Entretien exclusif avec le père Samir Khalil Samir, islamologue égyptien, sur l’attitude à adopter face aux musulmans en Europe

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L’islam n’est pas une religion de paix et la charia est incompatible avec l’Occident : voilà, en somme, ce que met en évidence un entretien réalisé par Olivier Bault avec le P. Samir Khalil Samir, islamologue égyptien, et il est important que cela soit dit. C’est sa grande connaissance du monde musulman, de ses croyances et de ses lois qui donne tout son intérêt à ce grand entretien qui souligne en outre les défaillances actuelles en Europe par rapport au devoir d’évangélisation des musulmans de plus en plus nombreux sur son sol.
 
Comme chez beaucoup de chrétiens d’Orient – et il l’est quoique jésuite – on constate cependant une admiration sans réserves du système des « droits de l’homme » né de la Révolution française, avec son corollaire, la laïcité – fût-elle « apaisée » qui serait la garante d’une coexistence pacifique de l’islam avec les autres religions présentes en Europe. Toutes soumises, en quelque sorte, au « système étatique ».
 
L’histoire de la France a pourtant montré que les droits de l’homme et la laïcité se sont construits envers et contre le christianisme ; la fille aînée de l’Eglise s’est dénaturée en les mettant en œuvre de cette manière pour aboutir au consensus mortifère qui a cours aujourd’hui : « Non à une loi morale qui primerait sur la loi civile. » L’expression – en substance – était de Jacques Chirac, mais elle est très largement assumée par l’ensemble de la classe politique française, ouvrant non seulement la voie à toutes les aberrations de la culture de mort mais privant de ses fondements et de ses fondations toute réaction contre l’islam puisqu’elle relativise les notions de bien et de mal.
 
Il est tout naturel, si on pousse le raisonnement à bout en sacralisant les « droits de l’homme », de vouloir dès lors « restructurer » l’islam, comme semble le souhaiter le P. Samir, pour le rendre compatible avec la République, et plus encore avec le relativisme mondialisé. L’objectif n’est pas exempt de dangers, surtout pour les droits des chrétiens et ceux de la vérité.
 
Mais c’est une discussion bien difficile à mener avec les chrétiens d’Orient, notamment, formés à l’admiration de l’Occident – y compris dans ses dérives idéologiques – et soucieux dans la pratique de conserver ou d’obtenir un maximum de libertés concrètes, quel que soit leur soubassement conceptuel.
 
Il est certainement plus efficace, comme le suggère d’ailleurs le P. Samir, de multiplier les initiatives pour faire découvrir la vérité du Christ aux musulmans présents en Europe.
 

Jeanne Smits

 
 

Quelles sont les conditions d’une cohabitation pacifique avec les musulmans en Europe ? Quelles sont les erreurs commises aujourd’hui par les nations européennes ? L’attitude de l’Église et du pape François vis-à-vis de l’islam et des musulmans est-elle judicieuse ? Assiste-t-on à un phénomène de conversion au christianisme des musulmans ? Dans un entretien exclusif pour Réinformation.TV, le père jésuite Samir Khalil Samir, Copte catholique égyptien, islamologue, orientaliste et théologien reconnu, auteur de nombreux ouvrages et articles, professeur ayant enseigné dans plusieurs universités dont l’université Saint-Joseph de Beyrouth, l’Institut pontifical oriental de Rome et le Centre Sèvres de Paris, apporte des réponses détaillées à toutes ces questions.

 

Que savez-vous des conversions de musulmans au christianisme en Italie et plus généralement en Europe ?

 
Autant que je sache, il n’y a pas un mouvement de masse de conversions. Et quand un musulman se convertit au christianisme, l’Eglise n’en parle pas et cela reste discret. Même chez les protestants, en général beaucoup plus actifs que les catholiques, il n’y a pas de conversions de masse.
 

L’évangélisation des musulmans d’Europe est le fait d’initiatives individuelles rarement soutenues par l’Église institutionnelle.

 

Vous dites que l’Eglise ne parle pas des conversions. Pourquoi en est-il ainsi ?

 
Il existe en Europe une tendance assez forte à vouloir éviter de créer des problèmes avec le monde musulman. C’est particulièrement vrai en France. Je participe avec Mohammed-Christophe Bilek au Forum Jésus le Messie, et nous rencontrons des obstacles de la part des évêques en beaucoup de lieux. Il y a certes des exceptions comme Mgr Rey à Toulon. Mgr Rey encourage au contraire l’œuvre d’évangélisation des musulmans. Beaucoup d’évêques préfèrent toutefois éviter les ennuis sous prétexte de respecter la liberté des gens. Pourtant, respecter la liberté des gens, ce devrait être aussi respecter la liberté d’annoncer le Christ et celle de se convertir !
 

Ce que vous dites des évêques français vaut-il aussi pour les évêques italiens ?

 
Les évêques italiens n’interviennent pas dans la conversion des musulmans. Je n’ai pas connaissance de blocages de la nature de ceux que j’ai évoqués pour la France, mais il n’y a pas en Italie de rencontres pour la conversion des musulmans comme le Forum « Jésus le Messie ». En France, on a chaque année trois ou quatre rencontres de deux jours avec des conférences sur l’annonce de l’Evangile aux musulmans. Je ne connais pas d’équivalent ailleurs en Europe. Il y a bien sûr des initiatives individuelles dans d’autres pays. En Autriche, je connais par exemple un prêtre très dynamique, qui a commencé il y a une quinzaine d’années une œuvre de conversion des musulmans. Lui aussi a eu beaucoup de difficultés avec l’Eglise. Ce prêtre a même créé une revue mensuelle en turc pour aider ces gens dans leur cheminement vers le Christ. Souvent, l’évangélisation tient à une seule personne ou à un tout petit groupe.
 

Qu’en est-il de l’Allemagne ?

 
En Allemagne, cela reste discret. Il y a un travail fait par un jésuite de Francfort, le père Christian Troll. C’était mon compagnon à Rome. Mais lui fait cela par écrit. Il prend des points qui sont discutés des deux côtés. Il donne la position catholique et la position musulmane. Il le fait maintenant en onze langues sur un site Internet extrêmement intéressant et équilibré. Lui-même est un islamologue. Et il y a un mouvement relativement fort de conversions lié à son activité. Francfort est un lieu de passage, où se trouve aussi une faculté de théologie des Jésuites. Christian Troll a tissé des liens amitiés avec d’anciens musulmans turcs convertis qui maintenant le soutiennent.
 

« Il y a aussi une conception de la laïcité en France qui n’est pas toujours laïque, mais plutôt anticatholique ou anti-chrétienne. »

 

On peut donc dire que le point commun de toutes ces initiatives est qu’elles sont individuelles et qu’elles ne sont pas beaucoup soutenues par l’Eglise institutionnelle, n’est-ce pas ?

 
Oui, c’est un fait. Mais la réticence me semble encore plus forte en France que dans d’autres pays comme l’Italie ou l’Allemagne. La France est un peu handicapée à cause de son passé colonial. Elle a mauvaise conscience. Il y a aussi une conception de la laïcité en France qui n’est pas toujours laïque, mais plutôt anticatholique ou anti-chrétienne.
 

Pouvez-vous nous dire quelques mots de la situation en Egypte ? Certains parlent de conversions massives de musulmans au christianisme dans votre pays. Confirmez-vous ?

 
Je n’ai pas personnellement entendu parler de conversions « de masse ». En Egypte, la charia n’est pas appliquée en ce qui concerne la condamnation à mort pour apostasie. Une personne qui quitte l’islam ne doit pas moins rester discrète. Certaines conversions faites publiquement se sont soldées par des peines de prison. En général, ceux qui se convertissent veulent émigrer, et on cherche à les aider à sortir du pays.
 
Il y a aussi quelques musulmans connus qui ont quitté l’islam. Il y en un à Munich qui est extraordinaire, un fils d’imam. Il donne des conférences sur Internet. Il est très docte, parfaitement nourri de toute la tradition islamique qu’il connaît par cœur. Mais lui se dit agnostique et non pas chrétien.
 
Il y a en outre en Egypte des personnalités qui sont contre l’islam tel qu’il est présenté par l’université Al-Azhar et qui le proclament haut et fort.
 
En revanche, j’ai entendu parler d’un fort courant de conversions en Algérie, par le biais des protestants, surtout dans la région berbère, en Kabylie. Un pasteur protestant qui va en prison pour avoir annoncé le Christ aux musulmans continuera son ministère derrière les barreaux. Chez les catholiques, si un prêtre est attaqué, c’est tout de suite mis sur le compte de l’Eglise catholique. C’est aussi pourquoi nous sommes plus timorés que les protestants.
 

« Ce que je trouve regrettable, c’est que, connaissant peu cette religion, le pape François s’aventure à dire des choses sur l’islam. »

 

Quelle est votre réaction aux propos du pape François sur l’islam ?

 
Le pape François ignore le Coran et on ne saurait le lui reprocher. Seulement quand on est ignorant du Coran, il ne faut pas dire des choses sur l’islam. Il ne faut pas dire : « L’islam est une religion de paix », ou « Toutes les religions sont pour la paix ». Ce que je trouve regrettable, c’est que, connaissant peu cette religion, le pape François s’aventure à dire des choses sur l’islam. Ce n’est pas son rôle.
 

