L’Irak oui, la Syrie non. Au cours de ces derniers mois, les forces spéciales britanniques ont pu mener de multiples opérations en Irak contre l’Etat islamique mais il ne leur a guère été permis de se déployer en Syrie contre les têtes pensantes du Califat. Les tabloïdes britanniques accusent désormais le Premier ministre David Cameron de retenir le bras de son armée en empêchant le SAS (Special Air Service) de participer aux missions visant à éliminer les chefs de l’Etat islamique.
Une mission américaine visant à frapper les chefs de l’Etat islamique dans son QG de Raqqa se déroule ainsi actuellement sans participation britannique, au grand dam des hauts gradés qui ont mené les corps d’élite l’armée de sa gracieuse majesté dans un grand nombre de missions confiées à leurs homologues américains, Delta Force et les Seals, lorsque ceux-ci étaient chargés de frapper des cibles de premier choix en Afghanistan et en Irak.
Les forces spéciales britanniques empêchées d’agir contre les chefs de l’Etat islamique
On s’interroge désormais sur les raisons de la retenue imposée par Cameron : d’aucuns l’attribuent à sa crainte de voir des victimes britanniques tomber, non parce qu’il veut protéger leur vie, mais parce que cela sera désastreux pour l’image de son parti et surtout de la part des conservateurs hostiles au Brexit. Le calcul serait donc politique de la part du chef du gouvernement.
Quoi qu’il en soit les analyses sont formelles, selon The Sun : la Royal Air Force a bombardé quatre fois plus souvent des cibles de l’Etat islamique en Irak qu’en Syrie à la suite du feu vert donné par la Chambre des communes il y a près de quatre mois. Les forces spéciales sont prêtes à agir, pourtant. Une source militaire a parlé de leur « frustration » : « Nous avons une escadrille SAS au Kurdistan, mais elle n’a pas le droit de traverser la frontière pour cause de restrictions politiques. » Le Royaume-Uni « combat Daesh sans desserrer le frein à main », a-t-il ajouté.
David Cameron accusé d’entraver l’action de l’armée en Syrie
L’absence de forces spéciales sur le terrain constitue également un handicap pour l’aviation dont la tâche – trouver des cibles de haut niveau – est ainsi compliquée.
Tout cela fait partie d’un contexte où les Etats-Unis et ses alliés n’avancent guère en Irak, ce qui a abouti à laisser le champ libre à Poutine qui avait à l’évidence la volonté de frapper l’Etat islamique au cœur. Les hésitations ont joué en sa faveur : « Les Russes sont partout maintenant comme une éruption d’urticaire, ce qui fait que c’est bien plus difficile pour nous d’en faire autant », s’est lamenté l’ancien chef de l’armée britannique Lord Dannat.
C’est aujourd’hui l’opposition, en la personne de Tony Blair, qui cherche à impliquer davantage le Royaume-Uni en réclamant une intervention contre l’Etat islamique au sol. Bien entendu, les attentats de Bruxelles lui ont fourni une occasion parfaite pour appeler à la mobilisation. D’autres figures de la vie politique ont beau jeu de le rejoindre en insistant sur la barbarie de l’Etat islamique et en plaidant pour une « chasse à l’homme » efficace contre les chefs de Daesh. Du point de vue de l’opinion publique, c’est le bon moment.
Mais ce l’était aussi juste après les attentats de Paris. Tout se passe comme si l’Occident se contentait assez bien du statu quo, c’est-à-dire d’une instabilité durable qui rend possible bien des choix politiques.