On parle beaucoup de la Grande-Bretagne et de son risque de Brexit. Ou des pays du groupe de Visegrad, et de leurs piques à l’encontre de Bruxelles. Mais il est un autre pays où l’Union européenne est de moins en moins en odeur de sainteté : c’est l’Italie. Depuis des mois, à Rome, le chef du gouvernement Matteo Renzi donne de la voix contre Bruxelles, convaincu qu’il est que l’Europe de Maastricht et de Lisbonne est en train de mourir…
Matteo Renzi n’y a pas été par quatre chemins. Appelant à une réforme urgente non seulement des institutions européennes, mais de l’Union elle-même, le chef du gouvernement italien a lancé à l’agence Bloomberg : « L’Union européenne est comme l’orchestre jouant sur le Titanic. » Avant d’ajouter, en s’appuyant sur la situation de son pays : « Nous avons fait des réformes et nous sommes en mesure de dire à nos partenaires européens : “Les amis, nous pouvons changer cette approche bureaucratique erronée.” »
L’Italie contre l’Union européenne ?
Pour autant, l’actuel locataire du palais Chigi ne veut pas apparaître comme un adversaire de Bruxelles, encore moins, comme on l’a aussitôt dénoncé en France, comme quelqu’un qui « n’aime pas » l’Union européenne. Ainsi, mardi soir, son ministre des Affaires étrangères, Paolo Gentiloni, avait-il invité à Rome ses collègues (y compris donc le sortant Fabius) des cinq autres pays fondateurs de la Communauté européenne, ancêtre de l’Union européenne, pour réfléchir ensemble au moyen de relancer un projet européen dont leurs pays ont été les pionniers.
Mais il n’est pas sûr que ces six personnages aient bien compris la situation. En effet, bien que se disant « préoccupés » par la situation actuelle, ils ont conclu en affirmant : « Nous restons résolus à continuer le processus de création d’une union toujours plus étroite entre les peuples d’Europe. »
On prend les mêmes… problèmes, et on continue, en quelque sorte.
Il est vrai que, dans le même temps, la Commission européenne exhortait les Etats-membres à concrétiser leurs promesses, afin de faire face à une crise qui paraître s’aggraver d’heure en heure.
Matteo Renzi donne de la voix…
Ce qu’elle semble oublier, c’est que lesdits Etats-membres n’ont fait, pour la plupart, de promesses que sous la pression, déjà, de ladite Commission.
Matteo Renzi, qui ne cesse donc de croiser le fer avec le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, se trouve, lui, conforté dans sa position par une opinion publique italienne, qui, pourtant longtemps très favorable à l’intégration européenne, la rejette aujourd’hui de plus en plus. Il est loin le temps où les murs de Rome se couvraient d’affiches invitant les Italiens à appeler leurs amis français pour les faire voter « oui » au referendum sur le projet de Constitution européenne…
Il faut dire que, depuis, l’Italie lutte contre une crise qui va s’accroissant et une croissance en berne.
Il en est donc de Matteo Renzi comme de David Cameron. Agir, changer deviennent une nécessité. « Le moment est arrivé d’ouvrir un débat sur comment fonctionne l’Union européenne aujourd’hui et comment elle pourrait mieux fonctionner », affirme le secrétaire d’Etat italien aux Affaires européennes, Sandro Gozi.
Il est effectivement temps ! L’an prochain, l’Europe fêtera ses soixante ans – depuis la signature du traité de Rome. En l’état actuel, la cérémonie s’annonce morose…