Lancée en juin 2015 pour lutter contre le trafic de migrants en Méditerranée, l’opération EUNAFVOR Med, appelée aussi opération Sophia, n’a pas réussi à « casser le modèle d’activité des réseaux de passeurs et trafiquants en Méditerranée ». Cela, c’est ce que promettait fièrement Federica Mogherini, la Haute Représentante de l’Union pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité en mai 2015, après que la décision d’organiser une telle opération eut été prise par les 28.
Confirmant les critiques contenues dans les rapports annuels successifs de l’agence Frontex qui mettaient déjà en évidence, dès 2016, l’échec de l’opération, un rapport parlementaire en Grande-Bretagne dénonce à son tour les effets pervers de cette mission. Pour les auteurs du rapport, la lutte contre le trafic de migrants devrait se dérouler sur le territoire libyen. « Une fois que les bateaux ont pris le large, c’est trop tard », explique ce rapport parlementaire britannique. Si l’opération a permis de détruire plus de 450 embarcations et d’arrêter environ 110 passeurs, le nombre de morts en Méditerranée (2.206 noyades recensées en Méditerranée centrale entre le 1er janvier et le 9 juillet selon les chiffres de l’OIM) n’a pas diminué de manière significative.
Après le lancement de l’opération EUNAFVOR Med, appelée aussi opération Sophia, les passeurs ont adapté leur mode opératoire en Méditerranée
Les passeurs ont tout simplement adapté leur modèle d’activité. Puisque les gros bateaux capables de transporter 500 ou 600 migrants se faisaient intercepter et que les navires européens viennent désormais repêcher les candidats au départ à 12 milles de la côtes, ils se sont mis à utiliser des canots pneumatiques. Se procurer de telles embarcations n’est pas un problème puisqu’elles sont vendues par exemple sur le site chinois de vente en ligne Alibaba sous l’appellation de canots de sauvetage gonflables « pour réfugiés ». Le prix à payer est compris entre 300 et 500 € et le paiement se fait par la Western Union avec livraison à 30 jours. Or selon le rapport de la Commission de l’Union européenne de la Chambre des lords, ces canots pneumatiques comptent désormais pour 70 % des embarcations au départ de la côte libyenne.
En recommandant un engagement politique plus fort en Libye ainsi que la poursuite des missions de formation des garde-côtes libyens et des missions de sauvetage en mer, les auteurs du rapport suggèrent donc au gouvernement britannique de se prononcer contre la prorogation du mandat de l’opération Sophia à son expiration le 27 juillet prochain. À Bruxelles, au contraire, on continue de croire en une reconduction de l’opération malgré les préconisations du rapport parlementaire britannique.