C’est un concept qui nous vient des Etats-Unis, et plus particulièrement du vocabulaire médical. Et encore plus précisément de l’Oregon. Le conseil de l’ordre des médecins de cet Etat situé sur la côte pacifique au nord de la Californie, gouverné par un Démocrate, punit de peines sévères (pouvant aller jusqu’à l’exclusion) un praticien qui ne dénoncerait pas dans les dix jours ouvrés une « conduite non professionnelle » dont lui ou l’un de ses collègues se serait rendu coupable. Or, dans une loi en passe d’être votée, il est prévu d’inclure les « microagressions » dans ces « conduites non professionnelles ». Ces « microagressions » peuvent offenser toutes sortes de personnes, femmes, transgenres, minorités racisées, etc. La difficulté, selon MedicaNewsToday, est que certains « qui commettent des microagressions peuvent ne vouloir aucun mal à la personne ou au groupe qu’ils offensent, ils peuvent même ne pas sentir qu’ils émettent un commentaire ou un acte microagressif ».
En particulier, les femmes de couleur sont plus sujettes à l’obésité que la moyenne de la population, plus encore si elles sont pauvres, et l’université de Californie enseigne aux futurs médecins que c’est un « effort sans espoir » de lutter contre. La question qui se pose est de savoir si dans ce cas les mises en garde contre l’obésité ne vont pas constituer une microagression.
Une journaliste qui s’est spécialisée dans la question, Andrea Widburg, s’inquiète des contradictions que tout cela peut engendrer : « Ce qui va se passer pour les médecins de l’Oregon si la loi est votée est que, s’ils font un commentaire sur les statistiques de poids d’une minorité, ce seront des racistes. Les docteurs que cela stresse, vont donc s’abstenir de donner à leurs patient(e)s des minorités la pleine information sur les risques de l’obésité. Cependant, si l’un de ces docteurs stressés perd un patient à cause d’une attaque cardiaque liée au diabète de type II, ce même docteur peut s’attendre à un procès pour faute médicale parce qu’il aura manqué à informer son patient des risques de l’obésité. C’est en termes d’échecs un zugzwang pour le médecin : il perd quoi qu’il fasse. »
Ce ne sont pas des paroles ni des inquiétudes en l’air. Avec l’expansion de l’obésité, particulièrement chez les colorés et les pauvres en Amérique, la pruderie politiquement correcte et le devoir de n’offenser personne s’accentuent. En matière de « grossophobie » ou de « phobie du gras » en particulier. Une militante a pondu un article d’intention très sérieuse intitulé « L’histoire raciste de la phobie du gras et de la stigmatisation du poids », selon lequel ce sont « des forces insidieuses dans notre société. Elles sont responsables de bien des effets nocifs pour ceux qui ont une corpulence importante, spécialement les Noirs, qui sont discriminés de manière disproportionnée. La médecine occidentale veut nous faire croire que le poids est un indicateur pertinent pour la santé mais c’est un mythe stigmatisant : la phobie du gras et le racisme sont étroitement liés ». Etc., etc.
Avec de tels raisonnements, il n’est pas impossible qu’un praticien se fasse bientôt exclure par l’ordre des médecins pour « microagression », parce qu’il aura conseillé à une mama café au lait de maigrir un peu.