tenu à rendre hommage à ceux qui se battent pour les droits des amis, ce qui outrepasse largement le cadre de l’affaire et donne un début de reconnaissance à la cause des « droits non-humains ». Puisqu’ils ont eu raison de poursuivre, au dire des magistrats, pourquoi ces militants s’arrêteraient-ils en si bon chemin malgré cette défaite ponctuelle ?
 
Les juges américains avaient en effet la possibilité de rejeter d’emblée l’affaire en tant que « poursuite farfelue » ou « frivole ». Ne pas oser le faire, c’est déjà laisser enfoncer un coin dans le sens de la réalité.
 

Jeanne Smits

 
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