Le pape François parlait bien de la contraception à propos du virus Zika, affirme le porte-parole Federico Lombardi

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Le pape François et le P. Federico Lombardi dans l’avion en provenance du Mexique qui les ramenait à Rome.

 
Jésuite comme le pape, le porte-parole du Vatican, Federico Lombardi, s’est souvent efforcé de clarifier les paroles impromptues de François ou ses entretiens informels avec des journalistes de plus ou moins bonne foi. Ses dernières déclarations sur la contraception, en réponse à une question sur le virus Zika, ont été immédiatement interprétés par les médias comme signifiant la fin de l’interdiction générale du recours aux contraceptifs pour rendre infertile un acte conjugal potentiellement fécond. Le P. Lombardi a publiquement précisé la pensée du pape (exactement ? avec l’accord de ce dernier ?)… en affirmant que le pape parlait en effet de la contraception.
 
Le pape François avait commencé par rejeter absolument le recours à l’avortement en cas d’atteinte d’un enfant conçu par la microcéphalie associée, à tort ou à raison, au virus Zika.
 

Le P. Federico Lombardi interprète les paroles du pape sur Zika

 
« Le pape distingue nettement la radicalité du mal de l’avortement, en tant que suppression d’une vie humaine, et, à l’inverse, la possibilité de recourir en cas d’urgence ou de situations particulières, où, donc, on ne supprime pas une vie humaine, mais où l’on évite une grossesse. Maintenant, ce n’est pas qu’il dit que l’on peut accepter et utiliser ce recours sans aucun discernement, ainsi, il a dit clairement que cela peut être envisagé dans des cas de grande urgence. L’exemple invoqué, celui de Paul VI et de l’autorisation d’avoir recours à la pilule pour des religieuses qui étaient exposés au risque très grave et continu de violences de la part des rebelles du Congo, aux temps des tragédies de la guerre du Congo, il fait comprendre que ce n’était pas une situation ordinaire qui était là prise en considération. Et rappelons aussi par exemple la discussion qui a suivi la publication du livre d’entretiens de Benoît XVI, Lumière du Monde, où il parlait de l’utilisation du préservatif dans des situations de risques de contagion, par le sida par exemple. Alors le contraceptif ou le préservatif, dans un cas de particulière urgence ou gravité, peuvent aussi faire l’objet d’un discernement de conscience sérieux. C’est ce que dit le pape. Tandis que pour l’avortement il n’a pas laissé de place à de telles considérations », a répondu le P. Lombardi.
 
Ayant évoqué la nécessité de trouver rapidement un vaccin contre le virus Zika, le P. Lombardi poursuit : « Il est cependant nécessaire de ne pas se laisser gagner par la panique et de prendre du coup des orientations ou des choix qui ne sont pas proportionnés à la réalité du problème. Donc, bien comprendre la nature du problème, continuer de l’étudier, et réagir aussi à travers la recherche, pour trouver les solutions les plus fortes et les plus tables ; éviter cependant le recours à l’avortement et, s’il s’agissait d’une situation de grave urgence, alors une conscience bien formée peut voir s’il y a des possibilités ou une nécessité d’avoir recours à des produits non abortifs pour prévenir la grossesse ».
 

La contraception, admissible dans les cas d’urgence ? Le P. Lombardi répond « oui »

 
Cela a le mérite d’être plus cohérent que les déclarations du pape, mais on reste dans le cadre d’une contradiction à l’égard de l’enseignement constant de l’Eglise.
 
Il est fait référence à deux situations qui n’ont rien à voir avec les relations conjugales : celle du prostitué homosexuel utilisant un préservatif (évidemment sans visée contraceptive !) dont Benoît XVI soulignait que cela pouvait laisser croire à un éveil du sens de la responsabilité à l’égard du partenaire – mais dans le cadre, faut-il le préciser, d’un acte déjà moralement mauvais en soi.
 
Pour ce qui est des sœurs du Congo, il s’agit bien du recours à un contraceptif, avec une finalité contraceptive, mais chez des sœurs qui ont fait vœu de chasteté. Deux remarques : rien ne prouve que Paul VI ait approuvé cette permission, si tant est qu’elle ait existé – rien ne le prouve non plus ; d’autre part, dans la mesure où l’on sait aujourd’hui l’action précocement abortive que peut avoir la contraception chimique, il est douteux qu’une femme puisse la prendre dans une intention contraceptive et en acceptant comme un effet désiré l’éventuel effet anti-nidatoire du comprimé.
 
Avec un certain nombre de précautions oratoires, mais qui ne sont pas de celles que les médias retiennent, le P. Lombardi envisage explicitement le recours au préservatif ou d’une pilule contraceptive (mais pourquoi pas de tout autre moyen contraceptif), dans le cadre des relations conjugales, dans des situations d’urgence, dans le but de rendre stérile des actes potentiellement fertiles.
 

A grands pas vers la casuistique ? Le pape François favorise la confusion

 
Admettons qu’il n’ait pas voulu l’appliquer dans le cas du virus Zika… De toute façon il est trop tard. C’est un discours qui envisage, de manière inédite, qu’un couple puisse utiliser des contraceptifs ou des préservatifs en vue d’éviter une grossesse. Cela va contre l’enseignement constant de l’Eglise, et notamment de Jean-Paul II – l’inspirateur, lorsqu’il était encore cardinal de Humanae vitae, comme on le sait aujourd’hui – montrant l’impossibilité de dissocier l’aspect unitif de l’aspect procréatif de l’acte conjugal, sous peine de le dénaturer.
 
Eviter une grossesse est licite, mais pas par n’importe quel moyen : c’est cet enseignement de l’Eglise qui correspond à la nature de l’homme, et qui est atteint par les déclarations actuelles du P. Lombardi. Avec l’approbation du pape François ? C’est une vraie question.
 

Anne Dolhein