« Pourquoi la monnaie n’a plus de sens » : vers la société sans argent liquide – et sans banques

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Un intéressant article sur le site professionnel Moneyweb, spécialisée dans les questions de monnaie et d’argent, prédit la fin non seulement de l’argent liquide mais aussi des banques telles que nous les connaissons aujourd’hui. On y découvre le point de vue d’un homme d’influence : Chris Skinner, qui a déjà prêté ses services à la Maison Blanche, à la Banque mondiale et au Forum économique mondial. C’est au Cap, en Afrique du Sud, qu’il a expliqué son point de vue lors d’une convention organisée par Alphacode, société africaine de technologie financière émergente. Pour lui, la monnaie n’a déjà plus de sens.
 
Sous leur forme traditionnelle, les banques proposent aujourd’hui des services qui n’ont plus aucun intérêt, a affirmé le spécialiste britannique lors de ces rencontres. « La plupart des banques ont été conçues pour assurer la distribution physique du papier à l’ère industrielle. Aujourd’hui, nous sommes à l’âge digital, qui s’occupe de la distribution des data. C’est pour cela que la monnaie n’a plus de sens. Ce n’est plus un actif physique, c’est un actif digital », a-t-il posé.
 

Dans la société sans argent liquide, on pourra se passer des banques

 
Avertissant que nous sommes au cœur d’une « révolution massive de l’humanité – une révolution fondamentale », Skinner a expliqué qu’on ne peut plus se contenter de continuer de faire de la banque en améliorant les techniques pour obtenir un fonctionnement plus rapide et moins onéreux. « Ce qu’il faut, c’est une reconstruction complète de l’ensemble du système bancaire. » Tout a changé : la manière de construire des relations, de commercer, d’établir des accords sont « fondamentalement différentes » dans un monde numérique.
 
« Nous sommes dans un monde qui change très vite ; on passe de sociétés de l’ère industrielle qui fabriquent tout et distribuent tout aux plates-formes numériques qui ne font rien et qui ne distribuent rien. Elles se contentent de faire le lien entre les personnes : celles qui ont quelque chose, et celles qui en ont besoin » : ainsi Facebook est aujourd’hui la plus grosse société médiatique du monde sans créer aucun contenu, et Airbnb est la plus grosse entreprise hôtelière au monde sans posséder la moindre chambre.
 
Selon Chris Skinner, la question des banques se pose dans ces termes-là : les sociétés financières nouvelles peuvent s’en passer allègrement. « Je pourrais construire un système financier personnel aujourd’hui sans faire appel à une banque puisque les capacités de ces sociétés de technologies financières me donnent tout ce dont j’ai besoin pour gérer mes actifs, mes investissements et mes échanges sans que tout doive être fourni par une seule société. Dans le monde bancaire de l’open source, un monde ouvert, il y a des milliers de start-up “fintech” qui excellent chacune dans un domaine précis, en compétition avec de grosses banques qui font un millier de choses de manière très moyenne », explique-t-il.
 

La monnaie, un actif démodé à remplacer par du virtuel

 
La solution ne réside pas selon lui dans la disparition pure et simple des banques mais dans une collaboration rendue possible par une modification du modèle d’entreprise de la banque, qui renoncerait ainsi au traditionnel « back office » qui s’occupe de l’administration, au « middle office » qui fournit les infrastructures nécessaires aux transactions tandis que le « front office » assure les relations avec les clients.
 
A l’avenir, il faudrait que les banques sachent rechercher et fournir aux clients la mise en relation avec les meilleurs spécialistes de la technologie financière pour créer une sorte de banque sur mesure pour chacun. La solution pour obliger les banques à renoncer à leur modèle traditionnel sonne comme un rêve de la pensée unique : « Mon problème avec la plupart des banques, c’est que lorsque j’entre dans la salle de réunion du conseil d’administration c’est un groupe d’hommes âgés qui m’accueille. Il n’y a pas de diversité, il n’y a pas de jeunesse, il n’y a pas beaucoup de femmes, il n’y a pas beaucoup de vitalité. »
 
Le fond du message est clair : tout fonctionnera mieux sans argent et sans monnaie physique, et c’est aussi un moyen de se défaire de la société patriarcale figée dans ses schémas dépassés.
 
Ce qu’ils veulent : le « tout numérique », la virtualisation fondamentale de l’économie qui permet un contrôle sans précédent.. Et même des acquiescements à la pensée unique – pour utiliser la plateforme Airbnb, il faut signer la charte affirmant qu’on s’engage à respecter l’orientation sexuelle…
 

Anne Dolhein