Cotation : la Chine va reprendre la main sur l’or par le « fixing » des cours

Cotation la Chine va reprendre la main sur l’or par le fixing des cours
 
Un marché fragile dont les volumes d’échanges ont diminué, où la moindre transaction fait monter ou descendre les cours en dents de scie : tel est le marché de l’or, dont la cotation est une sorte d’exclusivité de la place de Londres, aujourd’hui assez opaque puisque les statistiques des échanges sont difficiles à obtenir. Mais cette position quasi monopolistique, et les avantages qui y sont liés – et qui a d’ailleurs abouti à ce que l’or ne soit plus l’étalon de la valeur monétaire et à ce qu’il ne soit plus une monnaie naturelle – est en passe d’être perdue alors que la Chine se pose en rivale de Londres pour les échanges et la cotation. L’ouverture du marché de l’or à Shanghai devrait aboutir, d’ici à la fin de l’année selon le Financial Times, à un « fixing » sur place, ce qui permettrait à la Chine de reprendre la main sur l’or et d’en faire une référence indépendante face à la haute finance américaine.
 
Voilà bien longtemps que celle-ci a obtenu la dissociation entre l’or, l’argent et la monnaie papier, permettant à la monnaie fiduciaire de prendre son essor et surtout, d’en créer ex nihilo; avec le pouvoir exorbitant et les possibilités d’enrichissement que cette création monétaire donne aux banques et à la haute finance. On sait que les Banques centrales veulent prendre la main sur ce pouvoir et que la haute finance est sous les assauts de cette entreprise mondialiste par le biais des réglementations, des procès et amendes qui se multiplient contre ses établissements emblématiques, en même temps que les appels mondiaux à la « transparence » et la lutte contre les paradis discaux aboutissent au contrôle des plus grands… Jusqu’à un certain point. Le shadow banking a tôt fait de mettre en place des circuits parallèles et comme dans toutes les affaires humaines, rien n’est univoque et il y a toujours des jeux de pouvoir.
 

La Chine veut prendre la main sur la mondialisation

 
Précisément dans le cas de la Chine, qui profite de la mondialisation et qui intègre les circuits existants, il y a une volonté manifeste de se poser à la tête de l’entreprise de globalisation, pour rafler la main à la fois à la haute finance et aux Etats-Unis.
 
Le fixing de l’or est un bon moyen, tant il permet de mettre en place une référence différente et parallèle dans le cadre boursier. Et la Chine, à la fois premier producteur et premier consommateur du métal précieux, compte manifestement l’utiliser pour asseoir sa puissance. En créant un nouveau centre de cotation de l’or, elle obligera Londres à renoncer à son pouvoir de manipuler les cours rendu possible par sa position de quasi monopole : le fixing se faisait traditionnellement chez Nathan Mayer Rothschild où les cinq banques membres du « fix » du métal jaune se retrouvaient jusqu’en 2004, date à laquelle la banque Rothschild s’est retirée du marché. Depuis lors, le fixing se fait de manière électronique, et les échanges ont tari.
 

Bientôt la cotation de l’or à Shanghai : la Chine avance ses pions

 
Mais voici la Chine. Le Shanghai Gold Exchange a mis en place un marché d’échange international dans la zone de libre échange de la mégapole chinoise, où le capital circule bien plus librement que dans le reste du pays, qui demeure une dictature communiste. En septembre dernier, HSBC, l’une des principales banques mondiales à jouer un rôle prééminent sur le marché de l’or, a été approuvé comme membre du SGE.
 
« Nous aurons indubitablement un prix fixé en Chine avant la fin de l’année et nous assisterons au développement rapide d’un marché d’options d’achat sur l’or – le marché des emprunts de liquidités est très important et donc l’idée que les liquidités s’en vont vers l’est est exacte », assure un acteur du marché de l’or.
 

Fixing de l’or en Chine : voie royale vers l’arrimage du yuan au métal précieux

 
On s’attend non seulement à ce que le marché de l’or se développe considérablement en Chine, mais encore à ce que les compagnies minières locales rapatrient leurs avoirs actuellement stockés à l’étranger en réimportant d’importantes quantités du métal précieux. Chose facilitée par la levée par Pékin, en mars, des restrictions sur l’importation et l’exportation de l’or, ce qui a déjà favorisé les échanges domestiques. La Chine a d’ailleurs acheté d’importantes quantités d’or ces dernières années, à rebours de la tendance internationale, et selon l’agence russe Sputnik – reflet très fidèle des positions russes – les Etats-Unis craignent de voir Pékin et Moscou, qui se rapproche du nouveau point de gravité économique oriental que la Chine s’efforce de mettre en place, puissent coopérer pour créer un nouvel étalon-or. Sputnik attribue ce commentaire au Financial Times qui en réalité ne le fait pas. Mais il y a sans aucun doute une réalité à cela, puisqu’avec l’or coté plus librement, avec des volumes d’échanges qui s’annoncent plus importants du fait de l’entrée en lice de la Chine, on s’oriente davantage vers la fin de la domination du dollar, et l’arrimage possible du yuan à la valeur de l’or, donnant à son économie un atout – majeur – de plus.
 

Anne Dolhein