Potentiellement conflictuel, le retour de Jean-Marc Ayrault semble devoir contribuer à diviser la gauche. Le ministre des Affaires étrangères, traditionnellement en lien direct avec le président de la République, peut s’offrir quelques libertés vis-à-vis du premier ministre. Mais lorsque Jean-Marc Ayrault prend l’exact contrepied de Manuel Valls en ce qui concerne la politique migratoire d’Angela Merkel, l’exécutif se retrouve plus déséquilibré qu’il ne l’était déjà. A croire que Jean-Marc Ayrault veut faire peser le poids de la question des migrants contre Manuel Valls, histoire de régler, une fois pour toute, leur vieille inimitié.
Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a estimé jeudi sur iTÉLÉ qu’Angela Merkel voyait juste en ouvrant les portes de son pays aux migrants : « Je pense que lorsqu’elle se fixe sur ce principe du droit d’asile, elle a à la fois moralement et politiquement raison. »
Jean-Marc Ayrault pour Angela Merkel contre Manuel Valls
Le ministre a néanmoins nuancé son propos en estimant que la situation de la France n’était pas la même, notamment en ce qui concerne la question de la main d’œuvre. Ce qui n’empêche qu’il est nécessaire que la France pratique, elle aussi, l’accueil des migrants, dans lequel il voit un droit « sacré » – pour ceux qui en bénéficient donc.
Il faut pour cela, ajoute-t-il, que les responsables politiques expliquent cet enjeu à une opinion légitimement inquiète. « Si on n’explique pas les choses, la confusion s’installe dans les esprits, des angoisses et aussi des exploitations politiques, l’extrême droite, les conservateurs qui exploitent les peurs », continue-t-il en réenfourchant, afin peut-être de ne pas s’enferrer dans une opposition frontale avec le premier ministre, les vieux poncifs de la gauche.
De l’art d’utiliser les migrants
De fait, Jean-Marc Ayrault a tout bonnement mis les pieds dans le plat. D’abord parce que la crise migratoire est devenue tellement incontrôlable que les positions de nos politiques français, et plus largement européens, évoluent à toute vitesse. Mais plus spécifiquement parce qu’il s’oppose ainsi sur un sujet délicat à Manuel Valls qui, le mois dernier, avait été, en Allemagne même, donné une appréciation très mitigée de l’actuelle politique allemande sur cette question.
Le ministre des Affaires étrangères a beau jeu de se prononcer ainsi. Au-delà de la question migratoire, il agrandit de fait la déchirure qui est apparue ces derniers mois entre François Hollande et Manuel Valls, qui semble petit à petit réduit au rôle de repoussoir pour essayer de sauvegarder l’avenir du président.
S’ils ne votent pas – pas encore –, les migrants n’en représentent donc pas moins un argument de poids pour 2017…