La morphopsychologie pourrait bien se faire gratifier d’un statut de science exacte si les revendications d’une équipe de chercheurs de Shanghai sont exactes. L’équipe chinoise de l’université Jiaotong affirme avoir mis au point un logiciel d’intelligence artificielle (AI) capable de dire si une femme a des traits de caractère positifs ou négatifs après analyse d’une simple photo. Caractère, personnalité, vertu, tout serait quantifiable. Mieux, le logiciel d’AI serait capable de déterminer si une personne est un criminel.
Selon Wu Xiaolin, Zhang Xi et Liu Chang, leur logiciel permet d’emblée de placer une femme dans l’une de deux grandes catégories : la catégorie positive associée aux mots « pure », « attachante », « élégante » « douce », « innocente », et la catégorie négative associée aux mots « prétentieuse », « pompeuse », « coquette », « orgueilleuse ».
L’intelligence artificielle évalue le caractère des femmes d’après des critères chinois
L’équipe a travaillé sur près de 4.000 images de jeunes femmes récupérées sur Internet pour les classer selon les différentes catégories retenues avant d’en soumettre 80 % à un réseau neural convolutionnel. 10 % des images ont ensuite été utilisés pour vérifier le logiciel, et les 10 % restantes lui ont été soumis pour qu’il se charge lui-même de les classer par catégorie. Avec succès, assurent les chercheurs.
La part de subjectivisme de l’affaire est importante. Ils ont retenu, pour les classifications d’origine, « la préférence esthétique et les jugements de valeur prévalant parmi les jeunes hommes en Chine contemporaine » : il s’agit en quelque sorte de canons de la beauté et de perception commune de la vertu, fondée d’ailleurs sur une seule image choisie par l’intéressée qui peut avoir voulu mettre en avant une expression particulière peu significative de son allure habituelle réelle.
Ce sont encore les chercheurs qui ont caractérisé chaque image pour alimenter le programme d’intelligence artificielle, évidemment d’après leur propre perception du caractère aimable, attachant, prétentieux ou excessivement coquet qui s’en dégage.
En cela, on peut dire que leur logiciel d’intelligence artificielle est tout sauf intelligent : il ne fait qu’analyser matériellement des images conformément aux directives d’êtres humains.
L’AI se penche sur la personnalité et la criminalité analysées sur photo
On peut s’amuser du temps et de l’argent investi dans une telle entreprise universitaire : tout cela rend compte certainement de l’astuce des chercheurs qui ont su faire subventionner une gigantesque opération de concours de beauté dont ils étaient les juges sans appel. Peut-être pourront-ils un jour vendre leur logiciel à un site de rencontres, pour aider les jeunes hommes dans leur recherche de la femme idéale. Ou les jeune femmes, pour qu’elle s’arrangent le portrait de manière à maximiser leurs chances sur la foi d’une allure aussi vertueuse que gentille…
Mais là où l’affaire devient plus inquiétante, c’est lorsque la même équipe prétend avoir mis au point un logiciel qui permet de débusquer les criminels, ou à tout les moins des personnes aux traits criminels. La superstition des chiffres, de la science et de sa prétendue infaillibilité finira bien par rejaillir sur l’intelligence artificielle et c’est elle qui demain pourrait bien prétendre juger les hommes.
Si l’âme et le corps ne font qu’un, si la matière exprime en quelque sorte l’esprit, le calcul ne saurait rendre compte du mystère et de l’histoire de chaque homme.