Le souverainiste britannique Nigel Farage, député européen, en est certain : il existe une conjuration entre une partie de la classe politique britannique et l’Union européenne pour faire échec au Brexit. La fuite d’un courriel envoyé par Alyn Smith, élue européenne du parti national écossais (SNP gauche), aux 751 autres députés du Parlement européen en fournit la preuve. Dans ce courriel, Alyn Smith demande « une extension du délai pour l’application de l’article 50 » qui règle la sortie de l’UE. Ralentir le processus pour finir par l’étouffer.
Ce texte, révélé par Nigel Farage dans le Daily Telegraph et signé par 13 autres eurodéputés britanniques explique : « Malgré nos différences politiques, nous, députés du Parlement européen britanniques, sommes unis sur un fait : si vous souhaitez permettre au Royaume-Uni de demeurer dans notre famille européenne, alors tous les moyens pour y parvenir exigent une extension des délais de l’article 50. (…) C’est dans un esprit d’amitié, de solidarité et de respect que nous vous demandons à vous, amis européens, de commencer à penser à cette possibilité et à vous tenir prêts à cette éventualité. »
Une conjuration avec des étrangers contre son propre peuple pour bloquer le Brexit
L’intention de ce texte publié par Nigel Farage est limpide : former une conjuration s’appuyant sur des élus étrangers pour censurer la volonté exprimée démocratiquement par son propre peuple. En d’autres temps, on aurait qualifié cela de tentative de haute trahison. Farage s’indigne de ce que Smith et ses collègues demandent ainsi aux députés des 27 Etats demeurant dans l’UE « de faire pression sur leurs gouvernements pour suspendre le processus légal par lequel la Grande-Bretagne est en train de s’émanciper du projet de l’Union européenne » par le Brexit.
Le député européen allemand de droite Hans-Olaf Henkel a immédiatement répondu favorablement à la demande d’Alyn Smith en ces termes : « Je soutiens tout ce qui permettra d’éviter un Brexit, y compris tout ce qui permettra d’en repousser la date. Permettez-moi de vous informer que j’ai parlé à la fois au président Juncker et au chancelier (autrichien) Kurz de votre initiative. » La position de M. Henkel est symptomatique. Ancien président de la Fédération de l’Industrie allemande (BDI), équivalent du MEDEF français, il est membre du groupe conservateur CRE au Parlement européen, anti-fédéraliste mais opposé à toute sortie d’une Etat membre de l’Union.
L’Allemand Henkel déplore la compétitivité britannique en cas de Brexit
Nigel Farage révèle une conversation qu’il eut récemment avec Hans-Olaf Henkel, afin de permettre au grand public de connaître l’état d’esprit des « élites » européennes les plus influentes. « Henkel m’a demandé ce que ferait la Grande-Bretagne si elle réussissait son Brexit », explique Farage. « Je lui ai dit qu’elle deviendrait un pays de libre-échange et serait de ce fait plus compétitive ». Et que lui a répondu Henkel ? « Mais vous ne pouvez pas faire ça, sinon nous aussi devrons quitter l’Union européenne ! »
Le fait est que Henkel, et une flopée d’autres politiciens de l’UE sont terrifiés de l’avantage commercial qu’un Brexit « propre », c’est-à-dire total, obtenu par une décision démocratique, procurerait au Royaume-Uni. Farage explique : « L’UE ne s’inquiète pas seulement de savoir quels seraient les avantages de la Grande-Bretagne après le Brexit. On observe aussi un désir pathologique, parmi les politiciens continentaux comme Henkel, de ne surtout pas s’éloigner du dogme du marché socialiste et de ses réglementations rigides. » Le courriel de Henkel prouve qu’il est obsédé par le maintien du statu quo, « même si ça exige de faire un doigt d’honneur aux 17,4 millions de Britanniques qui ont voté pour la sortie de l’UE ».
Nigel Farage scandalisé par cette conjuration contre le Brexit
De leur côté, en signant cette lettre, « Alyn Smith et ses treize comparses élus au Parlement européen démontrent un mépris total de leur propre peuple et conspirent avec les Allemands pour s’assurer que la Grande-Bretagne ne puisse pas redevenir compétitive grâce au Brexit », s’indigne Nigel Farage que cette conjuration scandalise. C’est exactement ce que demande le négociateur en chef de la partie européenne, le Français Michel Barnier, dont la brutalité face aux Britanniques n’égale que la soumission à Bruxelles.
Pour Nigel Farage, cet échange de courriels n’est probablement que la partie émergée de l’iceberg. Il se demande ce que faisaient les socialistes Tony Blair, européiste britannique compulsif, et son ami le secrétaire au Brexit du cabinet fantôme Keir Starmer, cette semaine à Bruxelles : « Quoi qu’ils prétendent, je suis persuadé que ces deux politiciens travaillistes étaient là pour aider leurs amis de l’UE à trouver le moyen de s’opposer à la volonté de l’électorat britannique. »
Pour Nigel Farage, l’objectif des conjurés est clair : faire échouer l’article 50. « J’appelle cela une collusion contre la démocratie, et je crois qu’ils devraient tous être couverts de honte », lance-t-il.
Matthieu Lenoir