Commerzbank, Deutsche Bank : vers un krach mondial à cause des banques allemandes ?

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L’inquiétude des milieux d’affaires et de la presse financière internationale est maximale : les difficultés des deux plus grosses banques allemandes, la Commerzbank et la Deutsche Bank font craindre un krach mondial plus violent que celui qu’avait produit la faillite de Lehman Brothers en 2008.
 
On avait pris l’habitude de voir dans l’industrie et les banques allemandes des symboles de prospérité, les premiers de la classe européenne prompts à faire la leçon aux cancres grecs, espagnols ou portugais. Or, si la politique d’Angela Merkel est conforme à l’orthodoxie bruxelloise, l’économie allemande ne va pas bien. Depuis plusieurs mois les analystes internationaux agitent le drapeau rouge : il y a un risque systémique de krach mondial à cause de l’extrême fragilité des banques allemandes.
 

La Commerzbank ne gagne « simplement pas assez d’argent »

 
Frankfort tremble et vacille sur ses bases. La Commerzbank vient d’annoncer qu’elle supprime 9.600 emplois, plus d’un cinquième de ses employés. Une restructuration qui lui coûtera plus d’un milliard d’euros d’investissement mais devrait lui permettre de réduire ses coûts de base annuels de 7,2 milliards à 6,5 d’ici 2020. C’est que le besoin d’argent est urgent. La Commerzbank s’était lancée dans le transport maritime, elle l’a abandonné, mais a gardé une ardoise de huit milliards. Dans une note interne lue par l’agence Reuters, le président de la Commerzbank Martin Zielke écrit franchement : « Nous ne gagnons simplement pas assez d’argent pour assurer à la banque un avenir durable ». L’action de la Commerzbank a perdu 40 % depuis le début de l’année, et ça s’accélère. Quant à la Deutsche Bank inquiète encore plus.
 

Les banques européennes pas remises du krach mondial de 2008

 
D’une manière générale, après le krach mondial de 2008, les banques ont eu du mal à s’adapter aux nouvelles règles. En Europe, la combinaison des taux d’intérêts anormalement bas et des vaches maigres leur maintient la tête sous l’eau. Pout Tidjane Thiam, le président du Crédit suisse, ce ne sont pas des entreprises qui peuvent « vraiment » intéresser un investisseur. Les chiffres lui donnent raison. La Deutsche Bank a perdu soixante pour cent de sa capitalisation boursière depuis novembre 2015. Il faut dire que 2015 est sa première année de pertes depuis 2008, en raison notamment d’une perte sur des obligations convertibles (ce que les initiés ont nomme les « coco bonds ») et d’une amende de 14 milliards infligée par la justice américaine. Le nouveau président de la Deutsche Bank, le britannique John Criyan, nommé cet été a lancé un plan d’économie tous azimuts, vendant pour un milliard les assurances Abbey Life, supprimant 15.000 emplois sur 100.000, fermant des dizaines de bureaux partout dans le monde et suspendant pour deux ans tout versement de dividendes aux actionnaires.
 

Panique chez certains clients de la Deutsche Bank

 
Ces remèdes ont rajouté à l’inquiétude des clients de la Deutsche Bank. Selon Bloomberg, onze des 200 hedge funds (ces fonds d’investissement non cotés à vocation spéculative) qui travaillent avec elle auraient réduits leurs engagements en procédant à des retraits de cash bien supérieurs à la moyenne. Serait-ce le début des traditionnels mouvements de panique qui mènent au krach ? L’action Deutsche Bank a encore perdu 7 % en une seule après-midi.
 
Aussi le gouvernement allemand subit-il des pressions pour procéder un renflouement, sur le modèle du directeur du Trésor américain Paulson en 2008, qui sauva la Citibank et limita ainsi le krach mondial. On lui suggère de mettre plusieurs milliards d’euros au pot pour sortir la Deutsche Bank du rouge.
 

Merkel pas chaude pour renflouer les banques allemandes

 
Mais les habitudes allemandes ne vont pas dans le sens de l’interventionnisme d’Etat. Un élu bavarois de poids, Hans Michelbach, juge « inimaginable » que l’Allemagne renfloue aucune de ses banques à la façon de 2008, parce qu’elles n’en sont pas là et qu’il leur reste de la marge de manœuvre. Et le patron de la Deutsche Bank affirme clairement qu’« aucun besoin de capital n’est à l’ordre du jour ». Cependant, la panique boursière pourrait s’installer. Dans ce cas, Angela Merkel, déjà très affaiblie par l’affaire des migrants, aurait du mal à faire quoi que ce soit pour ses banques avant les prochaines élections qui s’annoncent mal, à moins de se sacrifier politiquement.
 

Pauline Mille