Le président de l’Uruguay, Tabaré Vázquez, en visite jeudi chez son homologue brésilien Dilma Rousseff, a plaidé pour l’aboutissement rapide des négociations du Mercosur avec l’Union européenne, actuellement au point mort en raison des réticences et des difficultés économiques de l’Argentine qui restreint les paiements en dollars. Mme Rousseff a répondu en prenant ses distances avec la position argentine qu’elle soutenait jusqu’ici, demandant une « adaptation » interne de l’union douanière sud-américaine et qualifiant de « priorité » sur le plan extérieur « la conclusion, dès cette année, d’un accord avec l’Union européenne ».
A l’image de ce qui se fait dans les autres grandes régions du monde, l’intégration économique est en marche en Amérique latine et doit se lire à la lumière des avancées vers la mondialisation. Le Mercosur, qui unit l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay et le Venezuela au sein d’une vaste zone de libre-échange, n’a pas réussi à ce jour à présenter une proposition commerciale commune aux négociateurs de l’Union européenne. Le Brésil, l’Uruguay et le Paraguay souhaiteraient déjà obtenir davantage de souplesse dans le cadre du traité pour pouvoir négocier des accords bilatéraux.
Mercosur : le Brésil et l’Uruguay font des négociations avec l’Union européenne leur « priorité »
On semble donc s’orienter vers des accords à géométrie variable, sous l’œil bienveillant et satisfait de Christine Lagarde, directrice générale du FMI, qui était sur place à Brasilia et qui répétait combien la mise en place du libre-échange entre les deux régions continentales allait apporter de bénéfices à chaque partie.
On notera que tant Tabaré Vázquez que Dilma Rousseff sont été élus sur des programmes de gauche. C’est bien le socialisme mondial qui pousse à la roue pour faire progresser l’intégration économique globale, réputée ultra-libérale…
C’est à la faveur de sa réélection en janvier que Mme Rousseff s’autorise ce revirement qu’elle justifie au nom d’une « étape stratégique pour la région dans le domaine du commerce international ».
Tabaré Vázquez, dont c’était la première visite officielle au Brésil depuis sa prise de fonction en mars, est un vieux routier du Mercosur : entre 2005 et 2010, lors de son premier mandat comme président de l’Uruguay, il s’était frotté à l’ex-président du Brésil, le populiste de gauche Lula da Silva dans le cadre de l’union douanière. C’est ce dernier qui avait fini par le convaincre d’y maintenir l’Uruguay. Au nom de son pays, il continue de demander une plus grande « flexibilité » de l’union douanière afin que chacun puisse aller de l’avant comme il l’entend en négociant des accords de libre-échange avec des tiers : sur ce plan, les choses n’ont pas avancé.
Tabaré Vázquez et Dilma Rousseff, deux présidents de gauche partisans du libre-échange
Cela ne l’a pas empêché de s’aligner sur Dilma Rousseff sur la question de la « priorité » de la négociation avec l’UE : l’Uruguay, il faut le dire, a des liens économiques tels avec son imposant voisin du nord que l’entente s’impose. Le Brésil est la première destination des biens manufacturés exportés par l’Uruguay, et les échanges bilatéraux s’élèvent à 5 milliards de dollars – un chiffre qui stagne en raison des difficultés économiques du Brésil. Sur le plan de l’énergie, le Brésil et l’Uruguay sont en voie de réaliser leur « intégration » avec l’installation d’une ligne de haute tension et la prochaine construction de deux ponts pour relier les deux pays.
Si le Brésil et l’Uruguay veulent accélérer les processus du Mercosur, le Brésil, lui, espère élargir encore son domaine de libre-échange : des traités sont ainsi envisagés avec la Chine, son principal partenaire commercial et grand investisseur sur place, ainsi qu’avec le Mexique.