Quand Davos s’occupe du café, à cause du changement climatique…

Davos café changement climatique
 

Une vidéo est devenue virale sur le réseau X, et pour cause. On y voit le banquier suisse Hubert Keller, lors d’une table ronde au Forum économique mondial (WEF) à Davos, affirmer tranquillement comment la production de café contribue au changement climatique et qu’il faut y remédier manu militari. En demandant aux deux tiers des habitants de la planète de trouver un autre breuvage ? Plus de 2,25 milliards de tasses de café sont consommées dans le monde chaque jour, pour un marché mondial estimé à plus de cent milliards de dollars US. L’enjeu n’est pas des moindres… et les utilisateurs de X se sont largement gaussés.

Mais, pour le climat, que ne ferait-on pas ? Ou plutôt : par le climat, que ne peut-on pas faire ?

 

Le changement climatique ferait disparaître la moitié de la production

Deuxième produit le plus échangé au monde après le pétrole, le café est aussi la deuxième boisson la plus bue dans le monde, après l’eau, et la monoculture, de loin la méthode plus productive, est la norme. De plus, ses zones de production sont majoritairement concentrées dans l’hémisphère sud. Ce sont ces deux raisons qui taraudent Hubert Keller, directeur associé du groupe bancaire suisse indépendant Lombard Odier, largement engagé dans toute la philosophie de l’acronyme ESG (Environmental, Social, Governance), les nouvelles normes sacro-saintes socio-écologistes.

Dans le clip partagé sur X, qui a cumulé plus de trois millions de vues et de nombreux commentaires, il s’inquiète : « En gros, le café que nous buvons tous émet entre 15 et 20 tonnes de CO2 par tonne de café. Nous devrions donc tous savoir que chaque fois que nous buvons du café, nous rejetons essentiellement du CO2 dans l’atmosphère. »

Crime de lèse-majesté !

Non seulement, le café de par son mode et son volume de production génère du CO2, ce qui est péché, mais en plus, il ne sera bientôt plus possible de le cultiver à ces niveaux puisque d’ici 2050, selon les prédictions des grandes instances, 50 % des terres actuellement adaptées ne le seront plus sous l’effet du changement climatique… Et les petits exploitants qui représentent la majorité des producteurs de café mondiaux seront incapables de s’en accommoder.

 

Davos inaugure le « modèle d’une nouvelle manière d’investir dans la nature »

Comment résoudre la nouvelle équation soumise au diktat écologiste ? Pour Keller, c’est évident : en adoptant le concept d’agriculture régénératrice, celle qui a pour objectif de restaurer la santé des sols en augmentant leur teneur en matières organiques et en améliorant leur structure et leur potentiel de stockage de carbone. Mais pour cela, il faut des subsides, car « le développement d’une production alimentaire régénératrice à grande échelle sera coûteux ».

Et ce ne sont pas les cultivateurs qui risquent de pouvoir la mettre en place : dans les deux plus grandes régions de culture du café, en Afrique et en Asie, la plupart d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. « C’est donc à nous d’amorcer un changement ! Nous devons investir pour protéger ce marché », résume Andrea Illy, président d’Illycaffè, géant du café italien.

Le café pourrait ainsi devenir une culture de référence pour l’impact du changement climatique sur l’agriculture et le pionnier de la transformation des systèmes alimentaires…

 

Comment culpabiliser les buveurs de café

Sauf qu’à y bien réfléchir, ce hold-up, sous prétexte de pertinence ESG, semble quelque peu ubuesque. « Et voilà que les clowns du WEF prétendent que le café est mauvais pour l’environnement ! », a lancé un chroniqueur conservateur sur X. Ces grands messieurs veulent réorganiser l’industrie du café pour la rendre plus respectueuse de l’environnement et prendre en main, en somme, le destin de ces producteurs de café qui ne le leur demandent pas forcément ? Il est certain que ce « marché mondial de 250 milliards de dollars » est, aussi, assez séduisant… Et que le délire climatique a toujours bon dos pour permettre aux gros d’écraser les petits, incapables de s’adapter aux nouvelles exigences réglementaires.

Les commentaires ont été nombreux sur X. Le journaliste technologique Tim Hinchliffe, qui a initialement publié le clip sur la plateforme, traduit tout de go les arguments de Keller : « Quand il affirme que la production est “fragmentée”, il dit qu’elle n’a pas encore été confisquée par les entreprises et centralisée. Les producteurs de café des pays du Sud, comme les qualifient les mondialistes, doivent être privés de leurs moyens de subsistance au nom de la justice climatique. Il s’agit d’une prise de pouvoir pour s’emparer des terres et des moyens de production afin de nous taxe-carboner, vous et moi, jusqu’à la moelle ! »

Et puis, c’est encore une énième manière de culpabiliser le quidam. L’auteur et scientifique Gad Saad ne s’est pas privé de sarcasmes en réponse aux déclarations du banquier suisse : « Les animaux de compagnie causent des dommages au climat ; les voitures le font aussi ; avoir des enfants est irresponsable à cause de la surpopulation ; manger de la viande est un écoterrorisme ; les cuisinières à gaz sont mauvaises ; et maintenant le café… » Quant à Keller, il va repartir dans son jet privé. L’arnaque au CO2 est tellement belle.

 

Clémentine Jallais