« La grande trahison du Brexit commence. Les conservateurs ont sacrifié le peuple anglais – même Jeremy Corbyn (chef des travaillistes) a une position plus dure » : par ces mots, Nigel Farage, fondateur du parti pour l’indépendance du Royaume-Uni, l’UKIP, attaque bille en tête la gestion du Brexit par le gouvernement de Theresa May qu’il accuse de trahison, notamment à propos du report du contrôle migratoire… et semble préparer son retour sur le devant de la scène politique. Farage avait quitté la tête de l’UKIP en novembre 2016 au bénéfice de Paul Nuttall. Il est actuellement député européen.
Nigel Farage a lancé cette nouvelle offensive dans sa tribune publiée par le Telegraph, ce 25 juillet. « Quand j’ai appris que Lord Prior (obscur sous-secrétaire d’Etat parlementaire au commerce, à l’énergie et à l’industrie, europhile, NDLR) avait dit lors d’une rencontre avec les patrons des entreprises de technologie et d’assurance, la semaine dernière, qu’il ne fallait pas qu’ils s’inquiètent de limitations d’entrée de futurs salariés venus de l’Union européenne, je me suis dit qu’il allait trop loin », lance-t-il. « Comment un gouvernement du Brexit élu sur la promesse de réduire l’immigration nette de dizaine de milliers (de salariés) peut-il tolérer une telle position ? », poursuit-il, demandant que Lord David Prior soit « sanctionné ».
Lord Prior contredit les assurances passées de Boris Johnson et Michael Gove sur le contrôle migratoire
« Or au contraire, ça empire », dénonce Farage qui pointe un accord gouvernemental selon lequel « l’ouverture des frontières sera maintenue pendant au moins deux ans après le départ effectif de l’UE en 2019 », soit jusqu’à 2021, « cinq ans après le référendum » ayant acté le Brexit. Lord Prior annonce « une trahison », insiste Farage, qui avait pourtant décelé une éclaircie l’été dernier quand Boris Johnson, secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, et Michael Gove, secrétaire d’Etat à l’environnement et aux affaires rurales, avaient plaidé pour un système à points façon australienne, « garantissant que la future politique migratoire soit basée sur les intérêts de notre économie ».
Mais le vent tourne, constate Farage : « La vieille alliance du big business et des gouvernements conservateurs refait surface et pendant ce temps les électeurs tories, qui ont voté loyalement pour des programmes promettant une baisse drastique du nombre d’immigrés, sont sacrifiés. » Farage dénonce ces « arguments servis et resservis » en faveur d’une période transitoire au-delà de la sortie formelle de l’UE, « prétendument pour favoriser notre économie ». « Il s’agit juste du recyclage du vieux raisonnement martelé par les partisans du maintien dans l’Union l’an dernier, lequel a pourtant été sèchement rejeté par l’électorat » (à 52 %), dénonce encore le fondateur de l’UKIP. Or, ajoute-t-il, « Chacun sait que le principal enjeu du Brexit était la politique de la porte ouverte ».
Un recul « en plein regain de la crise migratoire en Italie », dénonce Nigel Farage
Nigel Farage relève encore que « L’ironie de la situation est que la décision gouvernementale de garder les frontières ouvertes est prise en plein regain de la crise migratoire en Italie ». Or, calcule-t-il, « Tous les problèmes posés par l’augmentation de la population du Royaume-Uni, prévue à 77 millions d’habitants en 2050, continueront de ce fait de s’aggraver : manque de places à l’école, déficit du service national de santé, surcharges des chemins de fer, crise du logement ». Le discours officiel et unique n’aborde jamais ces défis lancés par l’immigration incontrôlée, poursuit-il : « On parle toujours des bénéfices économiques, jamais des coûts en capital des infrastructures qu’elle exigera ».
« Les électeurs favorables au Brexit ne se voilent pas la face devant l’immigration : la plupart veulent maintenant qu’elle soit stoppée totalement », martèle encore Nigel Farage. « Or, le fait pour une nation de devoir se lever contre l’establishment pour garantir la victoire historique qu’elle a remportée, et pour ne pas voir ses espoirs foulés aux pieds par une élite hors-sol, est une source de graves divisions », met-il en garde.
Nigel Farage dénonce la « trahison » du Brexit par le gouvernement de Theresa May
« Il est curieux de voir que Jeremy Corbyn se situe désormais sur une ligne plus dure que le gouvernement de Theresa May, quand il dit qu’il interdirait l’importation massive de travailleurs peu qualifiés du reste de l’UE », ironise-t-il. Même Barry Gardiner, membre du cabinet fantôme de l’opposition travailliste et l’an dernier opposé au Brexit, admet que « l’enjeu-clé du Brexit était le retour au contrôle des frontières », relève Farage.
« Ce nouveau consensus » autour d’un recul à 2021 du retour au contrôle des migrations intra-européennes « doit être brisé », conclut l’eurodéputé, après un réquisitoire digne d’un chef politique actif préparant son retour au premier plan à Londres.