Des étudiants de l’université d’Oxford ont des lacunes en orthographe, des difficultés d’expression et un désolant manque de bon sens

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Oxford est une université d’élite – l’une des meilleures au monde – au recrutement soigné. Mais la prestigieuse maison britannique est frappée elle aussi par le décervelage généralisé : des professeurs – les « Dons », comme on les appelle en Angleterre – ont publié un rapport évoquant le manque de « bon sens », les difficultés d’expression et les lacunes en orthographe de nombre de leurs étudiants. Et si ceux d’Oxford affichent ce genre de défauts, on ose à peine imaginer le niveau dans des universités moins renommées…
 
Le manque de réflexion est peut-être le pire des symptômes relevés par les professeurs entre 2010 et 2014. Lors d’un examen de jurisprudence, des étudiants en droit – on ne parle pas d’un cas isolé – ont « de manière répétée informé les examinateurs du fait que la pluie constitue une utilisation “extraordinaire, non naturelle, dangereuse” de la terre [sic] par son propriétaire », tout comme « les arbres », les « dépôts de limon » et les « fossés de drainage », tandis que la mise en pâture de vaches sur les terres agricoles en constitue un usage « hypersensible et non naturel ».
 

Les étudiants de droit d’Oxford manquent étonnamment de bons sens

 
Ce « manque du bon sens de base dont tout juriste devrait être doué » était au nombre des « erreurs les plus communes » relevées dans les copies. Ce constat désolé des professeurs ne s’intéresse pas aux causes de telles incohérences mais il n’est pas interdit d’y voir une incapacité à réfléchir, de lire et d’écrire de manière consciente… qui est la marque des pédagogies globales qui ont cours dans tant de pays du monde.
 
Que ce soit en sociologie, psychologie, en langues ou en droit – matières « littéraires » par excellence – nombre d’étudiants ont montré leur « difficultés d’expression à l’écrit », avec une « faible maîtrise de la grammaire et de la syntaxe » et surtout une propension à écrire comme s’ils parlaient « au bistrot avec les potes ». « En général il y avait bien trop de baratin du genre “café du commerce” et dans certains cas, des indices exceptionnellement maigres du fait que le candidat avait effectivement lu quoi que ce soit en rapport avec son cours », se lamente le professeur de sociologie, Colin Mills.
 

Aux lacunes en orthographe s’ajoutent la difficulté à mettre la pensée en paroles

 
Il se dit troublé de lire des copies « qui auraient bien pu être écrites par une personne entrée par hasard dans Schools (la grande salle des examens d’Oxford) depuis la rue, sans la moindre connaissance des cours et des travaux dirigés ».
 
Bien sûr, souligne le professeur, il a eu d’excellents étudiants et même d’excellentes promotions au cours des ans, mais le fait que le pire soit possible dans une université comme Oxford en dit long sur la situation.
 
Si certains travaux étaient d’une telle « excellence » qu’elle a mérité la publication dans des journaux académiques, d’autres ont été jugés « déprimants » de nullité. Telle cette copie d’allemand qui se lisait comme une « transcription du cuisinier suédois du Muppet Show ». « Le test, à mon avis, était d’un niveau approprié, mais ce qu’il a révélé est déprimant », commente le professeur de la discipline : « A mon sens, il y a eu une baisse de niveau significative depuis la dernière fois que j’ai eu à le noter. »
 
Les erreurs d’orthographe sont nombreuses, tel le mot « Méditerranée » mal orthographié dans de nombreuses copies « malgré son origine latine » et le fait qu’il était présent, correctement écrit, dans l’énoncé. Mais la difficulté d’« exprimer ses pensées par écrit » est plus grave, et affecte un « nombre déconcertant » d’étudiants, selon un professeur de psychologie.
 

La réaction de l’université d’Oxford

 
Même à l’université d’Oxford, les difficultés d’expression contemporaines se sont installées.
 
Un porte-parole de l’université d’Oxford a déclaré : « Une minorité de commentaires hauts en couleurs par les examinateurs assure une lecture intéressante, mais ils ne sont pas le reflet de l’opinion de la majorité des examinateurs d’Oxford ni la compétence académique de la majorité des étudiants. » Et une étudiante en allemand, Alice King, 20 ans, assure que les professeurs se sont saisis de « l’une des trop rares occasions où ils peuvent démontrer qu’ils ont bien un sens de l’humour, qui fait partie du “package” complété par un savoir encyclopédique et des attentes sans pitié ».
 
Il n’empêche. Les étudiants d’Oxford sont supposés être la « crème » des universitaires. Même un cancre serait de trop. En l’occurrence, on a plutôt à faire à un symptôme d’une situation qui se généralise, de l’avis de tant de professeurs de tous les niveaux : les jeunes peuvent atterrir dans l’enseignement supérieur avec des lacunes qui semblent impossibles à combler.
 

Anne Dolhein