La Grèce, Tsipras, et la crise de la démocratie

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Le premier ministre grec Alexis Tsipras a obtenu, aux premières heures de la journée samedi, le soutien de la Vouli, le Parlement monocaméral grec, à son programme de réformes accepté par les créanciers internationaux du pays dans le but d’obtenir de nouvelles aides, constituant donc un nouveau plan de sauvetage. Mais cela n’a pu être possible qu’avec le vote de l’opposition, une partie des députés de Syriza, la propre formation d’Alexis Tsipras s’étant opposé à voter « oui », moins d’une semaine après avoir voté « non ». Le « oui » obtenu grâce au « non » est une nouvelle étape de la crise de la démocratie.
 
Le premier ministre grec, avec le soutien tout à la fois de son Parlement et des responsables de la Communauté européenne, de la Banque Centrale européenne et du FMI, se trouve donc conforté dans sa position, qui n’en reste pas moins délicate. Les experts des différents créanciers susnommés ont ainsi chiffré à 74 milliards d’euros les besoins financiers de son pays pour faire face à ses obligations. Mais Alexis Tsipras s’est offert le luxe, en quelque sorte, de ne demander « que » 53,5 milliards d’euros, échelonnés sur les trois prochaines années.
 

La Grèce de Tsipras

 
La Vouli a donné au premier ministre une majorité importante : 251 voix sur 300, qui lui permet de discuter de la possibilité, et peut-être des termes, d’un nouvelle accord, c’est-à-dire d’un nouveau plan de sauvetage – ce qui semble signifier que le précédent n’a rien sauvé du tout.
 
« Le Parlement a aujourd’hui donné un mandat clair au gouvernement pour mener à bien les négociations et parvenir avec ses partenaires à un accord économiquement viable et socialement juste », a-t-il ainsi déclaré à l’issue du vote de la Vouli. « La priorité maintenant est d’avoir une issue positive aux négociations », a-t-il poursuivi, en assurant que « le reste » adviendrait ensuite. Il faut bien essayer de faire rêver encore le pauvre peuple qui commence à comprendre qu’il s’est fait flouer dimanche dernier.
 
Impossible de dire, pour l’heure, quelle forme prendra cet accord, ni s’il comprendra effectivement une restructuration de la dette actuelle de la Grèce.
 

La Grèce des Grecs

 
Ce qui est sûr, c’est que, malgré le vote positif de la Vouli, la situation d’Alexis Tsipras est devenue très délicate. Obtenir l’accord du Parlement grâce aux voix de l’opposition, et contre l’avis de ses partisans – ou du moins d’une grande majorité d’entre eux – augure mal de son avenir politique en Grèce.
Cinq membres importants de Syriza ont ainsi signé une lettre pour dire qu’une sortie de la zone euro et un retour à la drachme étaient préférables à tout accord, c’est-à-dire à une nouvelle cure d’austérité sans perspective réelle de réduction de la dette.
 

La crise de la démocratie

 
De fait, le gouvernement – comme sa majorité – apparaît de plus en plus divisé. Le ministre de l’Energie, Panagiotis Lafazanis, le vice-ministre du Travail, Dimitris Stratoulis et la présidente du Parlement, Zoé Constantopoulou, se sont abstenus. « Le gouvernement fait l’objet d’un chantage total pour qu’il consente à quelque chose qui ne reflète pas ce qu’il représente », a clairement déclaré cette dernière.
 
Quant au peuple, il a repris le chemin de la rue…
 
Le berceau grec de la démocratie semble donc bien près d’exploser. Disons du moins que la démocratie se trouve en pleine crise. A moins, comme l’affirment de plus en plus nettement certains responsables politiques, tel Jean-Claude Juncker défendant les traités européens au début de l’année, qu’elle n’affirme pleinement sa réelle nature qu’en se débarrassant du pesant fardeau que constitue la volonté populaire…
 

François le Luc