François Bayrou est l’un des plus vieux briscards de la politique encore en activité. Elu pour la première fois au conseil général des Pyrénées atlantiques en 1982 (dont il sera président pendant neuf ans) et député en 1986, ancien député européen, président de plusieurs partis centristes successifs (UDF, qu’il a chipée à Giscard, CDS, PDE, Modem), maire de Pau, il a été quatre ans ministre de l’Education nationale, Mitterrand étant président et Chirac Premier ministre et un mois Garde des Sceaux Macron étant président et Philippe Premier ministre. Bref, c’est l’archétype du politicien centriste qui attend des fluctuations entre droite et gauche la possibilité de jouer les appoints nécessaires et d’exercer ainsi son influence. Il a exercé celle-ci au profit de Macron en 2017, en a été récompensé par un ministère qu’il a dû quitter au bout d’un mois à cause de l’affaire des assistants parlementaires au parlement européen, pour laquelle il vient d’être blanchi. Il a espéré entrer au gouvernement à l’occasion du remaniement en cours mais les choses ne se sont pas passées comme il le souhaitait et il a claqué la porte. Il a déclaré à ses amis du Modem lors d’un dîner le 7 février que l’entrée de personnalités de droite (on pense à Rachida Dati) était « une démarche d’humiliation qu’on nous impose », ajoutant : « Ce qui se joue là est plus profond que d’habitude. Plus ça avance, plus je vois s’éloigner l’idéal d’un rapprochement entre gouvernants et gouvernés. » Il a même parlé du « gouffre qui s’est creusé entre la province et Paris ». En somme, il prend la pose du sage qui constate le fossé qui se creuse entre la classe dirigeante parisienne et les aspirations du peuple, pose très à la mode après la grogne des agriculteurs. Certains de ses amis l’ont très mal pris, l’accusant de les « mettre dans la m… ». Il est vrai que le prétexte de Bayrou ne saurait convaincre personne : il avait accepté en 2017 de travailler sous les ordres d’un Edouard Philippe venu des Républicains, comme Bruno Le Maire, d’ailleurs. La vérité est que Gabriel Attal lui a proposé le ministère de la Défense et que Bayrou n’en a pas voulu. Ce qui montre deux choses, chez cet avide de pouvoir qu’est Bayrou : 1. Il pense qu’Attal va échouer et qu’il faut jouer à l’extérieur dans l’intérêt de sa carrière. 2. Que le ministère de la Défense, grand ministère régalien naguère, n’est plus ce qu’il était.