Inceste entre adultes consentants : les nouvelles formes possibles du sexe post-moderne ?

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Médiatiquement autant que politiquement, l’inceste prend des airs moins farouches, moins horribles, moins tabous. Évidemment, on stigmatise de plus en plus le mal, effrayant, fait aux enfant et on ne peut qu’encourager cette lutte. Mais de l’autre côté, on déculpabilise peu à peu la « version » adulte : l’inceste entre majeurs consentants. Il pourrait même être le lieu d’expériences sexuelles et affectives hors norme – et le mot est approprié. C’est ce que nous vend un récent article du magazine en ligne féminin très tendance, Cosmopolitan.com. Un long papier qui nous dessine les contours séduisants de l’histoire, factice ou pas, d’une femme mariée vivant une folle relation sexuelle et « amoureuse » avec son demi-frère découvert et rencontré sur le tard.
 
Un cas typique d’« attraction sexuelle génétique » (Genetic Sexual Attraction ») qui offre de nouvelles et malheureuses perspectives au renouvellement moderne du sexe en cours…
 

Inceste : une « attraction sexuelle écrasante »

 
« Défiant les lois et les tabous sociétaux, un couple partage leur lien indéniable »… Cosmopolitan évoque donc le cas de Melissa et de Brian. A 40 ans, Melissa découvre qu’elle n’est pas enfant unique, car le père qui l’a élevée et reconnue sur son certificat de naissance, n’est pas son père biologique – sa mère avait eu une liaison avant sa naissance.
 
De fil en aiguille, via les réseaux sociaux, on lui apprend que Brian, 45 ans, est un de ses demi-frères, qui la contacte par Facebook, puis l’appelle : Melissa se souvient avoir eu une réaction immédiate et intense à l’écoute de sa voix, « Je ne sais pas vraiment comment décrire le sentiment, mais j’étais vraiment attiré par ça. » Bien que cette impression la gêne déjà. Autant qu’elle gêne Brian, marié lui aussi, qui éprouve les mêmes sensations.
 
A leur rencontre, « Ce fut le coup de foudre, absolument la chose la plus folle que j’ai jamais vécue » confie Melissa. « Tout ce qui est en vous ne fait que vibrer, vos cellules savent que c’est votre personne » explique Brian. Et la relation devint très vite charnelle – Melissa évoque une « attraction sexuelle écrasante ».
 

Le sens de l’histoire scientifique ?

 
RiTV a déjà évoqué cette « genetic sexual attraction » (GSA), sous la plume d’Anne Dolhein, cette attirance sexuelle susceptible d’être ressentie, réciproquement ou non, entre personnes génétiquement proches à la faveur de retrouvailles tardives succédant à une longue séparation depuis la naissance ou la petite enfance.
 
Un attrait encore difficile à expliquer. Le fait de posséder des gènes en commun crée souvent une attirance : « Les gènes ont tendance à modeler nos préférences, nos talents et nos attitudes – et la familiarité réconfortealors nous cherchons quelqu’un de semblable », explique le professeur Lieberman de l’Université de Miami. C’est le fait de vivre ensemble qui, sans doute, nous désensibiliserait.
Dans les réunions d’adoption tardives, 50 % des protagonistes parlent d’attraction sexuelle. Une attraction qui demeure profondément perturbante : Barbara Gonyo qui a inventé le terme dans les années 1980, après avoir éprouvé une attirance pour le fils adulte qu’elle avait placé bébé pour l’adoption, a mis plus d’une décennie à s’en débarrasser.
 
Et le souci est que ces cas tendent évidemment à se voir de plus en plus répétés, avec la multiplication des manipulations génétiques tout azimuts : lorsque l’adoption et les traitements de fertilité impliquant donations de sperme, d’ovule et les dons d’embryons augmentent, le nombre de les gens qui se promènent sans savoir qu’ils sont génétiquement liés augmentent aussi logiquement. Les incestes seront même involontaires !
 
Au final, donc, c’est le sens de l’histoire scientifique…Cet amour ne devrait pas être interdit.
 

L’inceste – une énième expérimentation pour des adultes consentants

 
Et Cosmopolitan sert cette idée, en s’attachant à développer cette relation sulfureuse. Même si l’article admet qu’elle bouleverse quelque peu leur situation respective (divorce, choc des enfants, animosité familiale), il insiste lourdement sur le côté « exceptionnel » de cette relation sexuelle et émotionnelle, « une tempête parfaite, un mélange idéal que la plupart des gens ne connaissent pas » : « Peu d’êtres humains peuvent expérimenter quelque chose à ce niveau, et ce n’est pas un tabou, ce n’est pas un problème, c’est juste l’amour, l’amour parfait » dit Brian – difficile de croire que l’histoire n’a pas été savamment conçue.
 
Après tout, l’inceste fut prohibé dans toutes les civilisations par protection contre les mutations génétiques et les risques de maladie… Le sexe s’étant en partie séparé de la procréation, par l’avortement et la contraception, on ne voit pas pourquoi, mené entre adultes parents consentants, il resterait un tabou. C’est une expérimentation comme une autre – la série « Game of Thrones » le montre particulièrement, qui fait de l’inceste une normalité flagrante. Et l’arsenal juridique se mettra peu à peu au diapason – avec la loi du 14 mars 2016 sur la protection de l’enfance, la France a peut-être interdit officiellement l’inceste, mais seulement aux mineurs.
 
Tout peut avoir lieu du moment qu’on s’éloigne de la relation hétérosexuelle et monogame… D’ailleurs, les commentateurs de l’annonce de l’article sur le compte Twitter du magazine, ne s’y trompent pas : « Quelle est la prochaine étape ? La zoophilie ? » Toutes ces « amours » nouvelles que le vent du monde souffle à notre oreille, seront vues comme une régénération de notre rapport charnel à… nous-mêmes.
 

Clémentine Jallais