Pourquoi ne vous demande-t-il pas votre avis, à vous ou à un autre islamologue ? Il ne doit pas manquer d’islamologues qualifiés à Rome…

 
J’ai demandé que me soit accordé un entretien avec le pape François et j’ai obtenu un rendez-vous au bout de quelques jours. J’ai pu converser avec lui pendant une demi-heure, chez lui dans son bureau à Santa Marta, en toute tranquillité. J’ai essayé de lui dire le plus aimablement possible qu’il fallait faire attention. J’ai compris que lui-même avait connu un imam quand il était en Argentine et que cette connaissance l’a marqué, de manière positive.
 
Mais il m’a surtout expliqué, et je le comprends, que le dialogue était rompu avec Al-Azhar depuis cinq ans. C’est un fait, et contrairement à ce qu’on pense ce n’est pas de la faute de Benoît XVI, même si la rupture a été consécutive à son discours d’accueil des ambassadeurs au Saint-Siège peu après une attaque terroriste contre des églises en Egypte. Benoît XVI avait alors déclaré qu’il faudrait que le président égyptien protège les chrétiens.
 

Le pape François a voulu rétablir le dialogue avec l’université Al-Azhar.

 
L’université Al-Azhar avait très mal pris cela, considérant que le pape se mêlait de ce qui ne le regardait pas et faisait de la politique. C’est Al-Azhar qui a décidé de rompre les relations avec le Vatican. Cela m’a été très clairement dit par le cardinal Tauran. Lui-même a envoyé son second par deux fois à Al-Azhar mais celui-ci n’a pas été reçu. Aujourd’hui, grâce à l’attitude du pape François, les relations ont repris.
 
Cependant, il faudrait qu’il ne s’aventure pas à dire des choses qui n’ont pas été contrôlées. Il y a en fait eu un progrès à l’occasion de sa visite en Egypte. Quand François est venu en Egypte, il n’a pas redit ce qu’il avait déclaré avant sur le fait que « Toutes les religions veulent la paix ». Je pense que c’est parce que ses discours au président et à Al-Azhar avaient été préparés par son entourage.
 
Il faut être très prudent quand on parle des musulmans. Il ne faut pas attaquer inutilement mais il ne faut pas non plus cacher les divergences. Exposer les divergences, ainsi que les points sur lesquels nous sommes d’accord, c’est pour moi le vrai dialogue. Le dialogue, ce n’est pas de céder ou d’attaquer, mais de chercher ensemble un projet qui suppose que l’on signale aussi les points pour lesquels on n’est pas du même avis.
 
Un pape ne peut pas dire les choses que ce pape a dites. Etant à Rome, je suivais quotidiennement ses déclarations.
 

Le texte fondateur de l’islam, à savoir le Coran et, en second lieu, le khabar et le hadith, contiennent la violence.

 
Il y a eu deux ou trois déclarations particulièrement graves du pape François, où il a mis à parité ce qui se passait dans le monde musulman et ce que des chrétiens pouvaient faire. Si l’on compare des personnes, cela peut certes parfois être pire chez les chrétiens que chez les autres. Mais il ne s’agit pas de cela. Le problème, c’est d’abord et avant tout le texte fondateur. Le texte fondateur de l’islam, à savoir le Coran et, en second lieu, le khabar et le hadith, contiennent la violence. Dans la première période de la vie de Mahomet, quand il était à La Mecque, il n’y a pas de violence. Quand il passe à Médine, pour les dix dernières années de sa vie, c’est une étape de conquêtes, et c’est là que la violence apparaît dans le Coran.
 
Or un principe coranique nous dit que, quand il y a contradiction entre deux versets, le dernier verset « révélé » annule celui qui lui est antérieur. C’est la théorie de l’abrogé et de l’abrogeant. C’est ainsi que les versets violents ont annulé les versets tolérants que citeront toujours les musulmans, comme le font l’imam du Caire et d’Al-Azhar.
 

Cette manière de ne citer que les versets tolérants abrogés par des versets violents, c’est ce qu’on appelle la taqiyya ?

 
C’est une forme de taqiyya. Taqiyya, c’est le fait de couvrir, de cacher : je ne mens pas, mais je ne mentionne pas ce qui pourrait être négatif. Je n’ai pas besoin de tout dire, je ne dis que le positif.
 

Malgré cela vous semblez, comme le pape François, plutôt favorable à l’accueil par les Européens de tous ces immigrants qui sont majoritairement musulmans. Quelle doit-être notre attitude face à ce phénomène d’immigration de masse ?

