Face aux critiques qui se multiplient à l’occasion de la vente d’avions de combat Rafale à l’Egypte, un pays pas suffisamment démocratique, Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères a objecté dimanche que cette vente était un gage pour la stabilité du pays et de toute la région.
Responsables politiques et défenseurs des droits de l’homme se sont élevés depuis la conclusion de cet accord commercial de vente d’avions de combat à l’Egypte du président Abdel Fattah al Sissi dont ils dénoncent le caractère répressif et craignent l’instabilité.
Interrogé dimanche à ce sujet à l’occasion du Grand Jury Europe 1-Le Monde-iTELE, Laurent Fabius a répondu que ces questions étaient généralement abordées en privé, mais souligné avec force que la stabilité du pays et de la région avait primé dans la négociation du contrat. « La stabilité de l’Egypte est un point très important, a-t-il affirmé. Il faut bien comprendre que l’Egypte, c’est le grand pays de l’ensemble de la zone arabe avec évidemment, selon que les choses fonctionnent ou pas, des conséquences sur la stabilité dans l’affaire israélo-palestinienne, dans la question syrienne, dans la question libyenne, etc. »
L’Egypte a besoin des Rafale
Et de conclure qu’« il faut donc que l’Egypte ait les moyens de permettre cette stabilité, cette sécurité, et c’est pour ça que cette affaire a été négociée ».
Le propos est pour le moins spécieux : à ceux qui s’inquiètent que l’on puisse fournir des avions de combats à de gens qui pourraient en faire n’importe quoi, Laurent Fabius répond que, bien au contraire, cela leur permettra de renforcer leur stabilité.
Nul doute que sa collègue à la Justice, Christiane Taubira, utilise un jour cet argument pour vider davantage encore les prisons de ce qu’elles peuvent contenir de criminels…
Sans compter que les questions d’argent paraissent toujours beaucoup plus importantes, beaucoup plus sérieuses que les autres !
Laurent Fabius défend la vente d’avions de combat et la démocratie
Cela dit, et pour en revenir à l’Egypte, cette déclaration justifie clairement que l’on laisse la démocratie – où ce qu’on appelle telle… – sous le boisseau, c’est-à-dire pour les discussions privées. Il va de soi que permettre au Caire de renforcer le caractère répressif de son gouvernement en lui fournissant des avions de combat dernier cri ne permet guère de discuter démocratie dans le même temps. Même si Laurent Fabius affirme trouver cette question « légitime »…
« Ça ne veut pas dire, parce que nous vendons ces Rafale à l’Egypte, que nous approuvons point par point tout ce qui est fait en politique intérieure », poursuit-il. « Quand il y a des excès qui sont commis, nous le disons aux autorités égyptiennes et nous souhaitons que peu à peu on aille vers plus de démocratie. »
Mais, précisément, la démocratie, en Europe, a l’humeur guerrière. Elle tente de s’imposer un peu partout en Europe par la force des armes. Et l’Égypte participe aux bombardements contre l’Etat islamique, qui sont certainement, si l’on suit la rhétorique de Laurent Fabius, des bombardements « démocratiques ».
En attendant, le contrat annoncé jeudi et portant sur la vente de 24 Rafale, ainsi que d’une frégate multimissions et de missiles, devait être signé ce lundi au Caire par le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian.