Un document fuité pose la question : le pape François a-t-il joué un rôle dans un nouveau scandale financier au Vatican ?

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LifeSiteNews a obtenu des documents internes de la Papal Foundation, un fonds de bienfaisance catholique basé aux Etats-Unis, qui mettent en cause le pape François qui apparaît comme ayant personnellement demandé un versement de 25 millions de dollars à verser à un hôpital dermatologique romain appartenant à l’Eglise, et soupçonné de blanchiment d’argent. Ce sont visiblement des membres laïques de la Papal Foundation qui ont « fuité » le dossier compromettant qui fait état d’un versement plus modeste que celui demandé par le pape François mais atteignant tout de même la somme de 13 millions de dollars, virée en deux fois en décembre et janvier derniers.
 
La demande exorbitante attribuée au pape François représente une somme cent fois supérieure à celles habituellement versées par la Fondation à différents projets d’aide et de bourses aux pauvres à travers le monde, qui lorsqu’ils sont agréés, obtiennent des dons de 200.000 dollars au maximum. Ce sont le plus souvent des opérations ponctuelles dont le financement est abondé par la Papal Foundation, du chauffage à réparer dans une école de garçons à la construction d’un monastère bénédictin, en passant par l’aide aux étudiants ou séminaristes pauvres. Tout un catalogue d’actes charitables auquel s’ajoutait tout de même en 2017 une subvention de 100.000 dollars pour le bureau des communications stratégiques du Saint-Siège.
 

Un document fuité met en cause le pape François dans une affaire financière bizarre

 
Le choix des projets à aider se fait à travers une évaluation de la part du bureau de la Fondation et de ses commissions qui obéit généralement à des procédures bien définies.
 
La Papal Foundation Comprend des membres laïques ou « stewards » qui s’engagent à donner au moins 100.000 dollars par an pendant une période minimale de 10 ans ; cet argent est investi en vue de la distribution des intérêts pour venir en aide aux projets d’Eglise. Ceux qui décident sont pour la plupart des évêques américains, qui ont une majorité dans le bureau du Fonds, étant entendu que les cardinaux américains vivant aux Etats-Unis en font partie de plein droit.
 
D’après les documents internes obtenus par LifeSiteNews, la demande du pape a été présentée au bureau par le cardinal Donald Wuerl à l’été 2017. C’est en décembre, et malgré l’opposition des « stewards » laïcs, que le bureau a voté le fameux virement de 8 millions de dollars au Saint-Siège. Dès janvier, des membres laïcs ont protesté contre ce qu’ils ont qualifié de « grave utilisation indue » des fonds, rapporte LifeSite, ce qui n’a pas empêché l’envoi de 5 millions de dollars supplémentaires en janvier sans que le cardinal Wuerl n’y trouve à redire.
 

Nouveau scandale financier au Vatican ?

 
La situation était tellement tendue que le membre laïque jusqu’alors président de la commission d’audit de la fondation a présenté sa démission le 6 janvier, y ajoutant une explication détaillée de sa décision.
 
« En tant que chef de la commission d’audit et administrateur de la Fondation, j’estime que ce don a été accordé avec désinvolture, vérifié de manière déficiente, et contraire à l’esprit de la Fondation. Plutôt que d’aider les pauvres dans un pays du tiers-monde, le bureau a approuvé une subvention énorme, sans précédent, à un hôpital qui a une histoire de mauvaise gestion, de poursuites judiciaires et de banqueroute. Si nous avions commis de telles imprudences dans nos carrières personnelles, nous n’aurions jamais rempli les conditions pour faire partie de la Papal Foundation », écrit-il.
 
Les 8 millions de dollars virés initialement n’était pas accompagné d’un quelconque document comptable ; le bureau devait par la suite recevoir un gros dossier d’information depuis Rome, ne comportant pas de bilan, ni d’éléments sur l’éventuelle utilisation des 25 millions de dollars demandés. Ensevelie parmi des centaines de pages une simple projection financière tenant sur une seule page et intitulée « plan de discussion » annonçait : 2017, bénéfice de 6 millions d’euros ; 2018, bénéfice de 2,4 millions d’euros ; 2019, bénéfice de 4,4 millions d’euros.
 
