Quand Anne Hidalgo quittera son fauteuil de maire de Paris en 2026, un certain parfum d’absurde manquera à ses administrés. Sa dernière initiative défie en effet l’imagination. Lorsqu’il acheva sa tour en 1889 pour l’exposition universelle et le centième anniversaire de la Révolution française, Gustave Eiffel fit peindre, au premier étage, 72 noms d’ingénieurs, industriels et scientifiques français qui avaient selon lui bien mérité de la République. Pour l’infatigable championne du progressisme arc-en-ciel qu’est Anne Hidalgo, c’est une terrible « injustice » : il n’y a que des hommes. Elle a donc nommé une commission de quinze experts afin d’y adjoindre des noms de femmes. Comme toutes les commissions, celle-ci se pose des tas de question, et pour commencer les architectes du bâtiment et la Drac se demandent ce qu’il est légal de faire sur une tour classée monument historique. Surtout, si la question du pour quoi est vite réglée (« pour tendre vers la parité »), la question du comment est bien plus complexe : entre 1789 et 1889, les industrielles, scientifiques et ingénieurs femmes ne courraient pas les rues. C’est là que le concept hidalguien de féminisme commémoratif est proprement révolutionnaire : il entend faire valoir l’utopie sur la réalité historique. Dans le même ordre d’idées, elle devrait changer les noms de généraux sur l’arc-de-triomphe, faire enterrer sous la flamme une soldate inconnue, et ajouter le nom d’un million trois cent mille femmes sur les monuments aux morts de la Grande guerre.