 
Pour accueillir des immigrants, il est indispensable de prévoir tout le cheminement d’accueil. À mon avis, ce qui ne va pas en Europe, c’est qu’on ne tient pas compte de l’aspect le plus important : l’intégration. L’intégration n’est pas une assimilation. Ce n’est pas détruire la personnalité de l’autre. C’est simplement dire : « Ici, nous avons une culture, une tradition. Bonne ou mauvaise, c’est le système que nous avons. »
 

Les conditions d’une intégration réussie des immigrants musulmans

 
La première condition qui doit être posée à un immigrant, c’est l’acceptation par l’étranger de tous les articles de la proclamation des droits de l’homme. Car s’il faut appliquer la charia islamique en Europe, alors c’est fichu ! La charia est une loi bédouine médiévale. La conception du rapport homme-femme dans la charia est une conception de maître à servante. Il n’y a pas d’égalité dans ce domaine dans la loi musulmane, contrairement à ce que dit la charte universelle des droits de l’homme.
 
De même, aucun pays musulman, y compris les plus laïcisés d’entre eux, n’applique le principe d’égalité des religions devant la loi. En Egypte par exemple, on applique aux chrétiens des normes de la charia qui sont injustes. La charia ne doit avoir aucune application en Occident. Et pour bien préparer l’intégration, ce devrait être l’ambassade dans le pays de résidence du migrant qui devrait procéder aux vérifications des candidats à l’immigration. Cela ne doit pas se faire aux frontières. C’est d’ailleurs le système pratiqué par les États-Unis.
 
Une autre chose indispensable, qui est d’ailleurs appliquée dans les pays musulmans, c’est le contrôle des mosquées. Une mosquée n’est pas une église. Au centre de la vie d’une mosquée, il y a le prêche, et notamment le prêche du vendredi. Il faut un contrôle des imams, car parmi ces imams se glissent des fanatiques. C’est à la police de s’assurer qu’un imam n’est pas un fanatique qui va lui-même fanatiser les gens.
 
Par ailleurs, il faut imposer la langue du pays d’accueil pour les prêches. Tout immigré doit apprendre la langue du pays d’accueil, et il n’y a donc pas de raison pour que le prêche de l’imam ne soit pas dans cette langue.
 

Surveiller les mosquées et interdire leur financement depuis l’étranger

 
Un troisième point au sujet des mosquées concerne leur financement. La norme devrait être le financement interne au pays d’accueil. Très souvent le financement se fait par l’Arabie saoudite et les pays de la péninsule arabique. Tout le monde sait bien, y compris dans le monde musulman, qu’il s’agit de pays à tendance radicale et fanatique. L’Arabie finance l’islam dans beaucoup de pays et envoie des imams payés et soutenus par elle. C’est ce qu’elle a fait en Asie, par exemple en Indonésie et même en Chine. Un proverbe italien dit : « Chi paga comanda », qui paye commande.
 
De toute manière, appliquer les principes européens à l’immigré joue en sa faveur. Sa connaissance de la langue du pays d’accueil l’aidera à trouver du travail ; au contraire, l’autoriser à conserver ses propres normes fera de lui un éternel marginal. Les buts de l’immigré risquent alors d’être incompatibles avec ceux de la nation.
 
En Europe, la religion doit rester une question personnelle, même pour les musulmans, tandis que les affaires de l’Etat concernent toute la société. L’immigré doit donc accepter les normes de l’État. Il peut bien sûr rester libre de ses convictions, mais à condition de ne pas s’opposer au système étatique. Le musulman pense souvent que la charia est la norme. Mais la charia est inacceptable pour n’importe quelle personne raisonnable du XXIe siècle.
 
Il faut bien avoir à l’esprit que toutes ces normes que l’on doit imposer à l’immigré ne sont pas destinées à le châtier, mais au contraire à l’aider à bien s’intégrer dans la société. Une personne qui n’est pas intégrée ne sera jamais heureuse. Le fait pour un immigré d’être musulman ne devient un problème que s’il considère que l’islam doit décider de tout ce qu’il fait et comment il le fait. L’islam peut donner au musulman des principes éthiques, mais encore faut-il que ceux-ci soient en accord avec les principes éthiques de la nation.
 
C’est sur ces points que l’Europe a un gros effort à faire.
 

Que pensez-vous de l’attitude des pays du Groupe de Visegrád qui refusent catégoriquement d’accueillir sur leur sol des immigrants arrivés illégalement en Italie et en Grèce ? Parmi les raisons invoquées par ces pays, il y a la crainte d’une immigration musulmane qui pourrait générer chez eux les problèmes observés en Europe occidentale.