Dégoûté, le responsable des audits ajoutait : « J’ai mis en évidence le fait qu’il n’y a pas eu d’étude professionnelle du dossier, mais beaucoup de vent. Si les chiffres présentés étaient exacts, alors cette entreprise commerciale devrait s’adresser à une banque. Ils n’ont pas besoin de notre argent. Si les chiffres étaient erronés, alors il était impossible de prendre une décision. »
 

Le pape François a demandé le versement de 25 millions de dollars à l’Istituto Dermopatico dell’Immacolata

 
D’après les documents, le pape François a demandé que ces fonds soient remis à l’Istituto Dermopatico dell’Immacolata (IDI), au centre de scandales financiers depuis plusieurs années. Ainsi en mai 2013, une descente de police à abouti à la saisie de 6 millions d’euros dans une affaire de corruption. En juin 2015, Reuters faisait le lien avec le fait que des magistrats italiens soupçonnaient le cardinal de Curie Giuseppe Versaldi d’avoir détourné 30 millions d’euros destinés à un hôpital pour enfants appartenant à l’Eglise vers ce fameux Istituto Dermopatico.
 
En 2016, l’agence italienne ANSA annonçait que « la brigade financière » avait découvert « que l’IDI était dans le rouge à hauteur de 845 millions d’euros, tout en étant soupçonné d’évasion fiscale pour 450 millions d’euros, tandis que 82 millions d’euros auraient été détournés, ainsi que 6 millions d’euros de fonds publics ».
 
En mai 2017, La Repubblica – le seul journal que le pape dit lire – consacrait un article à une douzaine de condamnations judiciaires consécutives à 24 inculpations autour de l’hôpital dermatologique, dont plusieurs assorties de plus de trois ans de prison, portant sur les sommes détaillées plus haut.
 
Une lettre signée par le cardinal Wuerl et le cardinal Dolan, ainsi que le président de la Fondation Mgr Michael Bransfield et plusieurs « stewards » responsables de l’exécutif ne cache pas que la demande venait directement du pape François :
 
« Nous sommes nombreux à croire que, s’il s’était agi de nous, nous aurions dit au Saint-Père que la Papal Foundation ne serait pas en mesure d’apporter une assistance à ce projet – mais nous n’étions pas face à lui. Nous pouvons avoir une idée de ce que nous aurions fait, si cela avait été l’un de nous, mais nous ne le savons pas vraiment. En fait, nous avons été très clairs tout au long de notre histoire à propos du fait qu’il s’agit de la Papal Foundation. Nous avons travaillé de concert avec le pape depuis le tout début. Nous n’approuvons pas chaque demande qu’il fait, mais il est le pape, et nous l’écoutons, et nous l’écoutons intensément. »
 

La Papal Foundation aux Etats-Unis secoué par des démissions et des désaccords

 
La lettre fait état des « légitimes dissensions » qui peuvent se produire, affirmant tout de même (et un peu hors de propos) : « Si nous n’avons pas la charité les uns envers les autres, nous sommes des cymbales retentissantes. » « Nous ne croyons pas qu’il soit dans les meilleurs intérêts du Christ ou de son Eglise de présumer la mauvaise foi ou la mauvaise volonté »… Rappelant qu’en dernière analyse, le contrôle est exercé au sein de la fondation par les cardinaux résidant aux Etats-Unis, les signataires reconnaissent que « lorsqu’un don représente plus de 100 fois le montant du plus grand nombre de nos dons, il doit y avoir une quasi-unanimité lors du vote, et ce n’est pas ce qui s’est produit ».
 
Pour l’heure, le cardinal Wuerl a demandé à la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège de ne plus accepter de sommes dans le cadre du don approuvé en décembre, et le bureau de la Fondation a proposé une nouvelle règle qui exige l’accord majoritaire des administrateurs, aussi bien ecclésiastiques que laïques, pour tout versement dépassant le million de dollars.
 
John Henry Westen de LifeSiteNews rapporte que dans un premier temps, début janvier, il y a eu une tentative pour expliquer aux membres mécontents de la Papal Foundation que le don de 25 millions de dollars avait pour but de contribuer à la lutte contre la corruption – une corruption qui reste d’actualité selon une source vaticane citée par le site anglophone, bien que le pape François soit parfaitement au courant de ce qui se passe.
 
La Papal Foundation existe depuis trente ans et gère des fonds qui atteignent aujourd’hui 215 millions de dollars, quelque 121 millions de dollars ayant été versés au fil des ans à des projets qui ont presque tous été approuvés à la quasi unanimité du bureau.
 
On peut voir les documents cités par LifeSite : rapport aux membres du 5 janvier dernier, la lettre du 19 janvier signée des cardinaux Dolan et Wuerl, et la protestation de la commission d’audit.
 

Jeanne Smits