En Italie, l’autorisation de chasser le sanglier à l’arc donne des boutons à certains

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Ils sont de plus en plus nombreux et n’hésitent pas à sortir des sentiers forestiers pour se risquer dans les rues des villes à la recherche de poubelles renversées ou de déchets tentants. Les sangliers ont tellement proliféré en Ligurie que la province italienne a décidé d’autoriser les gens à les chasser avec arc et flèches. Un retour évident à la barbarie « médiévale » pour les défenseurs des droits des animaux qui n’ont pas hésité à manifester en Italie ! Peu importe que les risques de peste porcine ou les dégâts sur les récoltes soient les justes raisons d’une telle décision, au demeurant de peu d’effet si l’on avise le taux de bêtes abattues de cette noble manière…

Ou comment un combat idéologique peut être à ce point dépourvu de sens….

 

La chasse, principal moyen de régulation des sangliers

En Lombardie, en 2019, la région avait présenté semblable proposition : les fusils ne suffisaient plus à réguler la population de porcs sauvages. Et aujourd’hui, 15 des 20 régions italiennes l’autorisent. Ce qui devrait être un non sujet redevient un cheval de bataille.

Près de 90.000 personnes ont signé une pétition en ligne contre la chasse à l’arc et aux flèches, qualifiant cette pratique de « barbarie médiévale qui n’est pas digne d’un pays civilisé ». Si la civilisation tient à la poudre…

« La chasse est violente et anachronique », s’est exclamée la porte-parole de la Ligue italienne de défense des animaux. Celle-ci la qualifie de « cruelle » et argue qu’il est presque impossible de tuer un sanglier avec une flèche alors qu’il court à travers la forêt ou les broussailles : un « massacre gratuit » inéluctable, avec des « souffrances atroces ». La chasse à l’arc est pourtant une chasse de laquelle on rentre souvent bredouille… et il serait judicieux de donner le nombre d’animaux blessés par balle.

D’autre part, ce serait un danger pour les randonneurs et les promeneurs de chiens dans les bois. Mais entre le fusil qui peut se tenir jusqu’à 400 mètres de sa cible, et l’arc qui nécessite d’être à moins de 100 mètres et, le plus souvent, à moins de 25 mètres, on peut légitimement en douter.

 

Une loi en raison d’une « urgence liée à la peste porcine » qui menace l’Italie

Comme dans beaucoup de pays européens, le nombre de chasseurs a diminué en Italie – et les traditions se perdent. Les hommes plus âgés prennent leur retraite ou meurent et les jeunes générations refusent de prendre les armes. En Ligurie, qui englobe le port de Gênes ainsi qu’un arrière-pays accidenté de montagnes et de vallées, le nombre de chasseurs est passé de 20.000, il y a dix ans, à 14.000.

Les sangliers, eux, sont passés, dans toute l’Italie, à plus de 2 millions d’individus, selon la Coldiretti, l’association agricole nationale. Et ils empiètent à présent sur des villes comme Gênes, Rome et Milan, attirés par les déchets non collectés et le gaspillage alimentaire. La disparition progressive de leurs prédateurs naturels et la disponibilité accrue de nourriture leur ont permis de prospérer.

Pour les régions, les conséquences sont multiples. Les sangliers sont porteurs de plusieurs maladies transmissibles à l’homme ou aux autres animaux domestiques. Et c’est la grande crainte actuelle des autorités italiennes, en pleine urgence de peste porcine : devoir faire face à une crise sanitaire, abattre leur élevage porcin…

Côté cultures, ce n’est pas mieux. Un rapport, publié plus tôt cette année, a révélé que les sangliers avaient causé 120 millions d’euros de dégâts à l’agriculture italienne au cours des sept dernières années. En fouillant le sol pour trouver de la nourriture, ils causent des dommages importants aux cultures, réduisant ainsi les rendements, engendrant des pertes économiques pour les agriculteurs, et perturbent l’écosystème local.

Pour ces seules raisons, les sangliers sont devenus de véritables nuisibles. L’un dans l’autre, on se plaît à imaginer ces défenseurs invétérés des animaux, mourant de faim, en regardant amoureusement des sangliers contaminés les charger… Quel tableau d’une modernité effroyable.

 

La chasse à l’arc : la manière ancienne

Quant à la discipline, comment la dénigrer ainsi ? Il semble qu’on doive aduler toutes les pratiques des peuples autochtones, mais qu’on punisse les Occidentaux dès lors qu’il se mettent en tête de les pratiquer, quand bien même leurs nobles ancêtres faisaient de même…

Usitée pendant des milliers d’années, la chasse à l’arc est exigeante et respectueuse de l’environnement, qui plus est. Elle engendre un rapport plus étroit avec la nature, obligeant son fidèle à l’attente, au silence, au contrôle, le confrontant, plus souvent qu’avec l’usage du fusil, à l’échec, le prélèvement étant plus rare.

Mais cette immersion dans la nature, ce retour aux sources originelles, ne fait pas partie des codes écologistes modernes qui tournent à l’acharnement stupide. Trop peu s’en rendent compte.

 

Clémentine Jallais