Un groupe d’élèves californiens de Vergara a engagé des poursuites contre l’État de Californie pour se plaindre des règles régissant l’embauche, la titularisation et le licenciement des professeurs. Elles aboutissent selon eux à maintenir devant les classes des enseignants gravement incompétents, spécialement dans les zones les plus déshéritées. Le système viole selon eux le droit des élèves des minorités et des groupes défavorisés à l’égalité de traitement, affirmé par la Constitution de la Californie. L’affaire a été engagée en 2012 ; au bout de plusieurs péripéties de procédure elle arrive devant la cour d’appel de la Californie qui a entendu les uns et des autres. Sa décision est attendue dans trois mois.
Il est intéressant de constater que la plainte de ces jeunes (dont on suppose qu’ils ont été poussés à agir par des associations d’adultes) mécontents du niveau d’enseignement qu’ils rencontrent dans les écoles gratuite de Californie est directement liée à un excès de protection des professeurs qui s’avèrent très difficiles à renvoyer lorsqu’ils ne donnent pas satisfaction.
Des élèves pauvres de Californie se retournent contre le choix de professeurs incompétents
Les avocats des élèves ont ainsi souligné que la titularisation permanente au bout de deux ans d’enseignement s’accompagne d’une mesure de confirmation qui intervient bien plutôt au cours de cette période. Les conditions du licenciement permettent aux professeurs de bénéficier de délais importants dans la mesure où ils bénéficient d’une suspension de leur licenciement tant que courent l’éventuelle enquête, la saisine du syndicat ou les appels administratifs. En outre, le système qui prévoit le licenciement du dernier arrivé en cas de réduction d’effectifs a aussi pour effet d’empêcher le maintien de nouveaux professeurs pourtant bien plus efficaces que les anciens.
La plainte des élèves s’accompagne de statistiques troublantes. Selon le département américain de l’éducation, les écoles publiques californiennes sont parmi les pires des Etats-Unis, se situant au dernier rang à plusieurs niveaux pour l’enseignement de la lecture et des mathématiques. Les États-Unis étant les États-Unis, la plainte souligne également que le fait de subir un professeur inefficace s’accompagne d’effets mesurables sur les revenus auxquels pourront prétendre ses élèves dans la vie active. Ainsi le fait de remplacer un professeur incompétent par un professeur simplement moyen pourrait aboutir à une augmentation les revenus professionnels de l’ensemble de la classe de 1,4 million de dollars sur l’ensemble de leur carrière.
Les lois de l’Etat de Californie favorisent les professeurs médiocres
Les avocats ont également fait valoir que le coût et la difficulté du renvoi d’un professeur inefficace aboutissent à ce que les écoles se le renvoient les unes aux autres, avec une tendance à les voir aboutir et stagner dans les zones les plus pauvres et les plus déshéritées.
La Californie s’est défendue face à ces accusations, non sans le soutien des syndicats d’enseignants représentant quelques 400.000 professeurs. L’État n’a pas nié la faiblesse de ses services éducatifs, mais il a imputé à la taille des classes et au manque de moyens les dysfonctionnements constatés. À quoi s’ajoutent évidemment les droits sacro-saints des employés de la fonction publique.
En 2014 un tribunal a pourtant donné raison aux élèves, constatant que les règles administratives et le statut des professeurs ont un réel impact sur le droit des jeunes à l’égalité devant l’éducation. Elles font peser un poids disproportionné sur des élèves pauvres ou issu des minorités : le juge Treu à même écrit que le constat « choque les consciences ».
Un premier juge a donné raison aux élèves qui poursuivent la Californie
L’affaire est donc venue devant la cour d’appel à la demande de l’État de Californie. Sa Constitution, contrairement à celle des États-Unis, affirme un droit fondamental à l’éducation et interdit toute discrimination sur la base de la race ou du niveau socio-économique. La même Constitution prétend assurer aux enfants californiens la « compétitivité sur le marché économique ». Toute loi qui empêcherait leur réussite serait donc anticonstitutionnelle.
On peut bien sûr s’interroger sur l’égalitarisme du système. Mais cela n’empêche pas que le grief des jeunes Californien puisse être réel. En l’occurrence on constate que l’excès d’Etat et de réglementations protectrices poussées à l’absurde aboutissent à des situations contraires aux intérêts de ceux que l’on prétend protéger. Dans ce cas précis, les juges ont pu largement constater les effets néfastes d’une scolarisation publique qui se moque bien de savoir si les enfants acquièrent réellement une instruction, une culture, et des compétences qui les préparent à la vie active.