Les Noces sont en principe un événement joyeux, l’union d’un jeune homme et d’une jeune femme, et ce dans toutes les cultures humaines. Ainsi, les Pakistanais comme les Belges peuvent se marier un jour. Le mariage est devenu aléatoire, fragile, pour les Belges, mais reste un fait social généralisé au Pakistan. Cette généralité confine en fait à l’obligation ; mais un mariage arrangé, la norme au Pakistan, n’est pas forcément un mariage forcé, et la plupart des unions, paraît-il, sont des réussites, avec des hommes et femmes qui finissent par s’aimer, et aiment évidemment leurs enfants. Noces centre son intrigue sur le drame d’un mariage forcé dans la communauté pakistanaise de Belgique. Il sait éviter tous les pièges du manichéisme : présenter la société belge en modèle, ne serait-ce que sous l’angle du bonheur personnel, est loin d’être aisé. Il n’en reste pas moins que des gens a priori parfaitement « normaux », même « intégrés » selon une première approche, avec un père épicier, qui travaille, des enfants qui vont aux écoles du quartier et font des études, peuvent finir par réagir de manière criminelle. Ces crimes d’honneur sont jugés comme un devoir moral au Pakistan, alors qu’ils révoltent non seulement la bonne conscience occidentale si facile mais aussi les sentiments humains spontanés et universels.
 
Le drame débute ainsi : une lycéenne pakistanaise de Belgique se trouve enceinte. La famille la pousse à avorter avant 40 jours, car avant cette date le bébé n’aurait pas d’âme humaine, selon l’islam. C’est évidemment faux. La première concernée en doute. Pourtant elle subit une pression convergente, tant de la société belge que de sa famille pakistanaise, si différentes mais unies pour le pire. Le drame moral de l’avortement est, chose rare, très bien montré : les médecins et infirmiers des avortoirs usent d’un vocabulaire spécifique pour nier absolument son humanité au petit homme dans le ventre de sa mère. Sur cette question de l’avortement, Noces présente en certaines scènes un aspect quasi-documentaire ; elles pourraient être réutilisées par des associations pro-vie.
 

Noces : tout simplement un excellent film

 
Noces a été loué par de nombreux critiques officiels par son aspect de véritable tragédie, digne d’une tragédie grecque antique. Nous avions été sceptique face à un compliment a priori excessif, dans la lignée d’une certaine critique facilement complaisante pour des films relevant du politiquement correct. Eh bien non, à notre grande surprise, le compliment est parfaitement mérité. Des personnages pas particulièrement mauvais, au contraire, suivent des destins logiques qui ne peuvent que déboucher sur un drame. Ils en sont pour certains conscients, sans pouvoir rien y changer. Et non, excellente surprise, Noces ne relève nullement d’un politiquement correct facile et abrutissant, mais est tout simplement un excellent film.
 

Hector JOVIEN