Ehsan Shan : encore un chrétien du Pakistan condamné à mort pour blasphème

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Un jeune chrétien a été condamné à mort pour blasphème par un tribunal antiterroriste (sic) de Sahival au Pakistan, non pour quelque violence sanguinaire visant à intimider la population mais pour avoir supposément mis en ligne des contenus « insultants pour l’islam et son prophète ». Agé d’une vingtaine d’années, Ehsan Shan, issu d’une famille très pauvre, était seulement accusé d’avoir partagé l’image d’un Coran endommagé sur TikTok, avec une seule personne en fait selon le P. Khalid Rashid de la Commission nationale pour la justice et la paix (CNJP) de l’Eglise catholique au Pakistan. Une image de la « profanation » du Coran par deux chrétiens avait par ailleurs été partagée par des milliers de personnes, avec pour conséquence en août dernier une vague de violences sans précédent contre les chrétiens Jaranwala dans la province du Penjab : 25 églises incendiées, 80 maisons abritant des foyers chrétiens saccagées.

 

Au Pakistan, les condamnations à mort pour blasphème visent d’abord les chrétiens

On attend toujours des condamnations judiciaires à la suite de ces émeutes, mais un chrétien déclaré coupable d’avoir participé de très loin à un « blasphème » contre le Coran ou contre les figures de l’islam est en effet passible de mort selon les lois pénales du Pakistan, et pour cela la justice ne se gêne pas. S’il est vrai qu’il n’y a pas eu à ce jour exécution d’une telle sentence, une simple accusation en ce sens peut provoquer des émeutes anti-chrétiennes allant jusqu’au lynchage et au meurtre.

Sur le plan judiciaire, les accusés de blasphème sont volontiers jetés en prison à l’exemple d’Asia Bibi, aujourd’hui réfugiée au Canada, restée neuf ans derrière les barreaux pour avoir discuté au sujet de Mahomet avec des femmes musulmanes travaillant aux champs avec elle, à qui elle venait d’apporter de l’eau et qui refusaient de boire dans son gobelet « impur ».

 

Le Pakistan pénalise lourdement le « blasphème », crime à géométrie variable

Chose remarquable, plusieurs dizaines de personnes ont manifesté à Karachi au début du mois pour dénoncer la sentence de mort prononcée à l’encontre d’Ehsan Shan et exiger sa libération, ainsi que son acquittement dans le cadre de l’appel qu’il a interjeté, mais aussi pour réclamer une réponse efficace aux véritables crimes commis à l’encontre des chrétiens lors des émeutes de Jaranwala.

Celles-ci avaient certes entraîné l’inculpation de quelque 135 individus mais la plupart d’entre eux ont obtenu la libération sous caution ; seuls 12 accusés sont actuellement en cours de jugement.

L’association Aide à l’Eglise en détresse a lancé un « appel désespéré » en faveur du jeune homme, relayant notamment les déclarations de Mgr Shukardin, président de la CNJP appelant la communauté internationale à demander justice : « Les grandes ONG internationales et les organisations de défense des droits de l’homme devraient sortir et dire quelque chose qui s’oppose à cette décision. Cela aura un impact important sur le gouvernement. »

Mais on n’entend guère parler des chrétiens persécutés au sein des grandes institutions internationales.

 

Jeanne Smits