2021, 2036, 2053… Ces jalons ont été déterminés par une équipe de chercheurs des universités d’Oxford et de Yale. Ils marquent le moment précis où l’intelligence artificielle sera supposée, via des robots, remplacer les humains pour diverses tâches. 352 chercheurs en IA ont ainsi été interrogés sur le calendrier des progrès de l’intelligence artificielle ainsi que sur les impacts sociaux et éthiques engendrés, car la « transition » apportera de nouveaux défis – ou de nouvelles impasses. Et quand estiment-ils qu’aura lieu l’émergence de la première intelligence artificielle au niveau humain (human-level machine intelligence ou HLMI) ? En moyenne, dans 45 ans.
« The machines are coming »… dit un clip du World Economic Forum.
Toutes les tâches des humains potentiellement automatisables d’ici 2061
Globalement, les chercheurs pensent que le domaine de l’apprentissage automatique s’est accéléré ces dernières années et qu’il s’accélérera encore.
L’enquêteur principal Katja Grace et ses collègues ont découvert que les tâches les plus susceptibles d’être automatisées au cours des dix prochaines années étaient des tâches mécaniques. Selon les réponses des chercheurs, la traduction du langage pourrait dépasser les performances humaines d’ici 2024, et les robots pourraient être en mesure de rédiger de meilleurs essais de niveau secondaire que les humains en 2026.
Pour écrire un best-seller du New York Times, il faudra attendre 2048. Des tâches plus complexes et plus créatives, telles que la rédaction de livres et l’exécution de mathématiques de haut niveau, prendront plus de temps.
Quant à l’émergence de l’intelligence machine de haut niveau (HLMI), lorsque des machines sans assistance pourront accomplir chaque tâche mieux et à moindre coût que les travailleurs humains, les chercheurs l’estiment possible, en moyenne, d’ici quarante-cinq ans. C’est-à-dire que l’IA pourrait avoir automatisé toutes les tâches humaines simples d’ici 2061.
Les robots auront envahi toutes les professions d’ici 122 ans
Les prévisions pour une automatisation complète du travail (c’est-à-dire lorsque toutes les professions sont entièrement automatisées) sont beaucoup plus tardives que pour l’intelligence machine de haut niveau : selon la moyenne des réponses du sondage, l’IA pourrait avoir occupé tous les emplois humains d’ici 2140, c’est-à-dire d’ici 122 ans (mais 10 % quand même la situent dans 20 ans !)
« Les progrès de l’intelligence artificielle (…) transformeront la vie moderne en remodelant les transports, la santé, les sciences, les finances et l’armée, ont écrit les chercheurs. Ces résultats alimenteront les discussions entre chercheurs et décideurs politiques sur l’anticipation et la gestion des tendances en matière d’intelligence artificielle. »
Quant à l’explosion de l’IA après l’avènement de la première intelligence artificielle au niveau humain, cette accélération fondamentale de la supériorité des machines sur l’homme, annonçant la singularité technologique, les chercheurs la voient possible, mais aussi et surtout improbable. « Les conséquences pour l’humanité seraient cataclysmiques », a déjà averti le professeur de robotique cognitive Murray Shanahan, dans son dernier ouvrage.
L’IA va exploser : + 37,3 % de dépenses mondiales sur les cinq prochaines années
Détail étonnant : les niveaux de prévisions, dans cette étude, diffèrent selon les continents. Par exemple, les Asiatiques voient survenir l’HLMI dans 30 ans, tandis que les Nord-Américains la voient plutôt advenir dans 74 ans. A croire que le vieux monde occidental se refuse inconsciemment à ce prochain grand remplacement… ou que le continent asiatique se rue trop en avant dans cette nouvelle ère où il a des chances de posséder une place de choix.
Mais, en moyenne, tous pensent que les impacts de cette IA, en pleine élaboration, seront positifs. 10 % des répondants, seulement, pensent qu’ils pourront donner mauvais résultats, 5 % de très mauvais résultats, comme l’extinction de l’humanité par exemple… Moins de la moitié pensent que la recherche sur la réduction des risques que pourraient comporter l’IA devrait être considérée comme prioritaire.
C’est une machine de guerre qui s’est mise en branle. Au sens figuré comme au sens propre : le journal en ligne Deutsche Wirtschafts Nachrichten s’est dit persuadé, il y a quelques jours, que la Troisième guerre mondiale ne sera pas une confrontation entre des armées humaines, mais entre des systèmes de combat hautement technologiques…
Rappelons que l’International Data Corporation (IDC) prévoit une forte augmentation des dépenses mondiales en systèmes d’intelligence artificielle et cognitive au cours des prochaines années. S’établissant autour de 24 milliards de dollars cette année, elles devraient atteindre 77,6 milliards de dollars en 2022, avec donc un taux annuel de + 37,3 % sur la période 2017-2022.