Il paraît que le paganisme progresse, au Royaume-Uni, religion idéale de l’ère post-chrétienne, selon le chercheur Francis Young, qui y voit une solution de liberté et de non-engagement qui convient aussi à l’ère post-covid. Il passe à côté d’un aspect essentiel de notre époque post-moderne, comme nous le verrons en conclusion…
Selon un rapport de l’Institute for the Impact of Faith in Life (IIFL) réalisé d’après les données d’un sondage Whitestone Insight auprès de 2.774 personnes ayant connu un changement dans leurs croyances religieuses, l’immense majorité – 83 % – de ceux qui ont abandonné le christianisme s’identifient comme « athées » ou « agnostiques ». Mais la proportion qui se dit « spirituelle » est en hausse, atteignant les 11 %. Près de la moitié des sondés de ce groupe (47 %) se décrivent comme « païens » et 7 % s’annoncent « wiccanes », c’est-à-dire adeptes de la magie. Il s’agit d’une « croissance notable », selon le rapport, alors que parmi ces post-chrétiens seuls 3 % ont rejoint le bouddhisme et 2 % se sont convertis à l’islam. Le christianisme est baisse, puisque le nombre de personnes qui le quitte est plus important que celui des nouveaux croyants.
Les sondés ont tous en commun un changement dans leurs croyances religieuses, qu’il s’agisse d’une conversion, d’un changement de religion ou d’un abandon de la foi.
Le paganisme « convient » à la société post-chrétienne
Le rapport estime que les nouvelles « identités » se revendiquant d’un spiritualisme vague ou d’un nouveau paganisme « émergent souvent d’une désillusion vis-à-vis de la doctrine et/ou d’un conflit moral avec la religion institutionnelle ». On peut y voir le rejet du dogme (cher à la franc-maçonnerie…) puisque le paganisme englobe, selon la Fédération païenne britannique, les religions « polythéistes ou panthéistes adoratrices de la nature » qui « ne sont liées ni par les coutumes d’une religion établie ni par les dogmes d’une religion révélée ».
Se référant au recensement de 2021, le rapport ajoute : « Le paganisme (y compris la wicca et le druidisme) comptait environ 74.000 adeptes [contre 57 000 en 2011], ce qui en fait la plus grande catégorie de la rubrique “autre religion”. Le nombre d’adeptes de la wicca est passé de 11.800 à 13.000. Concentrées dans des régions telles que Ceredigion, Cornwall et Somerset, ces communautés s’inspirent des traditions religieuses préchrétiennes, du folklore, de la sorcellerie populaire et de la magie rituelle. »
Les chiffres peuvent paraître bas mais ils ne sont que la pointe de l’iceberg, rassemblant ceux qui se revendiquent expressément d’une tendance pour laquelle l’intérêt général ne cesse de croître : ces dernières années, le thème de la sorcellerie a explosé sur les réseaux sociaux, avec des millions de publications portant le hashtag WitchTok sur la plateforme TikTok, à l’heure où les jeunes se sentent beaucoup plus libres, selon un précédent rapport de l’IIFL publié le mois dernier, de se rapprocher de cette « spiritualité » qu’il faut bien qualifier de démoniaque.
Ancien témoin de Jéhovah et « queer », un de ces nouveaux « sorciers » Moss Matthey, qui se revendique des traditions païennes germaniques et galloises, explique : « Ce n’est pas une doctrine, mais plutôt une quête de sens, une sorte de spiritualité auto-générée… On n’est pas un récepteur passif de sa foi, mais un co-créateur actif », dit-il. « On crée ses propres valeurs et croyances, elles ne nous sont pas simplement transmises. »
La religion du Royaume-Uni qui rejette Dieu et la vérité
C’est en somme l’homme qui rejette Dieu ou qui se dresse face à lui dans une autonomie absolue, et pour Francis Young, universitaire spécialiste des religions, le choix du paganisme est finalement assez évident à l’ère post-covid au Royaume-Uni, où les lieux de culte se vident et où les groupes pratiquant les réunions « présentielles » et exigeant une forme d’engagement sont de moins en moins fréquentés. La fréquentation des églises n’a toujours pas retrouvé son niveau d’avant la crise du covid, et ce phénomène s’accompagne, selon le chercheur, d’un intérêt accru pour les « religions non organisées ». Soit « des moyens totalement libres et spontanés de se connecter au divin ».