 
Il y a dans la masse de ces immigrants des gens qui ne s’intégreront pas, et il y a aussi des extrémistes. L’islam est responsable de cette réaction. Ceux qui disent que l’Etat islamique n’a rien à voir avec l’islam sont des menteurs. Les chefs de l’université Al-Ahzar savent très bien que l’EI applique l’islam dans tous ses détails. Le problème à la base de cette invasion de l’Europe par tous ces gens qui fuient la guerre, c’est la conception totalitaire de l’islam. Un islam qui décide de tout. Il y a tout un cheminement à faire pour l’islam, et il faut aider le monde musulman à faire ce cheminement.
 

« Ceux qui disent que l’État islamique n’a rien à voir avec l’islam sont des menteurs. »

 
Pour revenir à la question de l’accueil des immigrants musulmans dans des pays comme la Pologne, ce pays devrait accepter des immigrants mais en imposant des conditions. Ils doivent par exemple apprendre la langue polonaise avant de s’y installer, et non pas seulement une fois qu’ils y seront.
 
J’ai l’exemple de la petite ville allemande de Riedenburg en Bavière, où je travaille tous les ans, en tant que prêtre, pendant deux mois. Il y a à Riedenburg deux centres d’accueil d’immigrants. L’un d’eux est tout près de l’église, et je leur rends visite régulièrement. Les résidents de ce centre sont pour moitié des Syriens et pour moitié des Africains. Ils sont logés. Les enfants sont scolarisés gratuitement. Il y a des cours de langue allemande pour les adultes assurés par des bénévoles. Ces immigrants sont aidés financièrement, pour pouvoir manger et vivre, et ce premier accueil dure au moins deux ans.
 
En septembre dernier, certains m’ont dit : « Que Dieu bénisse l’Allemagne. Nous n’avons jamais été traités en Syrie aussi bien que nous le sommes ici ». Il y avait une fille de six ans qui me parlait en allemand mieux qu’en arabe. Pour moi c’est un exemple de bonne politique d’intégration.
 

« Il faut dans chaque pays se demander quel nombre d’immigrants on peut accueillir, en tenant compte de ses capacités d’intégration. »

 
L’immigration est une réalité de la vie internationale. Les pays d’immigration doivent toutefois être exigeants sur la langue, et également sur la culture et les usages, tout en aidant les nouveaux immigrés à s’intégrer dans la société. On ne peut bien sûr pas accepter en bloc un million d’immigrants ou plus, comme l’a fait l’Allemagne, de surcroît sans préparation. Je comprends que Mme Merkel ait pu se dire qu’au fond c’était gérable pour un pays de 80 millions d’habitants et qu’en plus l’Allemagne avait besoin de main d’œuvre. Seulement la main d’œuvre qu’on a fait venir dans les années 1970 est arrivée petit à petit, et même dans ce cas l’intégration n’a pas été parfaite.
 

Vous parlez de préparation et d’intégration mais on ne maîtrisera jamais tout, et notamment ce qu’il advient avec les générations suivantes issues de l’immigration. En France, ce sont les nouvelles générations nées en France qui se radicalisent. Ne risquons-nous pas de nous retrouver dans 50 ou 100 ans dans la situation des Coptes d’Egypte ? Ne devrons-nous pas un jour accepter nous-mêmes les normes de l’islam ?

 
Le risque existe, et c’est pour cela qu’il faut se montrer raisonnables. Un pays ne peut pas absorber un nombre illimité d’immigrants. Il faut dans chaque pays se demander quel nombre d’immigrants on peut accueillir, en tenant compte de ses capacités d’intégration. Je vois en Allemagne que l’immigration peut être positive, mais qu’elle n’est pas dénuée de problèmes. Il est vrai que la police doit veiller plus qu’elle ne le faisait avant.
 
Cependant, dire « je les rejette systématiquement, je n’en ai que faire », ce n’est pas humain non plus. Car ces gens ne sont pas responsables de la catastrophe qu’ils vivent. Il faut trouver une solution raisonnable, avec comme principe de base l’obligation pour l’immigrant d’accepter les normes du pays d’accueil. Car sinon l’immigrant sera malheureux et il rendra ses hôtes malheureux.
 
Est-ce que dans un siècle les pays européens seront majoritairement musulmans ? Oui, si vous êtes bêtes, si vous faites des choses irrationnelles. Mais si vous agissez après mûre réflexion, en tenant compte du bien des autochtones comme des immigrés, alors cela peut devenir un enrichissement pour tous !
 

Propos recueillis par Olivier Bault