Les Américains auront appris la nouvelle à travers un article du Monde : l’administration Obama cherche à mettre fin aux singularités légales qui ont permis aux Etats comme le Delaware et le Nevada de conserver leur statut de paradis fiscal dans un contexte de chasse mondiale généralisée à l’évasion fiscale. La nouvelle est remarquable en soi ; que réforme soit annoncée dans la presse étrangère l’est plus encore. A l’heure d’écrire, la dépêche anglophone relatant les propos du vice-secrétaire du Trésor américain, Robert Stack, au Monde, n’a guère été reprise que par le site UBS Wallstreet. La nouvelle a en revanche été largement commentée dans la presse francophone et hispanophone.
Robert Stack a annoncé la nouvelle mesure dans Le Monde du 31 mars. Il s’agit d’un nouveau règlement de l’Internal Revenue Service visant à obliger les actionnaires des sociétés privées à responsabilité limitée (LLC) à dévoiler leur identité. La mesure devrait être présentée dans de brefs délais et le vice-secrétaire au Trésor s’attend à ce qu’elle soit adoptée rapidement, avant la fin du mandat de Barack Obama en tout cas.
Robert Stack a annoncé au “Monde” la volonté de l’administration Obama d’en finir avec les paradis fiscaux américains
A l’heure actuelle, le Delaware, le Nevada, le Wyoming… sont toujours des paradis fiscaux où les sociétés étrangères peuvent trouver une domiciliation offshore. Ces sociétés à actionnaire unique, tant qu’elles ne possèdent pas d’actionnaire américain ou n’ont aucune activité aux Etats-Unis, peuvent y jouir d’une invisibilité fiscale très prisée, dit Le Monde, par « les riches étrangers et les hommes d’affaires ».
Le quotidien français parle d’une offensive d’Obama qui « constitue un petit coup de théâtre » et répond à la pression croissante des dirigeants de l’OCDE aux côtés desquels le gouvernement américain s’est beaucoup investi pour imposer la transparence fiscale globale.
Le Delaware verra sa loi fiscale réformée
Plusieurs points restent à déterminer dans les nouveaux textes que prépare le fisc américain : on ne sait si la loi sera rétroactive ou si elle s’appliquera aux seules nouvelles LLC, par exemple. En revanche, il semble établi qu’elle fera des LLC des entreprises comme les autres, avec un numéro d’identification fiscale ordinaire, leur bénéficiaire légal étant déclaré et les transactions avec ce dernier devant être déclarées à l’administration.
Il semble en tout cas que les nouveaux textes visent prioritairement les petites entreprises alors que le Delaware est connu comme paradis fiscal pour les très grosses sociétés, les « corporations » à actionnaires publics. Plus de 50 % des sociétés dont les actions s’échangent en bourse et 60 % de celles qui font partie de l’indice Fortune 500 y sont incorporées.
Limitée mais significative, la nouvelle réglementation proposée par l’administration Obama marque en tout cas une nouvelle étape dans la volonté de mettre au pas le monde de la finance et de donner plus de pouvoir au fisc sur le plan global.