La Mecque et Médine ouverts à la mondialisation… Mais si !

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Intéressant article d’un chercheur à l’université d’Utrecht : Omar Sayfo, dont il n’est pas certain qu’il soit un musulman pratiquant – il est plutôt engagé en Occident dans le mouvement pour la cohabitation pacifique entre chrétiens, juifs et mahométans – explique dans le Huffington Post combien l’islam est en train de s’ouvrir à l’influence du globalisme. « Comment le mondialisme a atteint le berceau de l’islam », tel est le titre de ce papier qui se penche sur la « terre sainte » de Hedjaz dans l’est de l’actuelle Arabie saoudite, où voisinent la Mecque et de Médine.
 
Ce sont des villes qui ne sont pas ouvertes aux non musulmans. Il faut avoir prononcé la Shahada, ou avoir la tête de l’emploi, pour obtenir son visa – un visa de pèlerin, forcément. « Ville de pureté religieuse et de traditionalisme », note Omar Sayfo à propos de la Mecque. Il a cependant pu la visiter il y a quelques années pour faire le constat « étonnant », dit-il, que les « troupes de la mondialisation » ont pénétré non seulement dans le royaume saoudien mais jusqu’aux lieux les plus saints de l’islam.
 

La mondialisation, style McDo

 
La richesse apportée par le pétrole et les besoins en infrastructures créés par la facilité du hadj – le pèlerinage de la Mecque attire désormais plus de 12 millions de voyageurs par an et devrait atteindre les 17 millions d’ici à 2025 – ont provoqué une modernisation rapide de la « ville sainte » et par voie de conséquence, de son image. Celle-ci ressemble davantage aujourd’hui à celle de Dubaï qu’à un « lieu de pèlerinage romantique », observe le chercheur, qui semble tout de même avoir une drôle de vision de la religion du « Prophète »…
 
Tout est dans la plus-value apportée par le voisinage avec la Grande mosquée : à la Mecque, la propriété immobilière vaut d’autant plus cher qu’elle en est proche. Sans pitié, on a rasé des bâtiments anciens. Les sites historiques ne sont identifiables que par approximation. La maison de naissance – à ce qu’on dit – de Mahomet est aujourd’hui une bibliothèque ; partout, les gratte-ciel dominent, imposant leur style occidental autour de la mosquée Al-Haram au détriment de l’architecture et de la décoration arabe ou islamique.
 

Une cathédrale à la Mecque ? Le Hilton, c’est pareil !

 
On sait que l’Arabie saoudite, avec sa version wahhabite de l’islam intégral, impose son « puritanisme » sur l’ensemble du domaine public. Mais ce qu’a vu Omar Sayfo à la Mecque, c’est ce puritanisme mêlé au consumérisme « à l’occidentale ». Les publicités abondent, même si elles ne montrent pas d’images d’êtres humains. Les prix montent d’ailleurs au moment du Hadj. Chiffre d’affaires pour ces quelques jours : 1,33 milliards de dollars en souvenirs à rapporter pour soi, pour la famille ou des amis. La Mecque n’était-elle pas à l’origine un carrefour commercial dominé par les marchands ? Mahomet – dit l’histoire de l’islam – a veillé à ce qu’elle le reste. Mais aujourd’hui, les souks ont cédé la place à de luxueux centres commerciaux. Comme en Occident, les enseignes les plus chères – Mango, Ralph Lauren – attirent la clientèle aisée, laissant les plus modestes faire le tour de vêtements fabriqués en Chine et qui en ont l’air, et acheter des Kaaba en plastique aux vendeurs de rue.
 
Loin de se nourrir de moutons et de dattes, les pèlerins préfèrent les enseignes occidentales : KFC propose un menu halal à quatre dollars, qu’on complète volontiers d’une bouteille de Pepsi embouteillée en Arabie occidentale. Pour le Coca-Cola, suppôt d’Israël, il faut s’éloigner un peu du centre et rendre visite au McDonald implanté tout de même à moins de trois kilomètres de la mosquée Al-Haram.
 
Starbucks, Pizza Hut et Burger King sont également sur place ; les plus riches peuvent s’offrir le Hilton même aux prix prohibitifs pratiqués pendant le pèlerinage, avec vue sur la Kaaba.
 

La mondialisation amène des millions de pèlerins à la Mecque et à Médine

 
La charia est allègrement violée. Sayfo explique qu’il est impossible d’interdire aux possesseurs d’iPhone, BlackBerry et autre Samsung Galaxy de prendre des photos à l’intérieur des mosquées ou autour de la Kaaba ; les banques présentes en nombre tirent une bonne part de leur profit des intérêts théoriquement interdits en islam et hypocritement imposés.
 
Que veut dire tout cela ? Selon l’auteur, c’est la preuve que l’islam peut s’ouvrir à l’Occident. Mais ce n’est pas sans ahurissantes pétitions de principe. Face à la question classique d’Occidentaux qui s’opposent à l’expansionnisme musulman : « Comment se fait-il qu’on puisse construire des mosquées en Europe ou aux Etats-Unis, tandis qu’il est interdit de construire une église en Arabie saoudite ? », l’auteur répond avec un aplomb désarmant : « Le cœur du monde musulman n’est pas aussi fermé aux influences étrangères qu’on pourrait le croire. »
 

Les musulmans ouverts à la mondialisation… halal

 
Il poursuit en affirmant que les valeurs occidentales globalisées ne se répandent pas seulement grâce aux missionnaires, mais par la promotion d’un style de vie et d’une société fondée sur la consommation de biens, ce qui est au moins aussi incompatible avec les valeurs islamiques puritaines que peut l’être la charia avec des idées occidentales libérales. « Qu’il y ait un McDonald’s, un Hilton et des banques de style occidental à la Mecque n’est pas moins sujet de controverse que la présence d’une grande mosquée au centre de Rome, l’appel du muezzin au cœur des Alpes ou, disons, une mosquée qui se trouverait à un pâté de maisons de Ground Zero », écrit-il.
 
Ou l’art de tout confondre. En réalité, l’islam s’accommode fort bien de la société de consommation, il se trouve seulement que les produits les plus désirables les plus luxueux sont importés. Confondre la civilisation occidentale avec ses aspects matériels et plus encore, avec ses dépravations, c’est le discours classique de l’islam. Refuser une cathédrale à la Mecque, c’est proclamer la vérité de l’islam. Accueillir McDo et KFC, c’est dire que le monde entier doit être islamique et le prouver – puisqu’ils se plient aux règles du halal.
 
Quel mépris !
 

Anne Dolhein