Le paganisme « offre la possibilité de croire en quelque chose et de participer à des rituels tout en appartenant à une tradition apparemment ancienne, mais sans s’engager auprès d’une organisation ou d’une institution qui a des attentes envers ses membres ».
Le paganisme tel qu’il s’est développé en Grande-Bretagne dans les années 1940, avant de se répandre dans le reste du monde, était une au départ « une religion profondément communautaire qui mettait l’accent sur l’initiation et la participation en groupe (comme certaines voies païennes continuent de le faire), mais à partir des années 1990, le mouvement “Hedge Witch” a prôné la possibilité de l’auto-initiation et de la pratique solitaire ». « Ces dernières années, l’idée du païen solitaire a été renforcée par des tendances en ligne telles que “WitchTok”, des vidéos TikTok consacrées aux sorts et aux rituels d’épanouissement personnel », ajoute Francis Young.
Le paganisme, un « type de religion différent »
Il précise : « Rejeter le paganisme comme une religion avec un nombre infime d’adeptes, c’est passer à côté de l’essentiel. Il ne s’agit pas simplement d’une autre religion qui rivalise à armes égales avec le christianisme et l’islam. C’est un type de religion différent qui ne cherche ni à convertir ni à recruter des membres. Il n’existe pas de confession de foi païenne, ce qui soulève la question de savoir s’il est possible de “se convertir” à cette religion. On devient simplement païen en pratiquant des rites païens. C’est une religion qui repose davantage sur la pratique que sur la croyance, et les gens peuvent commencer à pratiquer ces rites bien avant de s’identifier à cette secte. »
Et de noter le plus remarquable, selon lui : que le paganisme ait acquis une « acceptabilité sociale » au Royaume-Uni, « il n’est plus considéré comme une contre-culture ».
« Peut-être parce qu’il ne cherche pas à convertir ni à imposer de exigences aux croyants, il suscite moins d’hostilité que le christianisme et l’islam de la part des Britanniques post-chrétiens et non religieux. Il était inévitable que le paganisme devienne une religion pour les post-religieux. Les écritures archaïques, les dogmes ennuyeux qui exigent de la cohérence, les confessions de culpabilité et les obligations d’adhésion semblent tous être des exigences plutôt lourdes au XXIe siècle. Si l’on enlève toutes ces spécificités, il ne reste peut-être que le paganisme », conclut-il.
Le paganisme, religion officielle du mondialisme
L’analyse se tient – mais à notre tour de souligner que Young passe à côté de l’essentiel. Il passe à côté du fait que cette spiritualité païenne, qui convainc à titre individuel, attire ou à tout le moins ne dérange plus est en réalité soutenue par un puissant arsenal : le soutien des institutions internationales, depuis l’ONU, le Forum économique mondial jusqu’aux instances qui prêchent la lutte « pour la planète » ou contre « le changement climatique ».
Et cette nouvelle religion qui s’impose en haut lieu est aussi exigeant, aussi totalitaire que la plus tyrannique des théocraties : tout doit s’incliner devant ses règles, il faut sacrifier bien-être, traditions nationales, richesses et modes de vie aux dieux qu’elle vénère (à commencer par Gaïa, en passant par « les Esprits »), et croire aux faux dogmes qu’elle enseigne. C’est la religion qui s’adapte parfaitement à la culture de mort et sa haine de l’homme.
Disposer d’une petite armée de sorciers, sorcières, adorateurs de la nature et autres « connectés aux esprits » et persuadés d’exprimer leur seul propre désir ne peut que lui servir. Quand le surnaturel disparaît, il ne reste que ce qui n’est pas naturel, disait Chesterton – ou pour le dire plus exactement, ce qui est contre-naturel et infernal.











